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L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

Titel: L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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elle était mieux surveillée et donc moins pillée.
    — « Ansa n’avait jamais vécu dans une roulotte. Son père, un tsigane, avait épousé une citoyenne allemande et à la naissance d’Ansa, ils s’étaient installés dans une petite maison avec jardin. Le père d’Ansa était électricien dans le bâtiment. À vingt ans, Ansa avait épousé le fils – citoyen allemand – de leur voisin le boulanger. Ils avaient vécu heureux jusqu’à la guerre. Le mari d’Ansa avait commencé à livrer le pain avec une bicyclette puis ils avaient acheté une camionnette. Ils eurent deux petites filles.
    — « Mon mari était soldat. Un bon soldat. Il est venu deux fois en permission. Nous avons fait de longues promenades dans les champs. La dernière fois il y avait des coquelicots et je lui ai tressé un collier de paille. Un mois après on est venu m’apporter ses papiers et un peu d’argent. Il avait été tué en Russie. Il était enterré là-bas. Il était mort officier. Il était lieutenant.
    — « Un matin, il y a un peu plus d’un an, des civils sont venus à la maison. Ils avaient des revolvers. Ils criaient. Ils riaient.
    — « Alors, gitane, on se cache avec la marmaille. Tu vas voir. » J’ai pu emporter des vêtements pour les petites. En prison il y avait d’autres tsiganes. J’avais gardé les papiers de mon mari sous ma jupe. Plusieurs fois j’ai dit aux gardiens – « Je suis allemande, mon mari est officier. Il est mort en Russie, il a été décoré. » Ils riaient toujours. Personne ne m’écoutait. Puis un jour, nous étions certainement plus de cent, on nous a embarqués pour Auschwitz où ils avaient rassemblé les tsiganes dans un coin du camp. Des hommes, à l’arrivée, nous ont rassurés. « Il ne vous arrivera rien. N’écoutez pas les mensonges. Ici vous serez bien. » Et ils ont donné du lait et de la bouillie de maïs à tous les enfants. Les enfants du camp ont chanté pour nous. Ils ont même réussi à entraîner quelques femmes de ma prison dans une danse. Les hommes applaudissaient. On nous a donné des couvertures, un tapis. Le lendemain je savais déjà toutes les histoires du crématoire, des convois, des chambres à gaz camouflées en douches, lorsque deux tsiganes sont venus me voir. Ils se sont assis sur le lit et m’ont interrogée. Ils étaient allemands eux aussi. Ils avaient un grand cahier noir et celui qui ne parlait pas a noté sans arrêt. Je leur ai dit : « Je ne veux pas aller au gaz avec mes filles. » Ils ont dit : « Les tsiganes ne vont pas au gaz. Ils seront libérés à la fin de la guerre. Peut-être avant. On leur prépare une ville. Une ville pour eux avec des tramways. » Ils ont inscrit mon nom. J’ai raconté ma vie. Ils ont pris les papiers de mon mari. Après – une semaine je crois, – un officier S.S. a demandé mon numéro. Un garde m’a conduit au bureau. L’officier était debout avec sa casquette et ses gants. Quand je suis rentrée, il m’a saluée militairement. Il y avait les papiers de mon mari sur le bureau. Il m’a dit que j’avais été arrêtée par erreur, que j’avais été dénoncée. Que l’Allemagne était reconnaissante envers ses héros qui étaient morts pour la patrie. Deux autres S.S. sont rentrés. Des officiers. L’un d’eux m’a expliqué aussi que c’était une erreur. Que je n’étais pas une tsigane comme les autres puisque mon mari était mort pour l’Allemagne. Que j’allais être bientôt libérée et que je retrouverai les parents de mon mari. Mais il fallait avant que l’on vérifie à l’hôpital que je pouvais avoir d’autres enfants. J’ai dit que je ne voulais pas avoir d’autres enfants parce que mon mari était mort. Le plus grand avait préparé plusieurs papiers. Il m’a dit : « Vous resterez une semaine à l’hôpital. Ce n’est pas dangereux. Après vous ne pourrez plus avoir d’enfants. Et vous serez libre. » J’ai été obligée de signer les papiers. On m’a fait monter dans une voiture. J’ai demandé à voir mes filles. Le grand S.S. m’a répondu que des femmes avaient été désignées pour s’occuper d’elles. On m’a mis dans une grande salle où il y avait des jeunes et des vieilles, surtout des juives et seulement quelques tsiganes. Ça sentait la mort. J’avais peur. Une infirmière m’a expliqué comment se passerait la stérilisation. J’ai pleuré. Je ne voulais plus. J’ai crié. On m’a battue. Je me suis

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