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Amours, Délices Et Orgues

Amours, Délices Et Orgues

Titel: Amours, Délices Et Orgues
Autoren: Alphonse Allais
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assez pittoresques et qui me semblent mériter l’honneur d’une courte relation.
    Nous nous trouvions, hier, M. Tristan Bernard et moi, dans un cabinet particulier, en compagnie de deux sociétaires de la Comédie-Française dont le nom n’ajouterait aucune saveur à ce récit.
    La conversation affectait un tour folâtre à la fois et sagace, selon que la parole était à l’un ou à l’autre de nous quatre.
    On vint à causer de l’Odéon :
    – Moi, dit Bernard, si j’étais directeur de l’Odéon, voici ce que je ferais…
    Et il nous développa le plus ingénieux des programmes.
    La grande concurrence à l’Odéon, c’est le café-concert et la brasserie.
    Plutôt que d’être parqués tout un soir en un strict fauteuil, les jeunes gens préfèrent fumer et boire bien à leur aise, même au risque d’entendre de déplorables littératures mises en musique par d’anciens concierges.
    M. Bernard proposait alors de lutter contre les brasseries et cafés à musique avec leurs propres armes, c’est-à-dire de transformer l’Odéon – ses dimensions le lui permettent – en un vaste hall où les spectateurs circuleraient aisément, pourraient fumer et boire.
    La modification de l’Odéon ne porterait pas seulement sur ces détails matériels.
    Le répertoire classique subirait quelques transformations, surtout des coupures, énormément de coupures.
    Les morceaux supprimés seraient remplacés par une musique gaie, dansante et vivace.
    Ne négligeons pas de rajeunir l’interprétation : Jeanne Bloch proférerait à merveille les Imprécations de Camille et Sulbac ne serait-il pas le Polyeucte idéal ?
    M. Tristan Bernard en était au développement de son programme, quand un garçon du Restaurant pénétra dans notre cabinet.
    – Messieurs, fit-il, pardon de vous déranger, mais il y a dans la petite salle à côté un monsieur qui voudrait vous causer.
    – … Qui désirerait causer avec nous, rectifia l’une de nos compagnes.
    – Qu’il entre ! fit Bernard redressant sa haute taille dans sa correcte redingote et passant sa main sur son visage glabre.
    Le noble étranger, vous l’avez deviné, c’était Henry Roujon.
    Il s’excusa très aimablement de son indiscrétion, mais les cloisons de ce restaurant se composant exclusivement de pelures d’ognon, il n’avait pu faire autrement que d’entendre notre conversation.
    – Votre programme, ajouta-t-il, mon cher monsieur Bernard, me botte comme un gant (sic). Voulez-vous prendre la direction de l’Odéon ?
    – À une condition, exigea Bernard, que vous prendrez vous-même un verre de chartreuse.
    – Volontiers.
    Un quart d’heure après la tenue de ces propos, nous étions tous à la direction des Beaux-Arts.
    M. Adrien Bernheim, fort obligeamment, alla lui-même quérir du papier timbré au bureau de tabac du coin de la rue, et les signatures s’échangèrent avec une simplicité quasi biblique.
    Ajoutons que le début de la direction Bernard sera pour une reprise d’ Horace de notre vieux Corneille.
    La pièce, retapée au goût du moment, sera jouée avec le concours de la troupe Price, sous le titre :
    THE O’RACE BROTHERS
     
    L’ANNÉE DIPLOMATIQUE
    À A. Saissy.
    À la fin de chaque année – c’est une coutume qui m’a toujours réussi – je jette les yeux en arrière et m’arrête à la contemplation des événements diplomatiques accomplis au cours de ces douze mois écoulés.
    Hélas ! aujourd’hui, le spectacle n’est pas des plus réjouissants : partout, on n’entend parler que de malheurs !
    Pour ne causer que de notre continent, croyez-vous que l’état de l’Europe soit bien agréable ?
    De quelque côté que vous jetiez les regards, mille points noirs surgissent à l’horizon européen.
    Si vous connaissez un peuple qui soit content de son sort, vous seriez bien aimable de me l’indiquer ; moi, je n’en connais pas.
    Et dire que tout ce malaise provient uniquement de malentendus !
    Il y a quelques années, le capitaine Cap, alors mon ami, proposa, pour en finir avec cette double et véritable question des Balkans et des Dardanelles, proposa, dis-je, de f… les Balkans dans les Dardanelles.
    C’était l’avis d’un sage.
    Inutile d’ajouter que les diplomates ne daignèrent même point examiner cette solution, pourtant si ingénieuse.
    En général, les diplomates sont ennemis de la paix, parce que leurs parents sont officiers et conséquemment intéressés à la guerre, la
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