L’armée du roi de France
SaintLouis attend son frère,Charles d’Anjou, devenu roi de Sicile en 1265, qui est censé le rejoindre. Il fait chaud. Une épidémie cause des ravages dans l’armée. Tour à tour, le légat Raoul deGrosparmi,Jean Tristan, l’un des fils du roi, puis leroi lui-même succombent à la maladie. Le 25 août, alors que son frère vient de rendre son dernier souffle,Charles d’Anjou débarque enfin. Le nouveau roi de France,Philippe III, est malade également. Il revient à son oncle de prendre la tête de toute l’armée.
Charlesd’Anjou n’a pas l’intention de s’attarder. Quelques combats ponctuels tournent à l’avantage des croisés. L’honneur est sauf, il faut partir. Conclu à l’automne, un traité globalement favorable aux croisés leur permet un rembarquement en bon ordre, opéré à la mi-novembre, en direction de la Sicile, distante seulement de quelques dizaines de kilomètres. Dans le port de Trapani, une tempête détruit l’essentiel de la flotte assemblée à grands frais par Saint Louis. S’ils en ont encore le projet, les croisés ne peuvent plus prendre le chemin de la Terre sainte. Le retour en France est la seule solution – sans doute la perspective n’est-elle pas pour déplaire aux survivants. L’armée croisée traverse la Sicile, passe le détroit de Messine et se retrouve en Calabre. Le malheur continue à s’acharner sur le nouveau roi.Philippe III a perdu son père et un de ses frères en Tunisie. Près de Cosenza, sa femme enceinte fait une chute de cheval et décède le 28 janvier 1271. Après une longue remontée de l’Italie,Philippe III passe les Alpes puis le Rhône. En mai, après avoir fait étape à Lyon, alors ville d’Empire, il est de retour dans son royaume. Le 15 août, il est sacré à Reims.
L’ost de Foix (1272)
Quelques jours plus tard,Philippe reçoit la nouvelle de la mort de son oncle, Alphonse dePoitiers, le 21 août 1271 5 . Resté en Sicile après le fiasco de la croisade de Tunis, dans l’espoir de repartir pour la Terre sainte,Alphonse ne laisse pas d’enfants. Ses domaines sont vastes. De son frère SaintLouis, il a reçu le comté de Poitiers, conformément aux dispositions prises par leur pèreLouis VIII. Par ailleurs, son mariage lui a permis de succéder à son beau-père, le comte de ToulouseRaymond VII.Philippe n’entend pas laisser échapper cet énorme héritage. Il fait aussitôt « mettre en sa main », selon la formule médiévale, les domaines de son oncle que ses officiers se chargent désormais d’administrer en son nom.
Au cours d’une longue tournée, village par village, les représentants du roi font prêter serment aux nobles, aux ecclésiastiques et aux communautés du comté de Toulouse. Mais le lien demeure encore précaire, presque abstrait. L’occasion se présente bientôt de faire sentir au Midi tout le poids de l’autorité royale. Depuis longtemps, Gérard deCazaubon, seigneur de Sompuy, etGéraud, comte d’Armagnac, se détestent. Vers la fin de 1271 ou le début de 1272, dans un accrochage un peu plus violent que les autres, le frère du comte d’Armagnac est tué. Le comte veut exercer sa vengeance. Il sollicite ses parents, ses alliés, parmi lesquels se trouve le comte de Foix,Roger-Bernard III. Gérard deCazaubon prend peur. Il se place sous la sauvegarde du roi de France en se déclarant prêt à accepter le jugement que rendra ce dernier. Le représentant du roi dans la région, lesénéchal de Toulouse, saisit aussitôt l’occasion qui lui est donnée de manifester concrètement la mainmise royale. Il appose les panonceaux aux fleurs de lys sur le château et les terres de Gérard deCazaubon. En théorie, la protection royale constitue une sauvegarde absolue. S’attaquer à des terres marquées des fleurs de lys, c’est s’attaquer au roi. Pour autant, les comtes d’Armagnac et deFoix n’hésitent pas à mettre le siège devant le château de leur adversaire. Dans les combats, il y a des morts, des hommes de Gérard deCazaubon mais aussi, semble-t-il, des serviteurs du roi. L’affaire devient très grave : c’est en somme un crime de lèse-majesté.
Philippe III décide de châtier en personne cet outrage. Sans attendre la date qu’il a fixée pour la convocation de ses vassaux, à Tours, le 8 mai 1272, il prend la direction du Midi. Il est à La Rochelle quand le comte d’Armagnac vient prudemment faire sa soumission. Le Parlement le condamnera plus tard à une
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