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Borgia

Titel: Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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siècle. La tête était expressive, empreinte d’un caractère de résolution hautaine, avec des yeux noirs et durs, un front que barrait le trait touffu des sourcils, une bouche ironique, et un air d’incroyable audace, de violente obstination.
    Mais ce que ce portrait pouvait dégager de dureté, presque de cruauté, s’adoucissait, s’estompait, fondu dans le rayonnement de la jeunesse. La Maga le regardait avec une expression d’infinie douleur.
    – Ô mon amour, ma jeunesse ! murmura-t-elle. Où êtes-vous ?… Là, dans ce coffret que je n’ai pas osé ouvrir depuis dix ans… depuis sa dernière visite…
    Brusquement, elle tomba sur ses genoux et éclata en sanglots… sa bouche frémissante collée sur la bouche froide de la miniature…
    – Mère !… Vous pleurez donc encore ?
    Une voix d’une incomparable pureté, d’une ineffable tendresse venait de prononcer ces quelques mots. La Maga se releva d’un bond, referma précipitamment le coffret, le tiroir, le bahut et se retourna vers une porte qui donnait sur une pièce voisine.
    – Où êtes-vous, mère ? reprit la voix. Je vous ai entendue…
    La Maga alluma une torche. Et, dans l’encadrement de la porte, apparut une jeune fille d’environ seize ans.
    Ce n’était pas une vierge. Elle était la virginité même.
    Lorsque la torche fut allumée, la jeune fille, à peine vêtue, les pieds nus, s’avança vers la vieille, jeta autour du cou flétri ses bras d’une éclatante blancheur et laissa reposer sa tête sur la poitrine décharnée.
    – Rosita !… mon unique consolation ! fit la Maga.
    – Comme votre cœur bat vite, pauvre mère Rosa…
    Celle à qui la vieille Maga venait de donner le nom de Rosita {4} leva les yeux vers la sorcière. Et il y avait un monde de tendresse dans ses yeux.
    – Vous pleuriez, mère Rosa, reprit-elle… Vous avez un grand chagrin, et vous ne voulez pas me le dire… à moi, votre fille ?
    La sorcière frissonna.
    – Ma fille !… Oui, ma fille… ma seule fille !… Et, sourdement, en elle-même, elle ajouta :
    – Que « l’autre » soit maudite pour avoir achevé de briser mon cœur de mère… comme « lui » avait brisé… mon cœur d’amante !…
    Elle continua :
    – C’est vrai, ma Rosita : j’ai un grand chagrin… un chagrin qui me tue lentement. Mais ce chagrin, je ne dois pas te le dire parce qu’il faudrait, enfant, te raconter ma vie !… Et te raconter ma vie, à moi, ce serait jeter sur ta candeur un voile impur, ce serait ternir ta joie et ton innocence, comprends-tu ?
    – Je ne comprends qu’une chose, ma mère, c’est que je vous aime de tout mon cœur et que je souffre de vous voir souffrir, et que je voudrais connaître vos douleurs pour les partager… pour vous consoler…
    – Ah ! ma Rosita, ta présence seule est une consolation infinie… Une seule de tes caresses suffit à me faire oublier pour un moment le mal terrible qui ronge mon âme… Tiens, vois, je ne pleure plus… Et puisque te voilà éveillée, causons un peu… J’ai des choses à te dire… Depuis longtemps, j’hésitais… le moment est venu…
    Le jour se levait et envahissait le taudis, Rosita s’était assise. La Maga éteignit la torche de résine.
    – Quelles choses voulez-vous me dire, ma mère ?
    – Hélas ! Que ne suis-je vraiment ta mère !
    Un nuage de tristesse passa sur le front de la jeune fille.
    – Vous l’êtes ! reprit-elle. Vous êtes ma seule mère… puisque la vraie… m’a… abandonnée…
    – Oui ! Abandonnée… Et c’est de cela que je veux te causer, mon enfant.
    – À quoi bon, mère Rosa !… Pourquoi éveiller ces souvenirs ?…
    – Il le faut, ma fille… Mais, dis-moi, dois-tu aller aujourd’hui à l’atelier de Raphaël ?…
    À ce nom, Rosita eut une exclamation de joie. Son visage s’éclaira.
    – Tu l’aimes donc bien ?…
    – Oui, mère Rosa ! Je l’aime de toute mon âme, comme il m’aime… Il est si beau… si bon… Nous avons fixé la date de notre mariage, mère !… Sauf votre approbation, bien entendu ! Raphaël doit venir demain vous en parler…
    – Chère enfant ! Qu’importent les dates !… Sois heureuse, c’est cela seulement qui m’importe… Mais tu ne m’as pas répondu… Dois-tu le voir aujourd’hui ?
    – Non, mère : il a donné avant-hier le dernier coup de pinceau à cette Vierge si belle… pour laquelle j’ai posé. Et il m’a dit que nous nous

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