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Histoire De France 1758-1789, Volume 19

Histoire De France 1758-1789, Volume 19

Titel: Histoire De France 1758-1789, Volume 19 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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Le montrant, elle dit: «Vois-tu ce roi? la France! ... Eh bien! ton Parlement te fera couper la tête aussi.»
    Maupeou, Terray, deux têtes fortes, étaient derrière, et la faisaient parler. Ils savaient au plus juste ce qu'on pouvait oser. Le Roi ayant imposé le silence sur d'Aiguillon, et le Parlement s'en moquant, le Roi, le 3 septembre, vint enlever les pièces. Le 24 décembre, il exila Choiseul. La nuit du 20 janvier il enleva le Parlement.
    Heureux Choiseul! Il tombe dans la gloire! Il a l'air d'emporter les libertés publiques. Il tombe à point, à temps pour esquiver l'horreur de la ruine publique, la banqueroute qu'il a préparée.
    Sa chute est un triomphe. Toute la France va s'inscrire chez lui. Tout court à Chanteloup. Les habiles envisagent le roi vieux et usé, et la jeune Dauphine autrichienne dont Choiseul (on n'en doute) sera premier ministre.
    Le Roi, dans son courage de renverser Choiseul, fut très-timide encore. Il eut peur de la voix publique, peur des révélations qu'il pouvait faire, et qu'il ne fit que mieux, les livrant à la foule de ses visiteurs innombrables, leur disant à tous à l'oreille ce qu'il voulait faire répéter. Non sans raison, d'Aiguillon se demande si le Roi n'eût pas risqué moins à mettre Choiseul en jugement.
    Le Parlement était peu regrettable. Dans ses cruels procès des derniers temps, il s'était fort souillé. Doux pour Choiseul qui lui donnait les places, doux pour Terray qui le ménage seul dans l'universelle ruine, il se soutenait peu dans sa vieille voie d'austérité. Il n'avait pu rien faire, rien empêcher, ni les guerres de ce règne, ni la ruineuse banqueroute, ni l'asservissement à l'Autriche. Il tua les Jésuites, mais tard, et quand ils étaient morts.
    On en peut dire une seule chose, assez grave au fond: Il parlait. Il prêtait une voix officielle à l'opinion. Parlage utile qui l'avança parfois; mais funeste pourtant, s'il devait à jamais faire qu'on s'en tînt à des paroles, et que jamais la France ne fît sa vraie constitution.
    La révolution de Maupeou, louée et saluée de Voltaire, fut approuvée très-haut par un sérieux juge, qui eût voulu la maintenir, par l'irréprochable Turgot. Elle rend la justice gratuite. Elle supprime la vénalité des charges, réduit le ressort immense du Parlement de Paris, qui comprenait Arras et Lyon, imposait des voyages immenses et ruineux aux plaideurs, et les faisait attendre des années.
    À regarder les choses froidement, on peut dire que la révolution avait été heureuse.
    Elle brisait la chaîne qui nous rattachait à l'Autriche. D'Aiguillon, tant haï et méprisé qu'il fût, eût voulu revenir au système français, à la tradition de son grand-oncle, le cardinal de Richelieu.
    D'Aiguillon dit de la Pologne: «Qu'y pouvais-je? C'était trop tard. Il eût fallu agir depuis longtemps.Tout était impossible dans l'état où Choiseul laissa la France, ruinée, épuisée pour l'Autriche.» (V. Mémoires d'Aiguillon .)
    Quoi qu'on pût faire alors, tout gouvernement était sûr d'être d'avance condamné, moqué, maudit, flétri. De Maupeou, d'Aiguillon, de Terray, on ne voulait rien, on n'acceptait rien. Leur ministère semblait un moment de passage, un carnaval malpropre où l'on ne pouvait se mêler. On ne voulait y voir qu'une fille flanquée de trois fripons.
    Maupeou eut beau chercher. Pour sa magistrature, il trouva peu de gens honnêtes. Ceux qui l'auraient été, ayant endossé cette honte de se rattacher à Maupeou, se découragèrent, se salirent. Plus on les méprisa, plus ils furent méprisables. Paris accueillait tout contre eux.
    On lut avidement les amusants mémoires où Beaumarchais soutint avoir corrompu un des leurs. Ce Figaro, lui-même équivoque intrigant, puis spéculateur éhonté, justement étrillé plus tard par Mirabeau, Éon, etc., fut cru comme Évangile, quand il servit la haine, le mépris du public pour les magistrats de Maupeou.
    D'Aiguillon avait eu cependant un succès qui aurait relevé tout autre. Tirant de la disgrâce un homme très-capable, Vergennes, il l'envoya en Suède et y fit la révolution. La Russie et la Prusse comptaient sur l'anarchie qu'entretenait le sénat; déjà sur le papier ils se partageaient la Suède. (Geffroy d'après les Archives de Suède .) Avec notre Vergennes et un peu d'argent de la France, la royauté y fut rétablie parGustave, le partage empêché. Ce fut le salut du pays (1773).
    D'Aiguillon avait fait quelques

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