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Catherine des grands chemins

Catherine des grands chemins

Titel: Catherine des grands chemins Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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fit aucune objection. Le grand chemin s'ouvrit enfin devant les fuyards.
    On mit les chevaux au pas. La route montait vers le foisonnement noir de la forêt. Tant que l'on ne fut pas sous le couvert des arbres, les cavaliers cheminèrent en silence. Mais, à peine la voûte bruissante des taillis se fut-elle refermée sur eux que Pierre de Brézé leva la main et mit pied à terre.
    — C'est ici que nous nous quittons, dit-il. Vous allez maintenant continuer seuls car nous rentrons au château, Armenga et moi. Il faut que nous soyons aux côtés de la Reine quand elle quittera Amboise.
    Quant à vous...

    — Je sais, coupa Tristan. Nous allons jusqu'au castel de Mesvres, à deux lieues d'ici, où l'on nous attend.
    Malgré l'obscurité qui régnait sous bois, un rayon de lune venu d'un mince croissant de premier quartier plongeait dans le layon où les voyageurs s'étaient engagés. Il permit à Catherine de voir briller les dents de Brézé qui souriait.
    — Je devrais savoir, ami Tristan, que vous n'oubliez jamais rien.
    Je vous confie donc dame Catherine. Vous savez combien elle m'est chère et combien précieuse m'est sa sécurité. Le castel de Mesvres appartient à mon cousin Louis d'Amboise. Vous n'avez rien à craindre. Vous pourrez vous y reposer, vous restaurer et rendre à ces dames des vêtements plus convenables à leur rang...
    Au prix de sa vie Catherine eût été incapable de dire quel sentiment la poussa à s'approcher de Pierre et à demander anxieusement :
    — Où allons-nous ensuite, messire Pierre ? Où nous reverrons-nous ? Je peux aller à Chinon, maintenant ? Je veux voir la fin de La Trémoille.
    Il pencha sur elle sa haute silhouette, ôta le lourd chapeau de fer qui l'écrasait et le jeta dans un fourré.
    — Qu'au moins je voie un peu votre doux visage avant de vous quitter. Bien sûr, vous allez à Chinon, où la reine Yolande doit venir joindre son gendre après votre succès. Vous l'y retrouverez quand tout sera fait. Vous pourriez, bien sûr, aller vers elle à Angers, mais vous devez être lasse. A Chinon, vous vous reposerez. Allez à l'auberge de la Croix du Grand Saint-Mexme, proche le Grand Carroi. Dites que je vous envoie et vous aurez l'aubergiste à vos pieds. Il est bon et fidèle sujet du Roi et, parce qu'il a, jadis, logé la Pucelle, il se ferait brûler tout vif en mémoire d'elle. Recommandez la discrétion à maître Agnelet et vous ne verrez âme qui vive. Votre deuil, d'ailleurs, vous vaudra respect et solitude.
    Il y eut un silence. Si profond que Catherine et Pierre auraient pu entendre battre leurs cœurs... Les autres, par discrétion, s'étaient un peu écartés. Elle leva vers lui un regard lumineux de reconnaissance et lui tendit ses mains qu'il mit genou en terre pour recevoir, comme tout à l'heure, dans la chambre des supplices.
    Merci, mon chevalier, murmura Catherine étranglée par l'émotion.
    Merci pour tout. Comment vous dire tout ce que j'éprouve à cet instant ? Il faudrait tant de mots qui ne me viennent pas.

    — Ma douce dame, seul me mène l'amour de vous... Si vous aviez péri, ma vie s'arrêterait. Ne cherchez pas les mots.
    Il appuya ses lèvres sur les deux mains qu'il serrait. Alors, Catherine se pencha vivement et posa un baiser sur les courts cheveux blonds du jeune homme avant de dégager doucement ses mains.
    — À bientôt, messire. Et Dieu vous garde ! Aidez- moi, sire écuyer. Elle se tournait vers Armenga pour qu'il la remît en selle ; à lui aussi elle dit sa reconnaissance, qu'il accepta avec un sourire courtois. Sara et Tristan se rapprochèrent. Elle leva la main, salua joyeusement Pierre qui, debout dans l'herbe, ne la quittait pas des yeux.
    — Quand nous nous reverrons, je serai redevenue Catherine, lui lança-t-elle joyeusement. Oubliez vite l'Égyptienne ! Aussi vite que je veux l'oublier moi- même ! Encore merci à vous deux !
    Le layon ouvrait un fossé clair entre les falaises noires de la forêt.
    Il semblait mener jusqu'à l'infini. Tristan et Sara sur les talons, Catherine piqua des deux et, au grand galop, s'élança vers l'horizon.
    Le soleil se couchait dans une gloire rutilante qui habillait de pourpre les hautes murailles grises de Chinon et les toits d'ardoises de la ville, solidement ceinturée de remparts qui avaient l'air de jaillir de la Vienne. Sur la rivière incendiée, les barques des bateliers glissaient sans bruit vers les arches noires du vieux pont, sous le cri des martins-pêcheurs et le

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