Guerre Des Gaules
pensa que leur imprudence lui fournirait quelque
heureuse occasion de livrer bataille laissant cinq cohortes à la
garde des bagages, il marche à la rencontre des ennemis avec
vingt-cinq cohortes et une nombreuse cavalerie, et se retranche à
mille pas de leur camp. Il y avait entre eux et Labiénus une
rivière difficile à franchir, bordée de rives abruptes. Il n'avait
pas, quant à lui, l'intention de la traverser, et il ne pensait pas
que l'ennemi voulût le faire. Celui-ci espérait chaque jour
davantage voir arriver les Germains. Labiénus parle dans le conseil
de façon à être entendu des soldats : « Puisqu'on dit que
les Germains approchent, il ne veut pas hasarder le sort de l'armée
et le sien, et le lendemain, au lever du jour, il s'en ira. »
Ces propos ne tardent pas à être rapportés à l'ennemi, car sur tant
de cavaliers gaulois plus d'un était naturellement porté à
favoriser la cause gauloise. Labiénus convoque pendant la nuit les
tribuns et les centurions des premières cohortes il leur expose son
dessein et, pour mieux faire croire à l'ennemi qu'il a peur, il
ordonne de lever le camp plus bruyamment et plus confusément que ne
font à leur ordinaire les armées de Rome. Par ce moyen, il donne à
son départ l'allure d'une fuite. L'ennemi en est également informé
avant le jour, vu la proximité des deux camps, il est au courant
par ses éclaireurs.
8. A peine l'arrière-garde avait-elle dépassé
les retranchements que, s'excitant les uns les autres à ne pas
laisser échapper de leurs mains une proie désirée – « Il était
trop long, disaient-ils, du moment que les Romains avaient peur,
d'attendre l'appui des Germains ; leur honneur ne souffrait
point qu'avec de telles forces ils n'eussent pas l'audace
d'attaquer une troupe si peu nombreuse et, qui plus est, en fuite,
embarrassée de ses bagages » –, les Gaulois n'hésitent pas à
passer la rivière et à engager le combat dans une position
défavorable. Labiénus avait prévu la chose et, pour les attirer
tous en deçà du cours d'eau, il continuait sa feinte et avançait
lentement. Puis, après avoir envoyé les bagages un peu en avant et
les avoir fait placer sur un tertre, il adresse aux troupes ces
paroles : « Voici, soldats, l'occasion souhaitée :
vous tenez l'ennemi sur un terrain où ses mouvements ne sont pas
libres et où nous le dominons ; montrez sous nos ordres la
même bravoure que le général en chef vous a vu si souvent déployer,
et faites comme s'il était là, s'il voyait ce qui se passe. »
Aussitôt il fait tourner les enseignes contre l'ennemi et former le
front de bataille ; il envoie quelques escadrons garder les
bagages et place le reste de la cavalerie aux ailes. Promptement
les nôtres poussent la clameur de l'attaque et lancent le javelot.
Quand les ennemis, étonnés, virent marcher contre eux ceux qu'ils
croyaient en fuite, ils ne purent soutenir le choc et, mis en
déroute à la première attaque, ils gagnèrent les forêts voisines.
Labiénus lança la cavalerie à leur poursuite, en tua un grand
nombre, fit une multitude de prisonniers et, peu de jours après,
reçut la soumission de la cité. Quant aux Germains, qui arrivaient
en renfort, lorsqu'ils apprirent la déroute des Trévires, ils
rentrèrent dans leur pays. Les parents d'Indutiomaros, auteurs de
la sédition, s'exilèrent et partirent avec eux. Cingétorix, qui,
nous l'avons dit, était resté depuis le début dans le devoir, fut
investi de l'autorité civile et militaire.
9. César, quand il fut venu du pays des
Ménapes dans celui des Trévires, résolut, pour deux motifs, de
passer le Rhin : d'abord parce que les Germains avaient envoyé
des secours aux Trévires contre lui, et en second lieu pour
qu'Ambiorix ne pût trouver chez eux un refuge. Ayant décidé cette
expédition, il entreprend de construire un pont un peu en amont de
l'endroit où il avait fait précédemment passer son armée. Le
système de construction était connu, on l'avait déjà
pratiqué ; les soldats travaillent avec ardeur, et en peu de
jours l'ouvrage est achevé. Laissant une forte garde au pont, chez
les Trévires, pour éviter qu'une révolte n'éclate soudain de ce
côté, il passe le fleuve avec le reste des légions et la cavalerie.
Les Ubiens, qui avaient précédemment donné des otages et fait leur
soumission, lui envoient des députés pour se justifier ils
déclarent que les secours envoyés aux Trévires ne venaient pas
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