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La Fin de Pardaillan

Titel: La Fin de Pardaillan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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attitude se modifia. Elle devint tout miel. Et de son air doucereux, avec un sourire qu’elle s’efforçait de rendre engageant et affectueux, et qui ne réussissait qu’à la rendre plus hideuse encore, elle protesta :
    – Là ! là ! tu es bien toujours la même : vive et emportée comme une soupe au lait ! Rassure-toi, je ne veux pas t’emmener. Je sais bien que je ne suis pas ta mère et que je n’ai aucun droit sur toi. Tu n’as donc rien à craindre de moi.
    – Alors, laissez-moi passer. Je suis pressée de finir mon travail, répliqua Brin de Muguet qui se tenait sur ses gardes.
    – Toujours vive, donc ! plaisanta La Gorelle. Tu as bien une minute, une toute petite minute à m’accorder.
    Et larmoyant :
    – Sainte Thomasse me soit en aide, je ne suis pas ta mère, c’est vrai… Tout de même, je t’ai élevée… si tu l’oublies, toi, je ne l’oublie pas, moi, et je t’aime, vois-tu, comme si tu étais ma propre fille.
    – Enfin, que voulez-vous ?
    – Mais rien… Rien de rien, douce vierge !… Je veux seulement te dire que je suis heureuse de te voir si florissante, si richement nippée, en passe de faire fortune… Car tu fais des affaires d’or, ma fille… En vends-tu des fleurs, en vends-tu !… C’est justice d’ailleurs, car tu es bien la plus adroite, la plus habile bouquetière qu’on ait jamais vue !… Et puis, je voudrais te demander une chose… une toute petite chose, sans conséquence pour toi…
    Brin de Muguet, qui se tenait plus que jamais sur la défensive, en entendant ces derniers mots, porta d’instinct la main à son petit sac de cuir pour y puiser quelque menue monnaie trop heureuse de se débarrasser de la mégère à si bon compte. Ce geste alluma une flamme dans l’œil de La Gorelle qui, machinalement, tendit la griffe. Elle se souvint à temps de ce que lui avait dit la dame inconnue. Elle n’acheva pas le geste et refusa :
    – Mais non, mais non, ma petite, garde ton argent…, tu as assez de mal à le gagner… Dieu merci, j’ai hérité de quelque petit bien, et… sans être à mon aise… je n’ai besoin de rien.
    Il semblait que les mots lui écorchaient les lèvres en passant. Son regret était déchirant. Et de l’effort qu’elle faisait pour refuser cette pauvre petite somme d’argent qui la tentait, des gouttes de sueur perlaient à son front. Ce refus qui la désespérait était si extraordinaire, si imprévu de sa part, que la jeune fille en fut toute saisie et bégaya :
    – Que voulez-vous donc ?
    – Te demander un petit renseignement, pas plus, fit La Gorelle avec vivacité et en accentuant encore son air doucereux.
    Les curieux, qui s’étaient arrêtés, s’éloignèrent les uns après les autres en voyant que la vieille ne paraissait pas animée de mauvaises intentions. L’amoureux, lui-même, rassuré sur les suites de cette entrevue qui avait débuté d’une manière inquiétante, s’éloigna à son tour. Il n’alla pas loin pourtant, il s’arrêta quelques pas plus loin et reprit sa discrète surveillance.
    Les deux femmes se trouvèrent seules, face à face. Elles étaient au milieu de la rue, entre la rue de Grenelle et la rue du Coq. De l’entrée de ces deux dernières rues on pouvait, sinon les entendre, du moins les voir aussi loin que le permettait le va-et-vient des passants. Et, en effet, la dame inconnue, toujours aux aguets derrière les mantelets de sa litière, les voyait très bien. Brin de Muguet tournait le dos à la porte Saint-Honoré. A quelques pas derrière elle se dressait un pilori. Ce pilori était situé presque juste à l’endroit où la rue des Petits-Champs, qui devait s’appeler plus tard rue Croix-des-Petits-Champs, aboutissait à la rue Saint-Honoré, par conséquent tout près de l’église Saint-Honoré. L’amoureux se trouvait derrière la jeune fille, entre elle et le pilori. Il se dissimulait derrière le pilier d’une maison.
    A ce moment, une troupe assez nombreuse s’avançait de la rue du Coq (devenue rue Marengo) vers la rue Saint-Honoré. Avant longtemps elle devait déboucher à l’endroit même où se trouvaient les deux femmes qui, au reste, ne s’en occupaient pas, ne la voyaient même pas.
    A ce moment aussi, deux gentilshommes qui paraissaient venir de la porte Saint-Honoré, approchaient aussi de la jeune fille. Il était impossible d’avoir plus haute mine que celle de ces deux gentilshommes. Pourtant ils étaient très simplement vêtus

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