Guerre Des Gaules
parut favorable
pour décider l'attaque, car il apercevait quelque relâchement dans
la garde du rempart ; il dit à ses soldats de ralentir leur
travail, et leur fit connaître ce qu'il attendait d'eux. Il réunit
secrètement les légions, en tenue de combat, en deçà des baraques,
et les exhorta à cueillir enfin après tant de fatigues le fruit de
la victoire ; il promit des récompenses pour ceux qui auraient
les premiers escaladé le rempart, et donna le signal de l'assaut.
Ils bondirent soudain de toutes parts et eurent vite fait de garnir
la muraille.
28. Les ennemis, effrayés par ce coup
inattendu, furent chassés du mur et des tours ; ils se
reformèrent sur le forum et sur les places, résolus à faire front
du côté où viendrait l'attaque et à livrer une bataille rangée.
Mais quand ils virent qu'au lieu de descendre lutter de plain-pied
nos soldats les enveloppaient en occupant toute la muraille, ils
craignirent de se voir ôter toute chance de retraite et, jetant
leurs armes, ils gagnèrent d'un seul élan l'extrémité de la
ville ; là, comme ils se pressaient devant l'étroite issue des
portes, nos fantassins les massacrèrent, tandis que ceux qui
étaient déjà sortis tombaient sous les coups de nos cavaliers.
Personne ne pensa au butin ; excités par le souvenir du
carnage de Cénabum et par les fatigues du siège, ils n'épargnèrent
ni les vieillards, ni les femmes, ni les enfants. Bref, d'un
ensemble d'environ quarante mille hommes, à peine huit cents, qui
s'enfuirent hors de la ville aux premiers cris, arrivèrent sains et
saufs auprès de Vercingétorix. Celui-ci, craignant que leur arrivée
tumultueuse et l'émotion que leur vue provoquerait dans une foule
impressionnable ne fussent cause d'une émeute, les reçut en pleine
nuit et silencieusement, ayant pris soin de disposer sur la route,
à bonne distance du camp, ses compagnons d'armes et les chefs des
cités, qui avaient mission de les trier et de conduire chaque
groupe vers les divers quartiers assignés au début de la campagne à
chaque peuple.
29. Le lendemain ayant convoqué le conseil, il
apporta aux siens consolations et encouragements, les invitant à ne
pas se laisser abattre ni bouleverser pour un revers :
« Ce n'est point par leur valeur et en bataille rangée que les
Romains ont triomphé, mais grâce à une technique, à un art des
sièges qui ont surpris l'ignorance des Gaulois. On se trompe, si
l'on s'attend, dans la guerre, à n'avoir que des succès. Pour lui,
il n'a jamais été d'avis de défendre Avaricum, eux-mêmes en sont
témoins ; le malheur est dû au manque de sagesse des Bituriges
et à l'excessive complaisance des autres. N'importe, il aura vite
fait de le réparer par de plus importants succès. Les peuples
gaulois qui se tiennent encore à l'écart entreront, par ses soins,
dans l'alliance, et il fera de toute la Gaule un faisceau de
volontés communes auquel le monde entier même sera incapable de
résister ; ce résultat, il l'a déjà presque atteint. En
attendant, il est juste qu'ils veuillent bien, pour le salut de
tous, se mettre à fortifier le camp, afin d'être mieux à même de
résister aux attaques soudaines de l'ennemi. »
30. Ce discours ne déplut pas aux
Gaulois : on lui savait gré surtout de n'avoir pas perdu
courage après un coup si rude, de ne s'être point caché ni dérobé
aux regards : on lui reconnaissait des dons supérieurs de
discernement et de prévision, parce qu'il avait été d'avis, alors
que la situation était entière, d'abord d'incendier Avaricum, puis
de l'abandonner. Aussi, tandis que les autres chefs voient les
revers diminuer leur autorité, lui, au contraire, après un échec,
grandissait de jour en jours. En même temps, ses assurances
faisaient naître l'espoir que les autres cités entreraient dans
l'alliance ; les Gaulois se mirent alors, pour la première
fois, à fortifier leur camp le choc avait été si rude que ces
hommes qui n'étaient pas habitués au travail pensaient devoir se
soumettre à tout ce qu'on leur commandait.
31. Cependant Vercingétorix, comme il l'avait
promis, faisait tous ses efforts pour adjoindre à la coalition les
autres cités, et cherchait à en gagner les chefs par des présents
et des promesses. Il choisissait pour atteindre ce but les
auxiliaires les plus qualifiés, ceux à qui l'habitude de leur
éloquence ou leurs relations d'amitié donnaient le plus de moyens
de séduction. Il s'occupe, d'autre part,
Weitere Kostenlose Bücher