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Histoire De France 1758-1789, Volume 19

Histoire De France 1758-1789, Volume 19

Titel: Histoire De France 1758-1789, Volume 19 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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dans l'affaire de Pologne. Il dit d'abord avec son ton tranchant: «C'est loin, très-loin de nous. Eh! qu'importe à la France?» Puis il dit: «Nul accord possible entre les partageants.» Puis, il s'inquiéta, encouragea les résistances, envoya des secours minimes et dérisoires (Boutaric, I, 145, 155). Il souleva les Turcs mais ne put faire bouger l'Autriche.
    Où se réfugia la Pologne? Précisément dans le principe catholique qui l'avait perdue. La Confédération de Bar donne beau jeu aux hypocrites envahisseurs qui reprochaient l'intolérance aux Polonais [11] . Menée par des évêques, elle jure le triomphe du catholicisme, son maintien exclusif contre les protestants (1768). Qu'arrive-t-il? Un tiers sans scrupule viendra prendre sa part. Le jeune empereur Joseph II, sectaire de Frédéric et de nos philosophes, entrera en Pologne. L'Europe protestante, et l'Angleterre en tête, applaudit au partage. L'Angleterre, tout à l'heure, empêche à main armée les faibles tentatives de la France pour les Polonais.
    Myope vers le Nord, Choiseul vit-il clair au Midi? Ily eut deux succès, deux conquêtes faciles, qui eurent pour sa ruine d'incalculables résultats. Il prit Avignon, prit la Corse.
    Clément XIII, irrité du renvoi des Jésuites, d'Espagne, de Naples et de Parme, s'en prit au plus faible des trois, à notre infant de Parme, lança l'excommunication. Choiseul en prit prétexte pour venger les Bourbons. Il saisit le Comtat (juin 1768). Et, presque en même temps, jetant toute une armée en Corse, il s'en empara en trois mois (juin 1769), méprisables conquêtes. Avignon, saisi pour un jour. La Corse, possession précaire, si peu sûre pour la France toujours secondaire en marine, à qui la mer peut se fermer demain.
    Cette petite Corse, méchant «rocher sanglant,» ( Notes de Louis XVI ), exaspéra l'Anglais et lui fit faire une énorme sottise. En haine de Choiseul et des Turcs, il seconda, exalta la Russie. Du fond de la Baltique, il prend sa flotte en main, l'accueille dans ses ports. Londres était Russe pour ses bas intérêts (les suifs, cuirs et goudrons). L'Europe applaudissait. Les Russes vont délivrer la Grèce. Voltaire crie: «Bravo! Salamine! Victoire! Résurrection d'Athènes!» Remorqué par l'Anglais, le bas coquin Orloff, l'étrangleur de Pierre III, détruit la flotte turque à Tschesmé (juillet 1770). L'Anglais a eu le beau succès d'avoir fait de la Russie une glorieuse puissance maritime.
    La nouvelle, à l'instant portée en Allemagne, trouve Frédéric et Joseph II en conférence, en amitié. Seconde défaite pour Choiseul. Ses Turcs sont écrasés, son Autriche lui tourne le dos.
    Sa troisième défaite est en France. Le compte de laguerre de Sept Ans, remis à 63, remis à 67, irrémissiblement l'accable en 69. Les banquiers de la cour n'avancent plus un sou. La catastrophe arrive, la banqueroute, accomplie par Terray. Quelle banqueroute? celle de Choiseul. Impudemment il crie contre Terray, et Terray peut répondre: «Vos quinze cent millions de la guerre de Sept Ans ( V. Voltaire ), soixante-quinze millions donnés à Vienne, c'est la banqueroute d'aujourd'hui.» Dans cette même année 1769, Choiseul payait encore son tribut à l'Autriche. Il fait avec Terray comme un homme qui, ayant encombré la place d'ordures, crie haro sur le balayeur.
    Le pis pour celui qui avait si bien surpris l'opinion, c'est qu'elle risquait fort de lui échapper un matin. Visiblement il n'avait rien prévu, et Vienne s'était moquée de lui. Le moqueur, le méchant , drapé en scélérat, allait tout bonnement paraître un innocent.
    Sans la guerre il était perdu, c'était sa dernière chance. Il nie qu'il l'ait voulue. Mais ses actes, sa situation, son intérêt visible pèsent beaucoup plus que ses paroles.
    De longue date il préparait la guerre. Il aigrissait l'Anglais. Il payait sans mystère les aboyeurs de Londres et ses faux patriotes. Lord Rochefort réclamant pour la Corse, n'en tire qu'un mot impertinent: «Qu'il ne ferait pas un seul pas, dans sa chambre même, pour rassurer l'Angleterre là-dessus.»
    Parler ainsi, braver la guerre, quand on est sans ressources, quand on est arrivé, de délai en délai, à la dernière culbute, faire en pleine banqueroute le bravache insolent, cela se comprend-il? Il avait, il estvrai, fait des vaisseaux, mais nullement refait la marine. Il avait en espoir la révolte des États-Unis, mais révolte future, lointaine, éloignée de six ans, et

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