Les émeraudes Du Prophète
la véritable Hilary Dawson…
— Et ma tante Arabella, c’est la reine Victoria ? émit Mac Intyre en dardant sur elle son œil rond. Je reconnais que c’était commode de prendre son identité parce qu’elle ne bouge jamais de son musée où elle s’occupe des porcelaines ni de sa petite maison de Kensington où elle élève une douzaine de chats. C’est aussi la personne la plus timide et la plus effacée qui soit. Elle ne sort jamais et ne voit presque personne. Elle serait bien surprise d’apprendre qu’une aventurière mène une vie intense sous son nom à travers le monde.
— En ce cas, miss, veuillez me dire qui vous êtes ? demanda Harding à la jeune femme…
— La reine de Saba ! fit celle-ci en haussant les épaules. Comme elle, j’apporte des trésors lorsque je viens visiter la Palestine. N’est-ce pas, mon cher Percy ?
Pour la première fois celui-ci semblait désorienté. Aldo se demanda s’il avait vraiment cru à la fausse identité de sa maîtresse ou s’il s’apprêtait à interpréter un rôle.
— Je ne sais pas, murmura-t-il en passant sur son front une main tremblante. Comment aurais-je pu savoir que vous n’étiez pas celle que vous prétendiez être ? Je n’ai pas mis les pieds au British Muséum depuis près de trente ans.
— Mais, intervint Morosini qui commençait à pencher pour la thèse de la comédie, vous acceptiez qu’elle vous apporte le produit de ses vols ? Et ne dites pas que ce n’est pas vous qui l’avez lancée sur nos traces tandis que nous recherchions les « sorts sacrés »…
— Je les cherche depuis si longtemps !…
— Kypros aussi les cherchait. Votre fille assassinée par votre ami Khaled et ses fils ! Peut-être en votre nom puisque apparemment vous n’avez pas réclamé leurs têtes à la Justice !
— Non ! Ne dites pas cela ! J’aimais Kypros mais… Khaled et ses fils sont comme le vent du désert : capables de se volatiliser aux quatre horizons sans laisser de traces… Je sais qu’ils sont avides et cruels mais…
— … mais tant que vous les payiez bien, ils vous servaient en conséquence ? Seulement c’est à ces gens-là que votre amie « Hilary » a remis Lisa, ma femme ? Alors si vous voulez que je vous crois, faites-lui dire où ils l’ont emmenée. Sinon, au cas où il lui arriverait malheur, je vous en tiendrais responsable et, sur l’honneur de mon nom, je jure que je vous tuerais !
— Un peu de calme, sir ! coupa Harding. Ce ne sont pas des propos à tenir devant moi !
— Si vous saviez ce que ça m’est égal ! Si je ne retrouve pas Lisa vivante, je n’aurai plus aucune raison de vivre, sinon la vengeance !
Le vieil homme regarda Morosini au fond des yeux, puis se tourna vers la jeune femme qui se tenait debout non loin de lui :
— Dites-lui où elle est, Hilary ! Sa mort ne vous servirait à rien. Je suis navré de ce qui vous arrive car vous allez être arrêtée mais je veillerai à ce que vous ayez le meilleur des avocats…
Brusquement les yeux de la jeune femme lancèrent des éclairs de colère :
— Vous en aurez besoin vous-même ! Croyez-vous que si l’on me traduit en justice je me tairai ? Je n’ai tué personne, moi, puisque j’ai toujours agi sur vos ordres et mes mains sont nettes de sang mais maintenant que tout se découvre vous jouez les Ponce Pilate ! Vous lavez les vôtres en me laissant tout sur le dos ? Eh bien, je refuse !
— Que vous refusiez ou non, hurla Aldo hors de lui, je n’en ai rien à faire. Je veux savoir où est mon épouse !
Abandonnant soudain toute morgue, Hilary considéra cet homme visiblement à bout de nerfs avec quelque chose qui ressemblait à de la sympathie :
— Je n’en sais rien ! soupira-t-elle. Et je vous supplie de me croire. Les fils de Khaled devaient la conduire en lieu sûr jusqu’à ce que j’aie quitté le pays. Sir Percy devait le leur faire savoir. Mais les ordres étaient de ne pas lui faire de mal…
— Ne pas lui faire de mal ? fit Aldo amèrement. Vous ignorez sans doute comment ces hommes ont tué Kypros, la Nabatéenne, qui était cependant la fille de leur patron ?
La jeune femme n’eut pas le temps de répondre Conscient de ce que ses gardiens suivaient le débat avec un vif intérêt, Ézéchiel venait de bondir sur la terrasse et, prenant appui de ses mains cependant menottées, sautait dans le jardin…
— Courez après lui, bande d’imbéciles ! hurla le
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