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Catherine et le temps d'aimer

Catherine et le temps d'aimer

Titel: Catherine et le temps d'aimer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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pensée-là, elle ne voulait pas s'y arrêter, même un instant !
    Et, tout à coup, elle crut entendre, venue du fond des temps, une voix flûtée et zézayante qui murmurait :
    — Si, un jour, tu ne sais plus ni que faire ni où aller, viens me rejoindre. Dans ma petite maison au bord du Génil, les citronniers et les amandiers poussent tout seuls et les rosiers embaument une grande partie de l'année. Tu seras ma sœur et je t'apprendrai la sagesse de l'Islam...
    Etrange et fidèle miroir de la mémoire ! L'impression fut si nette que Catherine crut voir soudain se dresser devant elle, dans la lumière blanche de la lune, la forme frêle d'un homme jeune portant une large robe bleue, une absurde barbe blanche et un énorme turban orange en forme de citrouille... Son nom jaillit tout naturellement de ses lèvres :
    — Abou !... Abou-al-Khayr !... Abou le médecin !
    C'était vrai pourtant et il fallait qu'elle eût plongé bien profondément dans la douleur pour n'y avoir pas songé plus tôt !
    Abou, son vieil ami, vivait à Grenade ! Il était le médecin, l'ami du sultan ! Il saurait, lui, ce qu'il fallait faire et il l'aiderait, elle en était sûre !
    Envahie d'une joie soudaine, Catherine acheva de s'habiller en hâte, roula ses vêtements en un paquet qu'elle logea sous son bras et courut rejoindre Josse.
    — Allons ! fit-elle ; allons, vite !
    Il la regarda, éberlué de la transformation qui s'était opérée chez elle en si peu d'instants, et ne put s'empêcher de le lui dire !
    — Vrai Dieu ! Dame Catherine, vous avez l'air d'un petit coq de combat !
    — C'est que nous allons nous battre, mon ami, avec toutes les armes, toutes les ruses que nous trouverons !

    Je veux arracher mon mari à cette femme ou j'y perdrai la vie ! À
    cheval !
    Comme des ombres, Catherine et Josse se glissèrent hors du cloître. Le seul danger était la traversée de la grande salle, mais le feu avait encore baissé. Il y avait de grandes zones obscures... Tout en se faufilant, avec des précautions de chat, parmi les corps étendus, Catherine, bien protégée par son costume, glissa un regard vers la cheminée. Assise sur la pierre auprès de Jean Van Eyck qui se tenait debout face au foyer, Ermengarde causait avec lui à voix basse, mais avec animation. Ils devaient préparer leur plan... Catherine ne put s'empêcher de sourire et de leur adresser un ironique et muet adieu.
    Lentement, les deux fugitifs gagnèrent la porte. Josse l'entrouvrit avec précaution. Mais le léger bruit qu'elle fit se trouva couvert par les ronflements sonores des Navarrais qui dormaient pêle-mêle tout auprès... Catherine se glissa au-dehors et Josse passa après elle...
    — Sauvés ! souffla-t-il ! Venez vite !
    Il la saisit par la main, l'entraîna hors de l'hospice. Sous la voûte, deux chevaux attendaient, tout sellés, leurs sabots enveloppés de chiffons. Joyeusement, Josse tendit le bras désignant le ciel où s'amoncelaient les nuages. La lune était déjà presque entièrement absorbée. La dangereuse lumière trop blanche diminuait d'instant en instant.
    — Regardez ! Le ciel lui-même est pour nous ! En selle, maintenant, mais prenez garde : le chemin est raide et dangereux !
    — Moins dangereux que les hommes en général et les amis en particulier ! riposta Catherine.
    Un instant plus tard, au petit trot prudent de leurs chevaux, Catherine et son compagnon s'élançaient sur le chemin de Pampelune.
    Dans un geste où il y avait du défi, la jeune femme salua au passage le gigantesque rocher que, selon la légende, l'épée de" Roland le Preux avait ouvert de haut en bas. Celui-là avait fendu une montagne. Elle ferait mieux !...
    Josse Rallard retint son cheval et étendit le bras.
    — Voilà Burgos ! dit-il, et la nuit est proche. Nous y arrêtons-nous
    ?
    Sourcils froncés, Catherine examina un moment la ville étendue à ses pieds. Après les interminables solitudes du rêche plateau durci par le gel, écorché par le vent, après ces étendues d'un jaune délavé, la capitale des rois de Castille était décevante. Une grosse cité grise et jaune, close de remparts de même couleur, dominée par la masse menaçante d'un fort château. Rien de bien remarquable !... Si, pourtant
    : une immense construction, enguirlandée d'échafaudages, mais découpée comme une dentelle, ciselée comme un bijou et qui, dans la lumière pauvre du soir, semblait faite d'ambre roux, s'étendait sur la ville qu'elle avait l'air de couver :

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