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Le Fils de Pardaillan

Titel: Le Fils de Pardaillan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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l’attitude de la jeune fille, il y avait une telle irradiation d’amour dans sa gorge, le blasphème ne fut pas proféré. Mais, furieux de ne pas oser, il grinça :
    – Le roi vous attend, madame !
    – Je sais… Et c’est pour vous que je fais attendre un roi… Et cependant vous voulez mourir !… Or, écoutez, ceci est un secret de honte qu’il faut pourtant que je vous fasse connaître, à vous… Le roi… Je ne l’ai vu qu’une fois, de loin… Je ne lui ai jamais parlé, je ne le connais pas, il ne s’est jamais occupé de moi… et pourtant c’est mon père !
    Il n’y avait pas à se tromper à cet accent de sincérité. Jehan ne douta pas. Tout de suite, il fut convaincu. Comme si cet aveu, qui semblait coûter à la jeune fille, l’eût assommé, il tomba rudement à genoux, et joignant les mains, il implora :
    – Pardon !… Oh ! pardon !
    Elle laissa tomber sur le malheureux qui sanglotait à ses pieds un regard rempli de mansuétude, et sans faire un geste, très pâle, avec la même douceur, elle reprit :
    – Vous, tuer mon père ! Vous !… Etait-ce possible ? Pouvais-je laisser faire cela ?…
    Il râla, toujours prosterné :
    – La malédiction est sur moi !… Ecrasez-moi…
    Elle secoua doucement sa tête charmante, et se penchant sur lui, dans un souffle, elle acheva :
    – Maintenant que vous connaissez le honteux secret de ma naissance, il me reste ceci à vous dire : moi aussi, j’ai cru… peut-être me suis-je trompée…
    Elle était, maintenant toute rose, adorable en son pudique émoi. Et cette fois, l’orgueil et la jalousie furent balayés, emportés comme fétus par le souffle puissant de l’amour. Cette fois, il comprit à demi-mot et ivre de joie, après avoir failli devenir fou de rage et de douleur, il bégaya :
    – Achevez !…
    Et elle, l’innocente, qui ignorait ce qu’était l’amour, elle qui n’avait fait que suivre jusque-là les impulsions de son cœur, sans se demander si c’était l’amour qui la poussait, oubliant qu’elle ne le connaissait pas, que c’était la première fois qu’elle lui parlait, elle comprit que ce jeune inconnu, que depuis des semaines et des semaines elle guettait de loin à sa fenêtre, dont elle admirait la fière prestance, la démarche souple et assurée quand il passait en se redressant sous son balcon, elle comprit qu’il avait accaparé son cœur. Elle eut la soudaine, la foudroyante intuition que s’il mourait, elle n’avait plus qu’à mourir elle-même. Et très simplement, avec une superbe sincérité, une adorable franchise, ignorante de toute hypocrisie, elle dit ce qu’elle pensait :
    – Je ne sais pas… Je ne peux pas vous dire… Mais je sens que si vous mourez maintenant… je mourrai aussi !
    Et toute blanche, droite et le front redressé, jugeant qu’elle n’avait rien à ajouter, elle franchit les trois marches, rentra chez elle et ferma doucement la porte.
    q

Chapitre 5
    P uissances du ciel  ! rugit l’amoureux, elle m’aime !… Est-ce possible ?… Ai-je bien entendu ?… Quoi, ce regard si pur s’est abaissé sur moi ?… Est-ce un rêve ou une réalité ?…
    Une joie inouïe le soulevait, le transportait. Il se redressa flamboyant, la main sur la poignée de sa longue rapière, et ses yeux étincelants semblaient défier tout l’univers.
    Alors, il s’aperçut que le chevalier de Pardaillan était encore là. Il ne s’aperçut pas que le chevalier le regardait sans le voir, un sourire de mélancolie sur les lèvres. Sans doute cette scène à laquelle il venait d’assister venait d’évoquer en lui des souvenirs à la fois terribles et très doux, car il paraissait violemment ému. Il ne se demanda pas pourquoi il était resté, ce qu’il attendait. Il oublia qu’il s’était pris de querelle avec cet inconnu le jour même, il oublia qu’il avait voulu le tuer l’instant d’avant et qu’il devait se battre avec lui le lendemain. Il ne comprit qu’une chose, c’est que cet homme avait tout vu, tout entendu. Ce n’était plus un inconnu, ce n’était plus un ennemi, c’était, momentanément du moins, un ami. C’était le témoin à qui il allait pouvoir parler d’elle. Et radieux, il s’écria :
    – Vous avez entendu, n’est-ce pas ?… Je n’ai pas rêvé ? Elle a dit : « Si vous mourez, je mourrai aussi ! » Elle l’a bien dit, n’est-ce pas ?
    Pardaillan tressaillit violemment, comme quelqu’un qu’on ramène

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