Guerre Des Gaules
largeur qu'en occupaient nos troupes une fois mises en
ligne, et se terminait à chaque extrémité par des pentes abruptes,
tandis qu'en avant elle formait une crête peu accentuée pour
s'abaisser ensuite insensiblement vers la plaine. César fit creuser
à chaque bout un fossé d'environ quatre cents pas de long
perpendiculairement à la ligne de bataille ; aux extrémités de
ces fossés il établit des redoutes et disposa des machines, pour
éviter que les ennemis, une fois nos troupes déployées, ne pussent,
étant si nombreux, nous prendre de flanc tandis que nous serions
occupés à combattre. Ces dispositions prises, il laissa dans le
camp les deux légions de formation récente, pour qu'elles pussent,
au besoin, être amenées en renfort, et il rangea les six autres en
bataille en avant de son camp. L'ennemi, de même, avait fait sortir
et déployé ses troupes.
9. Il y avait entre les deux armées un marais
de peu d'étendue. L'ennemi attendait, espérant que les nôtres
entreprendraient de le franchir ; de leur côté les nôtres se
tenaient prêts à profiter des embarras de l'ennemi, s'il tentait le
premier le passage, pour fondre sur lui. Pendant ce temps, un
combat de cavalerie se livrait entre les deux lignes. Aucun des
adversaires ne se hasardant le premier à travers le marais, César,
après que l'engagement de cavalerie se fut terminé en notre faveur,
ramena ses troupes dans le camp. Les ennemis, aussitôt, se
portèrent sans désemparer vers l'Aisne qui, on l'a dit, coulait
derrière nôtre camp. Là, ayant trouvé des gués, ils essayèrent de
faire passer la rivière à une partie de leurs forces, dans le
dessein d'enlever, s'ils le pouvaient, le poste commandé par le
légat Quintus Titurius, et de couper le pont ; s'ils ne
réussissaient pas, ils dévasteraient le territoire des Rèmes, d'où
nous tirions de grandes ressources pour cette campagne et nous
empêcheraient de nous ravitailler.
10. César, informé par Titurius, fait franchir
le pont à sa cavalerie, à l'infanterie légère des Numides, aux
frondeurs et aux archers, et marche contre les ennemis. Il y eut un
violent combat. On les attaqua dans l'eau, qui gênait leurs
mouvements, et l'on en tua un grand nombre ; les autres,
pleins d'audace, essayaient de passer par-dessus les
cadavres : une grêle de traits les repoussa ; ceux qui
avaient déjà passé, la cavalerie les enveloppa et ils furent
massacrés. Quand les Belges comprirent qu'ils devaient renoncer et
à prendre Bibrax et à franchir la rivière, quand ils virent que
nous nous refusions à avancer, pour livrer bataille, sur un terrain
défavorable, comme enfin ils commençaient, eux aussi, à manquer de
vivres, ils tinrent conseil et décidèrent que le mieux était de
retourner chacun chez soi, sauf à se rassembler de toutes parts
pour défendre ceux dont le territoire aurait été d'abord envahi par
l'armée romaine ; de la sorte ils auraient l'avantage de
combattre chez eux et non chez autrui, et ils pourraient user des
ressources de ravitaillement que leur pays leur offrait. Ce qui les
détermina, ce fut, outre les autres motifs, la raison
suivante : ils avaient appris que Diviciacos et les Héduens
approchaient du pays des Bellovaques, et on ne pouvait convaincre
ces derniers de tarder plus longtemps à secourir les leurs.
11. La chose résolue, ils sortirent du camp
pendant la deuxième veille en grand désordre et tumulte, sans
méthode ni discipline, chacun voulant être le premier sur le chemin
du retour et ayant hâte d'arriver chez lui ; si bien que leur
départ avait tout l'air d'une fuite. César, aussitôt informé par
ses observateurs de ce qui se passait, craignit un piège, parce
qu'il ne savait pas encore la raison de leur retraite, et il retint
au camp ses troupes, y compris la cavalerie. Au petit jour,
apprenant par ses éclaireurs qu'il s'agissait bien d'une retraite,
il envoya en avant toute sa cavalerie pour retarder
l'arrière-garde ; il lui donna pour chefs les légats Quintus
Pédius et Lucius Aurunculéius Cotta. Le légat Titus Labiénus reçut
l'ordre de suivre avec trois légions. Ces troupes attaquèrent les
derniers corps et, les poursuivant sur plusieurs milles, tuèrent un
grand nombre de fuyards : l'arrière-garde, qu'on atteignit
d'abord, fit face et soutint vaillamment le choc de nos
soldats ; mais ceux qui étaient en avant pensaient être hors
de danger et n'étaient retenus ni par la nécessité, ni
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