Le Glaive Et Les Amours

que
nous y avions laissés avaient bien pris soin de notre logis.
    J’avais laissé en mon hôtel parisien un tiers de mes
soldats, et d’eux je n’avais rien à craindre : Hörner les avait triés sur
le volet avant de me les louer. C’étaient de bons Allemands, solides et
disciplinés, et qui veilleraient sur mon hôtel comme sur une église. Il est vrai
que mon escorte, de ce fait, était un peu maigrelette pour me présenter à la
Cour, qui séjournait alors à Vincennes, où Mazarin agonisait, si gravement
atteint qu’on attendait sa mort d’une minute à l’autre. Louis allait le voir
deux fois par jour, mais ne demeurait que deux ou trois minutes, les médecins
craignant la contagion. Le pauvre Mazarin mourut le neuf mars 1661, et à peine
eut-il expiré que nos pimpreneaux de cour s’interrogeaient sur la personne qui
allait lui succéder comme premier ministre.
    Ils n’eurent pas à attendre longtemps. Le lendemain de la
mort de Mazarin, Louis convoqua dans la chambre de la reine-mère – où se
tenaient à l’ordinaire les Conseils – les princes, les ducs et les ministres
d’État, et dévoila son dessein.
    — Messieurs, dit-il, j’ai pris la résolution de
commander moi-même mon État en ne me reposant que sur mes propres soins. Je
n’aurai donc pas de premier ministre. Cependant, j’aurai besoin de vos bons
avis, et je ne manquerai pas de les quérir de vous.
    Là-dessus, après un courtois salut, il baisa les belles
mains de la reine-mère, et se retira, plongeant les princes, les ducs et les
ministres d’État dans un profond silence, lequel fut rompu par la reine-mère
qui, levant ses belles mains au ciel, demanda :
    — Messieurs, pouvez-vous m’expliquer, de grâce, ce que
cela veut dire ?
    Un grand silence suivit, et comme personne n’osait mot
piper, je pris sur moi de répondre à la reine.
    — Majesté, dis-je, cela veut dire qu’après la mort de
Mazarin il n’y aura plus de premier ministre. Le roi, pour citer ses propres
paroles, « tiendra seul le timon ».
     
    FIN
     
    ----
    [1] Homosexuels.
    [2] À
voix basse (lat.).
    [3] Les Autrichiens.
    [4] Ce petit pays, qui provoqua tant de
guerres, se situait au nord de l’Italie. Les Espagnols et les Impériaux
voulaient le conquérir et le garder en tant que passage facile pour les
Espagnols, établis en Italie, qui désiraient rejoindre leurs alliés autrichiens.
    [5] Massif montagneux de Savoie.
    [6] Surintendant des finances.
    [7] Espionne.
    [8] Jeu de mots (ital.).
    [9] « Le
seuil lumineux de l’amitié » est une expression de saint Augustin qui,
dans ses Confessions, se reproche de l’avoir parfois franchi en ses
vertes années.
    [10] Armée (esp.).
    [11] Le lecteur constatera ici que le véritable créateur de la TVA fut
Louis XIII.
    [12] L’expression s’est masculinisée depuis en croc-en-jambe dont la consonance est,
en effet, plus brutale.
    [13] Il y avait dans l’armée royale de ce temps des régiments de piqueurs et des
régiments de mousquetaires. On ne mélangeait pas les deux armes.
    [14] Un des longuissimes et des plus célèbres sièges du siècle. La reddition de
Breda à l’Espagnol a fait l’objet d’un saisissant tableau de Velasquez.
    [15] Les châteaux campagnards du roi n’étaient pas meublés, et on ne les aménageait
que la veille de l’arrivée du roi.
    [16] Jugement plus que médiocre dans la pratique. Expérience de la vie quasiment
nulle. Prudence dans la gestion des affaires insuffisante (lat.).
    [17] La Suède, la Hollande et les princes
luthériens d’Allemagne.
    [18] « Êtes-vous attiré par ces énormités ? »
    [19] Méninges.
    [20] S’écrit aujourd’hui Le Pecq.
    [21] Le méchant sexe (ital.).
    [22] Croyez-en Fogacer, expert en la matière (lat.).
    [23] La Hollande était protestante.
    [24] Ah, duc ! Vous êtes un très bel
homme ! (all.).
    [25] La mauvaise foi (lat.).
    [26] Cinq-Mars était grand écuyer du roi.
    [27] La compétence.
    [28] Bagages.
    [29] Cinq-Mars.
    [30] Inexact. Il fut exécuté après Cinq-Mars. (Note
de l’auteur.)
    [31] Au XVII e  siècle, « le domestique » désigne l’ensemble
des domestiques.
    [32] Mourant.
    [33] Fogacer
avait fait ses études de médecine à l’École de Montpellier qui était alors la
meilleure d’Europe, probablement parce que, passant outre à l’opposition
formelle de l’Église qui interdisait la dissection des cadavres, elle y était
pratiquée en catimini.
    [34] Petite toupie pour