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L'épopée d'amour

Titel: L'épopée d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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qui, combinés heureusement, produiraient l’accident en question.
    – Mais c’est tout ce qu’il faut ! Nous ne sommes pas exigeants… Et l’arquebuse que le ciel chargerait de sauver l’Eglise et le roi serait la bienvenue…
    – En ce cas, que Votre Majesté cesse de craindre. Je n’ai qu’un mot à dire à cet ami.
    – Voyons. Comment s’y prendrait cet ami ?
    – Mais de la façon la plus simple et la plus scandaleuse. Il attendrait au détour de quelque rue M. l’amiral qui tous les jours quitte le Louvre à la même heure et suit le même chemin pour se rendre à son hôtel… et tenez, madame, je vois d’ici l’endroit… Votre Majesté connaît-elle le révérend Villemur ?
    – Le chanoine de Saint-Germain-l’Auxerrois ?
    – C’est cela. Eh bien, ce digne chanoine, qui est des amis les plus zélés de l’Eglise, demeure justement dans le cloître Saint-Germain-l’Auxerrois, que M. l’amiral traverse tous les jours pour gagner la rue de Béthisy. Il loge dans une fort belle maison, cet excellent Villemur. Et il se trouve que les fenêtres de son logis sont grillées au rez-de-chaussée d’un assez fort treillis, en sorte que, de la rue, il est impossible de voir ce qui se passe à l’intérieur de la maison.
    – Très bien ! Très bien…
    – Supposons donc que mon ami va demander l’hospitalité au chanoine, et qu’il se place près de la fenêtre, son arquebuse à la main. Il joue avec cette arquebuse. Tout à coup la balle part et va frapper M. l’amiral qui passe juste à ce moment. L’amiral tombe mort, accident fâcheux dont nul n’est responsable, et que Votre Majesté est la première à déplorer. Je crois bien, madame, que ceci vaut la tuile ou la fièvre.
    – Certes ! Et si un tel accident arrivait, votre ami serait royalement récompensé. Voyons, il n’est pas sans désirer quelque chose, votre ami.
    – S’il s’agissait de moi, je répondrais que ma plus belle récompense serait la satisfaction d’avoir servi ma reine.
    – Oui, mais tout le monde n’a pas votre désintéressement, mon bon monsieur de Maurevert.
    – Ce n’est que trop vrai, madame. Je crois donc que l’ami dont je vous parle et qui est d’une adresse extraordinaire à l’arquebuse pourrait bien se montrer maladroit si j’étais là pour assurer un paiement raisonnable. Mais que Votre Majesté ne s’en inquiète pas : je possède une cinquantaine de mille livres, et avec cette faible somme, je le déciderai.
    Catherine eut un haut-le-corps. Mais se remettant aussitôt, elle attira à elle une feuille de papier et y traça quelques mots.
    – Monsieur de Maurevert, dit-elle, je ne souffrirai pas un tel sacrifice. Gardez vos cinquante mille livres. Quant à votre ami, voici pour lui un bon de vingt-cinq mille livres sur le trésor.
    Maurevert lut le papier, le plia et l’emporta.
    – Le reste… après l’accident, dit Catherine. Vous voyez que je ne marchande pas quand il s’agit de récompenser vos amis, mais j’espère qu’il m’en sera tenu compte… Prévenez aussi votre ami que j’aurai besoin de lui…
    – Contre qui, madame ?…
    – Je vais vous le dire. Mais il ne s’agit plus là ni du roi ni de l’Eglise. Il s’agit…
    Catherine, se déchargeant de cette souriante simplicité dont elle s’était couverte pour parler des affaires de l’Etat, laissa la haine éclater sur son visage qui parut alors reprendre son expression la plus naturelle – comme un autre visage fût naturellement revenu à une expression humaine : il y avait du fauve chez cette femme. Et ses traits ne semblaient en harmonie avec sa conscience que lorsqu’ils s’imprégnaient de cruauté.
    Tout cuirassé qu’il fût contre les impressions violentes, le bravo ne put s’empêcher de frémir.
    – Il s’agit, poursuivit la reine, de deux hommes qui m’ont mortellement offensée. Sans eux, ou du moins sans l’un d’eux, nous n’en serions pas où nous sommes. Il n’y aurait plus d’armée huguenote. Il n’y aurait pas de fiançailles royales ce soir dans le Louvre. Grâce à cet homme, un vaste plan laborieusement échafaudé s’est écroulé. En sauvant Jeanne d’Albret, il nous a menacés, mes fils et moi, d’une ruine que toutes mes ressources pourront à peine conjurer. Mais ce n’est pas tout. Ce misérable se mêle de protéger quelqu’un qui est, dans ma vie, un obstacle terrible. Ce n’est pas tout. Par deux fois, il m’a bafouée. Lui et son père, je les hais,

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