Oeuvres de Napoléon Bonaparte, TOME III.
proclamé la volonté du peuple.
Le système d'éligibilité n'a pu résister au creuset de l'expérience et à la force de l'opinion publique.
L'organisation du sénat était incomplète.
La justice nationale était disséminée dans des tribunaux sans harmonie, sans dépendance mutuelle : point d'autorité qui les protégeât, ou qui pût les réformer ; point de liens qui les assujettissent à une discipline commune.
Il manquait à la France un pouvoir que réclamait la justice même, celui de faire grâce. Combien de fois, depuis douze ans, il avait été invoqué. Combien de malheureux avaient succombé victimes d'une inflexibilité que les sages reprochaient à nos lois ! Combien de coupables qu'une funeste indulgence avait acquittés, parce que les peines étaient trop sévères.
Un sénatus-consulte a rendu au peuple l'exercice des droits que l'assemblée constituante avaient reconnus, mais il les lui a rendus environnés de précautions qui le défendent de l'erreur ou de la précipitation de son choix ; qui assurent le respect des propriétés et l'ascendant des lumières.
Que les premières magistratures viennent à vaquer, les devoirs et la marche du sénat sont tracés ; des formes certaines garantissent la sagesse et la liberté de son choix, et la souveraineté de ce choix ne laisse ni à l'ambition le moyen de conspirer, ni à l'anarchie le moyen de détruire.
Le ciment du temps consolidera chaque jour cette institution tutélaire. Elle sera le terme de toutes les inquiétudes et le but de toutes les espérances, comme elle est la plus belle des récompenses promises aux services et aux vertus publiques.
La justice embrasse d'une chaîne commune tous tes tribunaux ; ils ont leur subordination et leur censure ; toujours libres dans l'exercice de leurs fonctions, toujours indépendans du pouvoir, et jamais indépendans des lois.
Le droit de faire grâce quand l'intérêt de la république l'exige, ou quand les circonstances commandent l'indulgence, est remis aux mains du premier magistrat ; mais il ne lui est remis que sous la garde de la justice même ; il ne l'exerce que sous les yeux d'un conseil, et après avoir consulté les organes les plus sévères de la loi.
Si les institutions doivent être jugées par leurs effets, jamais institution n'eut un résultat plus important que ce sénatus-consulte organique. C'est à compter de ce moment que le peuple français s'est confié à sa destinée, que les propriétés ont repris leur valeur première, que se sont multipliées les longues spéculations ; jusque-là tout semblait flotter encore. On aimait le présent, on doutait du lendemain, et les ennemis de la patrie nourrissaient toujours des espérances. Depuis cette époque il ne leur reste que de l'impuissance et de la haine.
L'île d'Elbe avait été cédée à la France ; elle lui donnait un peuple doux, industrieux, deux ports superbes, une mine féconde et précieuse ; mais séparée de la France, elle ne pouvait être intimement attachée à aucun de ses départemens ; ni soumise aux règles d'une administration commune. On a fait fléchir les principes sous la nécessité des circonstances ; on a établi pour l'île d'Elbe des exceptions que commandaient sa position et l'intérêt public.
L'abdication du souverain, le voeu du peuple, la nécessité des choses, avaient mis le Piémont au pouvoir de la France. Au milieu des nations qui l'environnent avec les élémens qui composaient sa population, le Piémont ne pouvait supporter ni le poids de sa propre indépendance, ni les dépenses d'une monarchie.
Réuni à la France, il jouira de sa sécurité et de sa grandeur ; les citoyens laborieux, éclairés, développeront leur industrie et leurs talens dans le sein des arts et de la paix.
Dans l'intérieur de la France, règne le calme et la sécurité. La vigilance des magistrats, une justice sévère, une gendarmerie fortement constituée et dirigée par un chef qui a vieilli dans la carrière de l'honneur, ont imprimé partout la terreur aux brigands.
L'intérêt particulier s'est élevé jusqu'au sentiment de l'intérêt public. Les citoyens ont osé attaquer ceux qu'autrefois ils redoutaient, lors même, qu'ils étaient enchaînés au pied des tribunaux. Des communes entières se sont armées et les ont détruits. L'étranger envie la sûreté de nos routes et cette force publique, qui souvent invisible, mais toujours présente, veille sur son pays et le protége sans qu'il
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