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Les joyaux de la sorcière

Les joyaux de la sorcière

Titel: Les joyaux de la sorcière Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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Empire. Celle-là l’avait été pour l’une de ces belles « Lionnes », reines de la fête parisienne, dont s’était épris un oncle de Madame de Sommières. Il l’avait épousée, à l’horreur générale de la famille mais pour son plus grand bonheur car la fortune c’était elle qui l’avait alors que le jeu et les chevaux avaient ruiné ce bel homme dont elle était devenue folle. Et le couple avait vécu paisiblement, honni par la bonne société mais dans une félicité qui ne s’était jamais démentie, malheureusement sans qu’aucun enfant enfin vînt la sanctionner. Aussi, devenue veuve, la baronne de Faucherolles avait-elle institué sa légataire universelle la jeune Amélie, sa nièce par alliance rencontrée un jour au hasard d’une promenade. D’où scandale dans la famille ! Mais Amélie déjà mariée au marquis de Sommières avait trouvé amusant, avec la bénédiction de son époux, de garder, après avoir fait don de l’argent aux œuvres charitables, la maison sur le parc où elle s’était retirée lors du mariage de son fils en lui laissant l’entière disposition de l’hôtel familial du Faubourg Saint-Germain. Depuis elle y vivait en toute liberté avec ses vieux serviteurs et une cousine, beaucoup plus jeune, qui lui servait de dame de compagnie, de lectrice, de confidente, d’esclave et même on aurait pu dire d’âme damnée si Marie-Angéline du Plan-Crépin n’avait été aussi pieuse personne. Entre deux voyages, elles y menaient une vie fort agréable, mêlée souvent pour leur plus grand plaisir – et parfois leur plus grande angoisse ! – aux affaires tumultueuses du prince-antiquaire qui mettaient dans leur existence une sacrée dose de piment.
    Pour sa part, Aldo Morosini adorait en bloc – en dépit de la foisonnante surcharge de passementeries, glands, pompons, galons, poufs, tapis, tentures dont l’avait dotée sa constructrice ! – la demeure et ses habitantes.
    — Ces dames sont là ? lança-t-il à Cyprien, le vieux maître d’hôtel qui le débarrassait de son chapeau et de ses gants. Je ne suis pas en retard j’espère ?
    — Non, Madame la princesse n’est pas encore rentrée…
    — Ce qui veut dire qu’elle est sortie ?
    — Euh… oui. Quelques achats, je crois…
    Pour toute réponse, Aldo se mit à rire. Bien qu’elle ne soit pas dépensière par nature – naissance suisse oblige ! – Lisa sa femme aimait Paris presque autant que Venise, son grand amour cependant avant même qu’elle n’eût rencontré son époux… Deux fois l’an, elle y venait pour les collections des grands couturiers mais aussi pour les petites boutiques, les galeries d’art, les ateliers de peintres et les salles des ventes car elle s’y connaissait en antiquités presque aussi bien qu’un mari dont elle avait été la secrétaire pendant deux ans (3) . Elle était douée, comme disait Aldo, d’un « flair de chien de chasse » et il n’était pas exceptionnel qu’elle lui apporte des objets dignes des salles d’exposition du palais Morosini à Venise où se ruaient collectionneurs et amateurs de choses anciennes venus du monde entier.
    Sachant bien où trouver « ces dames » à cette heure de la journée, Aldo piqua droit sur le jardin d’hiver, une grosse bulle de vitraux japonisants consacrés par l’artiste à la cueillette et au parcours du thé reliant le jardin proprement dit à la maison. Y régnait un agréable fouillis de lauriers-roses, de bambous, de rhododendrons, de yuccas, de palmiers et des inévitables aspidistras au milieu desquels Madame de Sommières aimait à se tenir beaucoup plus souvent que dans les salons jugés par elle assommants… Tandis qu’Aldo les arpentait l’écho d’une voix mécontente lui parvint sans l’émouvoir : la marquise et « Plan-Crépin » adoraient ces joutes oratoires qui les opposaient sur les sujets les plus divers allant du choix d’une lecture aux divagations de la politique européenne en passant par les dernières nouvelles apportées par le courrier sans compter les potins récoltés le matin à la première messe à Saint-Augustin dont Marie-Angéline était l’un des plus solides piliers. Sa « patronne » pour sa part, d’humeur quelque peu voltairienne, bornait ses relations avec le Seigneur à la messe de onze heures le dimanche où elle se rendait toujours sous grand pavois comme il convenait à une noble dame rendant visite à un voisin plus titré

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