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L'arc de triomphe

L'arc de triomphe

Titel: L'arc de triomphe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: E.M. Remarque
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continuer à marcher sous cette pluie battante !
    Elle resserra son imperméable.
    « Vous avez raison, dit-elle, comme si elle venait tout à coup de prendre une décision. Vous avez raison. Merci. Ne vous occupez plus de moi. Merci pour tout ce que vous avez fait. »
    Elle leva vers Ravic des yeux emplis de détresse. Elle tenta vainement de sourire. Puis, sans hésiter, d’un pas silencieux, elle s’enfonça dans la bruine.
    Ravic demeura un instant immobile, surpris, irrésolu. Il ne comprenait pas ce qui se passait en lui. Était-ce le sourire triste, le regard désespéré, la rue déserte ou la nuit ? Il sentit qu’il ne pouvait laisser aller seule dans le brouillard cette femme qui tout à coup avait eu l’air d’un enfant abandonné.
    Il la rejoignit.
    « Venez avec moi, dit-il avec rudesse. Nous allons trouver quelque chose. »
    Ils atteignirent l’Etoile. Dans la grisaille mouillée, la place semblait immense et sans limites. Le brouillard était devenu plus dense et on ne pouvait plus distinguer les avenues convergentes. Il n’y avait que le vaste espace que trouaient par endroits le clignotement falot des réverbères, et l’arc de pierre monumental se perdant dans la brume. Il semblait soutenir un ciel mélancolique et protéger la flamme pâle et solitaire sur la dalle du Soldat inconnu, qui paraissait, dans la nuit et le silence, être le dernier tombeau de l’humanité.
    Ils traversèrent le terre-plein. Ravic marchait vite et il était trop las pour réfléchir. Il entendit le pas souple et régulier de la femme qui le suivait silencieusement, la tête baissée, les mains enfoncées dans les poches de son imperméable. Soudain, dans la solitude tardive de la place, il lui sembla qu’elle lui appartenait depuis un instant, bien qu’il ne sût rien d’elle, ou peut-être à cause de cette raison même. Il la sentait comme lui, étrangère à tout ce qui les entourait, et cette impression les rapprochait plus que n’eussent pu le faire les paroles ou le temps.
    Ravic habitait un petit hôtel près de l’avenue de Wagram, derrière la place des Ternes. C’était une maison délabrée dont seule l’enseigne suspendue à l’entrée, Hôtel International, était neuve.
    Il sonna.
    « Y a-t-il une chambre de libre ? demanda-t-il au gardien qui ouvrait la porte, l’air ensommeillé.
    –  Le concierge n’est pas là.
    –  Qu’est-ce que ça peut faire ? Je vous demande s’il y a une chambre. »
    L’homme haussa les épaules. Il voyait que Ravic était accompagné et ne comprenait pas pourquoi il désirait une chambre supplémentaire. D’après son expérience, ce n’était pas sans raison qu’on ramenait une femme avec soi.
    « La patronne dort. Elle me mettra à la porte si je la réveille, dit-il en se grattant vigoureusement.
    –  Bien, dans ce cas nous nous arrangerons. »
    Ravic lui donna un pourboire, prit sa clef et monta, suivi de la femme. Avant d’ouvrir, il examina la porte voisine. Pas de chaussures devant. Il frappa à deux reprises. N’obtenant aucune réponse, il tourna la poignée avec précaution. La porte était fermée à clef.
    « Cette chambre était libre hier, murmura-t-il. Essayons par l’autre côté. La patronne a dû la fermer de crainte que les punaises ne s’échappent. »
    Il entra dans sa chambre et indiqua à la femme un canapé de reps rouge.
    « Asseyez-vous une minute. Je reviens tout de suite. »
    Il ouvrit la porte-fenêtre donnant sur un étroit balcon de fer forgé, enjamba le treillis métallique, et se trouva sur le balcon voisin. Il essaya d’ouvrir, mais n’y parvint pas. Il revint, résigné.
    « Rien à faire, pas moyen de trouver une autre chambre. »
    La femme s’était assise sur un coin du canapé. Elle demanda :
    « Puis-je rester ici un moment ? »
    Ravic vit le visage décomposé par la fatigue. Elle semblait incapable de se relever.
    « Vous pouvez dormir ici, c’est le plus simple. »
    La femme ne paraissait pas l’entendre. Elle secouait doucement la tête d’un geste d’automate.
    « Vous auriez dû me laisser dans la rue. Maintenant… je crois que je ne pourrais pas…
    –  Je le crains. Restez ici et dormez. C’est tout ce que vous avez de mieux à faire. Demain, nous verrons.
    –  Je ne voudrais pas vous…
    –  Ma foi, dit Ravic, vous ne me dérangez pas le moins du monde. Ce n’est pas la première fois que quelqu’un passe la nuit ici, faute de savoir où aller. Vous êtes

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