Odyssée
Troiens.
Reviens après avoir sauvé les nefs, et laisse-les combattre dans la plaine.
qu'il vous plaise, ô Père Zeus, ô Athènè, ô Apollôn, que nul d'entre les Troiens et les Akhaiens n'évite la mort, et que, seuls, nous survivions tous deux et renversions les murailles sacrées d'Ilios !
Et ils se parlaient ainsi. Mais Aias ne suffisait plus au combat, tant il était accablé de traits. Et l'esprit de Zeus et les Troiens illustres l'emportaient sur lui ; et son casque splendide, dont les aigrettes étaient rompues par les coups, sonnait autour de ses tempes, et son épaule fatiguée ne pouvait plus soutenir le poids du bouclier. Et cependant, malgré la nuée des traits, ils ne pouvaient l'ébranler, bien que respirant à peine, inondé
de la sueur de tous ses membres, et haletant sous des maux multipliés.
Et Hektôr frappa de sa grande épée la lance de frêne d'Aias, et il la coupa là o˘ la pointe se joignait au bois ; et le Télamônien Aias n'agita plus dans sa main qu'une lance mutilée, car la pointe d'airain, en tombant, sonna contre terre. Et Aias, dans son coeur irréprochable, reconnut avec horreur l'oeuvre des Dieux, et vit que Zeus qui tonne dans les hauteurs, domptant son courage, donnait la victoire aux Troiens. Et il se retira loin des traits, et les Troiens jetèrent le feu infatigable sur la nef rapide, et la flamme inextinguible enveloppa aussitôt la poupe, et Akhilleus, frappant ses cuisses, dit à Patroklos :
- H‚te-toi, divin Patroklos ! Je vois le feu ardent sur les nefs. Si elles br˚lent, nous ne pourrons plus songer au retour. Revêts promptement mes armes, et j'assemblerai mon peuple.
Il parla ainsi, et Patroklos se couvrit de l'airain splendide. Il attacha de belles knèmides à ses jambes avec des agrafes d'argent ; il mit sur sa poitrine la cuirasse étincelante, aux mille reflets, du rapide Akhilleus, et il suspendit à ses épaules l'épée d'airain aux clous d'argent. Puis, il prit le grand et solide bouclier, et il posa sur sa noble tête le casque magnifique à la terrible aigrette de crins, et de ses mains il saisit de fortes piques ; mais il laissa la lance lourde, immense et solide, de l'irréprochable Aiakide, la lance Pèliade que Kheirôn avait apportée à son père bien-aimé des cimes du Pèlios, afin d'être la mort des héros. Et Patroklos ordonna à Automédôn, qu'il honorait le plus après Akhilleus, et qui lui était le plus fidèle dans le combat, d'atteler les chevaux au char.
Et c'est pourquoi Automédôn soumit au joug les chevaux rapides, Xanthos et Balios, qui, tous deux, volaient comme le vent, et que la Harpye Podargè
avait conçus de Zéphyros, lorsqu'elle paissait dans une prairie aux bords du fleuve Okéanos. Et Automédôn lia au-delà du timon l'irréprochable Pèdasos qu'Akhilleus avait amené de la ville saccagée de étiôn. Et Pèdasos, bien que mortel, suivait les chevaux immortels.
Et Akhilleus arrnait les Myrmidones sous leurs tentes. De même que des loups mangeurs de chair crue et pleins d'une grande force qui, dévorant un grand cerf rameux qu'ils ont tué sur les montagnes, vont en troupe, la gueule rouge de sang et vomissant le sang, laper de leurs langues légères les eaux de la source noire, tandis que leur ventre s'enfle et que leur coeur est toujours intrépide ; de même les chefs des Myrmidones se pressaient autour du brave compagnon du rapide Aiakide. Et, au milieu d'eux, le belliqueux Akhilleus excitait les porteurs de boucliers et les chevaux.
Et Akhilleus cher à Zeus avait conduit à Troiè cinquante nefs rapides, et cinquante guerriers étaient assis sur les bancs de rameurs de chacune, et cinq chefs les commandaient sous ses ordres.
Et le premier chef était Ménesthios à la cuirasse étincelante, aux mille reflets, fils du fleuve Sperkhios qui tombait de Zeus. Et la belle Polydorè, fille de Pèleus, femme mortelle épouse d'un Dieu, l'avait conçu de l'infatigable Sperkhios ; mais Bôros, fils de Périèreus, l'ayant épousée en la dotant richement, passait pour être le père de Ménesthios.
Et le deuxième chef était le brave Eudôros, conçu en secret, et qu'avait enfanté la belle Polymèlè, habile dans les danses, fille de Phylas. Et le tueur d'Argos l'aima, l'ayant vue dans un choeur de la tumultueuse Artémis à l'arc d'or. Et l'illustre Herrnès, montant aussitôt dans les combles de la demeure, coucha secrètement avec elle, et elle lui donna un fils illustre, l'agile et brave Eudôros.
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