Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome I.
pleine déroute, et demain ou après nous serons dans vos murs. En attendant, quelles que soient les circonstances, ne vous rendez qu'à la dernière extrémité. La brèche faite, montrez la plus grande fermeté.
Salut, estime et gloire.
BONAPARTE.
Au quartier-général à Castiglione, le 19 thermidor an 4 (6 août 1796).
Au directoire exécutif.
Citoyens directeurs,
Les événemens militaires se sont succédés avec une telle rapidité depuis le 11, qu'il m'a été impossible de vous en rendre compte plus tôt.
Depuis plusieurs jours, les vingt mille hommes de renfort que l'armée autrichienne du Rhin avait envoyés à l'armée d'Italie étaient arrivés ; ce qui, joint à un nombre considérable de recrues et à un grand nombre de bataillons venus de l'intérieur de l'Autriche, rendait cette armée extrêmement redoutable : l'opinion générale était que bientôt les Autrichiens seraient dans Milan.
Le 11, à trois heures du matin, la division du général Masséna est attaquée par des forces nombreuses ; elle est obligée de céder l'intéressant poste de la Corona, au même instant une division de quinze mille Autrichiens surprend la division du général Soret à Salo, et s'empare de ce poste important.
Le général de brigade Guieux, avec six cents hommes de la quinzième demi-brigade d'infanterie légère, se renferme dans une grande maison de Salo, et là brave tous les efforts de l'ennemi qui le cernait de tous côtés. Le général de brigade Rusca a été blessé.
Tandis qu'une partie de cette division cernait le général Guieux à Salo, une autre partie descendit sur Brescia, surprit les factionnaires qui s'y trouvaient, fit prisonnières quatre compagnies que j'y avais laissées, quatre-vingts hommes du vingt-cinquième régiment de chasseurs, deux généraux et quelques officiers supérieurs qui étaient restés malades.
La division du général Soret, qui aurait dû couvrir Brescia, fit sa retraite sur Dezenzano.
Dans cette circonstance difficile, percé par une armée nombreuse que ces avantages devaient nécessairement enhardir, je sentis qu'il fallait adopter un plan vaste.
L'ennemi, en descendant du Tyrol par Brescia et l'Adige, me mettait au milieu. Si l'armée républicaine était trop faible pour faire face aux divisions de l'ennemi, elle pouvait battre chacune d'elles séparément, et par ma position je me trouvais entre elles. Il m'était donc possible, en rétrogradant rapidement, d'envelopper la division ennemie descendue de Brescia, la prendre prisonnière et la battre complètement, et de là revenir sur le Mincio attaquer Wurmser et l'obliger à repasser dans le Tyrol ; mais pour exécuter ce projet, il fallait dans vingt-quatre heures lever le siège de Mantoue, qui était sur le point d'être pris, car il n'y avait pas moyen de retarder six heures. Il fallait, pour l'exécution de ce projet, repasser sur-le-champ le Mincio, et ne pas donner le temps aux divisions ennemies de m'envelopper. La fortune a souri à ce projet, et le combat de Dezenzano, les deux combats de Salo, la bataille de Lonado, celle de Castiglione en sont les résultats.
Le 12 au soir, toutes les divisions se mirent en marche sur Brescia ; cependant la division autrichienne qui s'était emparée de Brescia était déjà arrivée à Lonado.
Le 13, j'ordonnai au général Soret de se rendre à Salo pour délivrer le général Guieux, et au général Dallemagne, d'attaquer et de reprendre Lonado, à quelque prix que ce fût. Soret réussit complètement à délivrer le général Guieux, à Salo, après avoir battu l'ennemi, lui avoir pris deux drapeaux, deux pièces de canon et deux cents prisonniers.
Le général Guieux et les troupes sous ses ordres sont restés quarante-huit heures sans pain et se battant toujours contre les ennemis.
Le général Dallemagne n'eut pas le temps d'attaquer les ennemis, il fut attaqué lui-même. Un combat opiniâtre, longtemps indécis, s'engagea ; mais j'étais tranquille, la brave trente-deuxième demi-brigade était là. En effet, l'ennemi fut complètement battu ; il laissa six cents morts sur le champ de bataille et six cents prisonniers.
Le 14 à midi, Augereau entra dans Brescia : nous y trouvâmes tous nos magasins, que l'ennemi n'avait pas encore eu le temps de prendre, et les malades qu'il n'avait pas eu le temps d'évacuer.
Le 15, la division du général Augereau retourna à Monte-Chiaro, Masséna prit position à Lonado et à Ponte-San-Marco. J'avais laissé
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