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Les joyaux de la sorcière

Les joyaux de la sorcière

Titel: Les joyaux de la sorcière Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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eût à peu près le même âge – la quarantaine largement dépassée – il offrait avec son visiteur un contraste frappant. Grand, mince et désinvolte dans son costume prince-de-Galles coupé à Londres, ses épais cheveux bruns touchés d’argent seyaient à merveille à sa peau bronzée tendue sur une ossature arrogante, à son sourire indolent et à ses yeux volontiers moqueurs d’un bleu clair tirant sur le vert dans les moments de colère. Ce qui n’était pas si rare : en bon Vénitien, Aldo Morosini avait le sang chaud et l’oreille chatouilleuse.
    Après un temps de silence contemplatif, il répondit à la question que son hôte lui posait par une autre question, selon une habitude qui lui était venue avec le temps en s’avisant qu’elle lui permettait de prolonger sa réflexion :
    — Si j’ai bien compris ce que m’a dit Mademoiselle du Plan-Crépin, cette dame était votre tante ?
    Le chef de bureau étira ses lèvres comme s’il venait d’avaler une potion amère.
    — Oui. La baronne d’Ostel, née Olympia Cavalcanti. Elle chantait jadis au théâtre San Carlo de Naples quand mon oncle s’est amouraché d’elle et l’a épousée. Naturellement elle n’a pas demandé mieux : une théâtreuse !…
    Morosini fronça le sourcil. Le nom ne lui était pas inconnu. Amateur passionné d’opéras comme l’avait été sa mère, il se souvenait d’avoir entendu celle-ci le prononcer.
    — Chez nous on ne traite pas une prima donna de théâtreuse, rectifia-t-il sèchement. Si j’ai bonne mémoire la Cavalcanti a mis fin assez tôt à une belle carrière ? Elle a dû aimer votre oncle.
    — Il était très riche, vous savez et si j’admets qu’il était plutôt bien de sa personne, elle n’aurait pas tout laissé tomber pour lui s’il n’y avait eu sa fortune. On peut dire qu’ils ont mené la grande vie. Ils ont beaucoup voyagé : deux ou trois fois le tour du monde et je ne sais combien de séjours en Italie, en Amérique, n’habitant pas souvent leur appartement de Paris et encore moins leur château en Périgord. Dont ils se sont défaits d’ailleurs et cela a hâté la mort de mon père. Il n’était que le cadet, lui, et devait travailler pour nourrir sa famille tandis que l’oncle Grégoire et sa gueuse fréquentaient les palaces et les casinos, lança Dostel avec une expression de haine quasi palpable.
    — Votre oncle est mort depuis longtemps ?
    — Trois ans et naturellement, elle a hérité ce qui restait de la fortune. Moi je n’ai eu droit à rien et je n’ai jamais revu cette femme depuis les funérailles au Père-Lachaise où il y avait peu de monde. Tout ce que j’en ai su est qu’elle vivait quasiment cloîtrée dans son appartement de la rue de la Faisanderie avec deux domestiques. Dont elle a fait les légataires de ce qu’elle laissait et que je n’aurais jamais pu évaluer mais j’y arriverai bien car je compte attaquer le testament…
    — Pourquoi ? Je croyais qu’elle vous avait légué…
    — Son portrait… et aussi ses bijoux !
    Morosini ne cacha pas sa stupeur :
    — Et vous vous plaignez ? Peste ! Que vous faut-il de plus ? En dehors du tableau signé Boldini qui vaut très cher, les joyaux, que je n’identifie pas à première vue mais qui ne me sont pas inconnus, représentent une grosse fortune : ils ne peuvent provenir que d’une cassette royale et la croix par exemple étant sans doute d’un travail florentin, je pencherais pour les Médicis…
    Evrard Dostel eut un rire aussi déplaisant que son haussement d’épaules.
    — Les Médicis ? Vous me donnez à rire, mon bon Monsieur ! Voulez-vous que je vous montre ce que m’a remis le notaire ?
    — Faites-le donc ! émit Morosini qui sentait la moutarde lui monter au nez. Le « bon Monsieur » ne passait pas.
    Le laissant en tête à tête avec l’ancienne diva dont le regard lui laissait supposer à présent qu’elle avait bien pu jouer un tour quelconque à son « neveu », celui-ci s’éclipsa mais revint un instant plus tard avec un coffret grand comme une boîte à chaussures – joli au demeurant avec sa marqueterie de bois des îles et d’ivoire ! – qu’il posa sur un guéridon en pitchpin supportant un petit vase bleu où trempaient quelques jonquilles, l’ouvrit et en sortit quatre bijoux : un bracelet à trois rangs et une « chute » de perles d’un bel orient mais de taille moyenne, une bague où un cercle de brillants

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