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[Napoléon 2] Le soleil d'Austerlitz

[Napoléon 2] Le soleil d'Austerlitz

Titel: [Napoléon 2] Le soleil d'Austerlitz Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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hommes de troupe, musique militaire et immense tambour-major jonglant avec sa canne, cavalerie, précèdent la voiture des consuls tirée par six chevaux blancs, cadeau de l’empereur d’Autriche lors de la signature de la paix de Campoformio.
    Napoléon est vêtu d’un costume rouge brodé d’or.
    Tout au long du trajet par les quais jusqu’aux guichets du Louvre, la foule est immense. Elle crie : « Vive Bonaparte ! » Sur la place du Carrousel, les troupes sont alignées. Napoléon monte à cheval, les passe en revue.
    Il lève la tête. Il lit sur l’un des corps de garde construits sous la Révolution :
    Le 10 août 1792, la royauté en France est abolie et ne se relèvera jamais .
    Il fait un signe pour que commence le défilé et, quand passent devant lui les demi-brigades dont les drapeaux sont lacérés, il se découvre longuement. La foule, agglutinée jusque sur les toits, l’acclame.
    Puis il entre dans le château des Tuileries.
    Il monte au premier étage. C’est là qu’il a décidé de s’installer, dans les anciens appartements de Louis XVI et de sa famille. Joséphine est au rez-de-chaussée.
    Il parcourt les pièces avec Roederer. Elles sont immenses et sinistres.
    — Général, cela est triste, dit Roederer.
    — Oui, comme la gloire.
    Napoléon tourne le dos, s’isole. Une nouvelle fois le vide. Il entre dans la chambre de Joséphine, et il a un éclair de gaieté en la voyant debout au pied du lit.
    — Allons, petite créole, lui lance-t-il, couchez-vous dans le lit de vos maîtres.
    Mais Joséphine ne sourit pas. Elle veut parler. Il l’en empêche. Il n’a que faire de ses craintes devant le souvenir des rois, il ne veut pas entendre ses pressentiments.
    Il est ici aux Tuileries, lui qui a, le 10 août 1792, traversé ces salles pleines d’une populace en furie.
    Il y a moins de huit ans de cela.
     
    Le lendemain, tôt, il parcourt la galerie de Diane où il a fait placer les bustes des grands hommes qu’il admire le plus, de Démosthène à Brutus, de César à Washington, de Frédéric II à Mirabeau. Il marche à pas lents, s’arrêtant devant chaque visage.
    Il évoque le cortège de la veille, les folles acclamations de la foule quand il s’est découvert devant les drapeaux.
    — La joie du peuple était vraie, dit-il à Bourrienne qui l’accompagne. Et d’ailleurs, consultez le grand thermomètre de l’opinion, voyez le cours des rentes : à onze francs le 17 brumaire, et aujourd’hui à vingt et un francs ! Avec cela, je puis laisser caqueter les jacobins. Mais qu’ils ne parlent pas trop haut.
    Il revient sur ses pas, s’immobilise devant le buste d’Alexandre puis celui d’Hannibal, et à nouveau devant celui de César.
    — Bourrienne, dit-il, ce n’est pas tout que d’être aux Tuileries ; il faut y rester.
    Il regarde vers la place du Carrousel. Il aperçoit l’inscription qui célèbre le 10 août.
    — Qui est-ce qui n’a pas habité ce palais ? murmure-t-il. Des brigands, des conventionnels.
    Il tend le bras. C’est de là, à la fenêtre de la maison du frère de Bourrienne, qu’il a vu assiéger les Tuileries, puis capituler Louis XVI.
    Il lance :
    — Qu’ils y viennent !

3.
    Napoléon aime le milieu de la nuit. Le temps semble s’y dilater. Dans le silence et l’obscurité qui environnent ses appartements, il a l’impression que la main qui depuis l’aube le serre relâche son étreinte.
    Il entre dans le bain, il s’allonge. Son mamelouk place de nouvelles bûches dans le feu. Il a besoin de cette chaleur. Il doit toujours, dans la journée, chasser cette sensation de froid qui pénètre en lui. Quand il sort, il croise frileusement sur sa poitrine les deux revers de sa redingote de drap gris.
    Peut-être est-ce sa maigreur qui l’empêche de lutter contre le froid. Ce matin, il claquait des dents dans son cabinet alors qu’on commençait à lui lire les articles des journaux anglais et allemands. Les français lui importent peu. Parfois il dicte lui-même les articles !
    Il a arrêté un instant le secrétaire et, tourné vers Bourrienne, il a lancé :
    — J’ai froid. Vous voyez comme je suis sobre et mince. Eh bien, on ne m’ôterait pas de l’idée qu’à quarante ans je deviendrai gros mangeur et que je prendrai beaucoup d’embonpoint. Je prévois que ma constitution changera et, pourtant, je fais assez d’exercice. Mais, que voulez-vous ? c’est un pressentiment, cela ne peut manquer

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