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Vie de Benjamin Franklin, écrite par lui-même - Tome II

Vie de Benjamin Franklin, écrite par lui-même - Tome II

Titel: Vie de Benjamin Franklin, écrite par lui-même - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benjamin Franklin
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belle comme une feuille de papier blanc, que rien n'a encore souillé : l'homme heureux que le destin favorise, peut y écrire son nom et la prendre pour sa peine.
Encore une comparaison : je n'en veux plus faire qu'une. L'homme sage, qui méprise les petitesses, et dont les pensées, les actions, les maximes sont à lui, et n'ont pour principe que les sentimens de son cœur, cet homme, dis-je, est le papier-vélin, qui de tous les papiers est le plus beau, le meilleur, le plus précieux.

CONTE.
    Jacques Montresor étoit un brave officier, point bigot mais très-honnête homme. Il tomba malade. Le curé de sa paroisse croyant qu'il alloit mourir, courut chez lui, et lui conseilla de faire sa paix avec Dieu, afin d'être reçu en paradis.
«Je ne suis pas inquiet sur cela, lui dit Montresor ; car j'ai eu, la nuit dernière, une vision, qui m'a tout-à-fait tranquillisé».—Et qu'est-ce que cette vision, demanda le bon curé ?—«J'étois, répliqua Montresor, à la porte du paradis, avec une foule de gens, qui vouloient entrer. Saint-Pierre leur demanda de quelle religion ils étoient.—Je suis catholique romain, répondit l'un.—Eh bien ! entrez et prenez votre place parmi les catholiques, lui dit Saint-Pierre.—Un autre cria qu'il étoit de l'église anglicane.—Placez-vous avec les anglicans, répondit le Saint.—Moi je suis quaker, dit gravement un troisième.—Entrez où sont les quakers, fut la réponse de l'apôtre.—Enfin, il me demanda quelle étoit ma religion.—Hélas ! lui répondis-je, le pauvre Jacques Montresor n'en a malheureusement aucune.—C'est dommage, dit Saint-Pierre. Je ne sais où vous placer : mais entrez toujours ; vous vous mettrez où vous pourrez [Voici une imitation heureuse, que le citoyen Parny a faite de ce joli conte de Franklin.
Abandonnant la terrestre demeure,
Un jour, dit-on, six hommes vertueux,
Morts à-la-fois, vinrent à la même heure,
Se présenter à la porte des cieux.
L'Ange paroît, demande à chacun d'eux
Quel est son culte ; et le premier s'approche,
Disant :—«Tu vois un bon Mahométan».
l'Ange.
Entre mon cher, et tournant vers ta gauche,
Tu trouveras le quartier Musulman.
    le Second.
Moi, je suis Juif.
l'Ange.
Entre, et cherche une place
Parmi les Juifs. Toi, qui fait la grimace
À cet Hébreu, qu'es-tu ?
le Troisième.
Luthérien.
l'Ange.
Soit ; entre et va, sans t'étonner de rien,
T'asseoir au temple où s'assemblent tes frères.
le Quatrième.
Quaker.
l'Ange.
Eh bien, entre, et garde ton chapeau.
Dans ce bosquet les Quakers sédentaires
Forment un club ; on y fume.
le Quaker.
Bravo.
le Cinquième.
J'ai le bonneur d'être bon catholique,
Et comme tel, je suis un peu surpris
De voir un Juif, un Turc, en paradis.
l'Ange.
Entre, et rejoins les tiens sous ce portique.
Venons à toi ; quelle religion
As-tu suivie ?
le Sixième.
Aucune.
l'Ange.
Aucune ?
le Sixième.
Non.
l'Ange.
Mais cependant quelle fut ta croyance ?
le Sixième.
L'ame immortelle, un Dieu qui récompense,
Et qui punit ; rien de plus.
    l'Ange.
En ce cas,
Entre, et choisis ta place où tu voudras.]».

FRAGMENT DE LA SUITE DES MÉMOIRES DE FRANKLIN
    [Ce morceau qui se rapporte à l'année 1730 ou 1731, et fait suite à ce que Franklin a écrit des Mémoires de sa Vie, a été tiré, à Philadelphie, d'un manuscrit prêté au citoyen Delessert. Ce dernier, qui l'a déjà fait insérer dans la Décade, a bien voulu permettre qu'il reparût ici.]
Ce fut vers ce temps que je formai le hardi et difficile projet de parvenir à la perfection morale. Je désirois de passer ma vie sans commettre aucune faute dans aucun moment ; je voulois me rendre maître de tout ce qui pouvoit m'y entraîner : la pente naturelle, la société, ou l'usage. Comme je connoissois, ou croyois connoître, le bien et le mal, je ne voyois pas pourquoi je ne pouvois pas toujours faire l'un et éviter l'autre ; mais je m'apperçus bientôt que j'avois entrepris une tâche plus difficile que je ne l'avois d'abord imaginé. Pendant que j'appliquois mon attention, et que je mettais mes soins à me préserver d'une faute, je tombois souvent, sans m'en appercevoir, dans une autre : l'habitude se prévaloit de mon inattention, ou bien le penchant étoit trop fort pour ma raison.
Je conclus à la fin que quoiqu'on fût spéculativement persuadé qu'il est de notre intérêt d'être complétement vertueux, cette conviction étoit insuffisante pour prévenir nos faux pas ; qu'il falloit rompre les habitudes

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