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Catherine des grands chemins

Catherine des grands chemins

Titel: Catherine des grands chemins Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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rustres, s'y détruire lentement ! Lui, le plus fier de nous tous ?
    — Que pouvais-je faire ? s'écria Catherine tout de suite révoltée.
    J'étais seule contre la garnison ; contre le village... Il fallait qu'il en fût ainsi. Il l'a voulu lui- même. Oubliez-vous que nous n'avions plus rien, plus d'autre asile que ce Carlat que nous vous devions ?
    Bernard d'Armagnac détourna la tête, haussa les épaules, puis jeta sur Catherine un regard incertain.

    — C'est vrai. Pardonnez-moi... mais, Catherine, il ne peut pas rester là. N'est-il pas possible de l'installer dans quelque château écarté, de l'y faire servir par quelques serviteurs dévoués ?
    — Qui oserait se dévouer quand il s'agit de la lèpre ? murmura Catherine, et pourtant, je crois, oui, je crois que ce serait possible.
    Mais où ? Il ne veut pas s'éloigner de Montsalvy.
    — Je trouverai, je vous dirai... Dieu Tout-Puissant ! Je ne puis supporter l'idée de le savoir là où il est.
    Les larmes montèrent aux yeux de Catherine qui, sa joie envolée, balbutia :
    — Et moi ? Croyez-vous que je puisse l'endurer ? Pourtant, voilà des mois qu'elle me torture, cette idée. Si je n'avais un fils, je serais partie avec lui, je ne l'aurais jamais laissé seul. Que m'importait de mourir, même de cet abominable mal, si c'était avec lui ? Mais j'ai Michel... et Arnaud m'a repoussée. J'avais une tâche à accomplir.
    Maintenant, à dire vrai, elle l'est.
    Cadet Bernard la regarda avec une curiosité avide en mordillant ses lèvres minces.
    — Alors, qu'allez-vous faire ?
    Elle n'eut pas le temps de répondre : une haute silhouette vêtue de bleu se dressait auprès d'eux tandis qu'une voix sèche demandait :
    — Feriez-vous pleurer Madame de Montsalvy, seigneur comte ? Il y a des larmes dans son regard.
    — Vous avez de bons yeux, à ce qu'il paraît, rétorqua Bernard avec hauteur, mécontent d'être dérangé. Puis-je vous demander en quoi cela vous regarde ?
    Mais, si l'intrusion de Brézé avait choqué Bernard d'Armagnac, le ton de Bernard parut déplaire souverainement au seigneur angevin.
    — Aucun des amis de dame Catherine n'aime la voir souffrir.
    — Je suis de ses amis plus que vous ne le serez jamais, messire de Brézé, et, ce qui vaut mieux, je suis celui de son époux.
    — Vous étiez, rectifia Brézé. Ignorez-vous que le noble Arnaud de Montsalvy est mort glorieusement ?
    — Votre attitude pleine de sollicitude envers sa ... veuve laisse supposer que cela ne vous chagrine guère. Quant à moi...
    Le ton s'envenimait. Catherine, effrayée par la querelle qu'elle sentait venir, s'interposa :

    — Messeigneurs ! Je vous en prie ! Vous n'allez pas marquer d'une altercation mon retour en grâce ? Que dirait le Roi, que diraient les reines ?
    L'attitude brusquement agressive de Bernard l'étonnait. Mais elle savait depuis longtemps que la vieille rivalité entre seigneurs du Nord et du Midi subsistait. Ces deux-là devaient se détester tandis qu'elle n'était sans doute qu'un prétexte. Les deux hommes se turent, mais le regard qu'ils échangèrent prouvait qu'ils avaient de la mauvaise humeur de reste. Ils s'affrontaient en silence, comme deux coqs de combat. Catherine comprit qu'ils brûlaient d'envie de vider leur querelle, qu'elle ne les retiendrait pas longtemps. Instinctivement, elle chercha du secours autour d'elle, aperçut Tristan l'Hermite qui se tenait modestement dans un coin et lui adressa des yeux un appel muet. Il accourut, souriant, aimable.
    — La reine Yolande vous cherchait, dame Catherine ; vous plaît-il que je vous mène à elle ?
    Hélas, Pierre de Brézé était bien décidé à garder Catherine pour lui.
    Il adressa à Tristan un sourire sec.
    — Je vais la mener moi-même, dit-il vivement.
    Et, en voyant Cadet Bernard ouvrir la bouche, Catherine désolée comprit que tout allait recommencer. Pourtant elle mourait d'envie d'interroger Pierre. Il revenait de Montsalvy, il devait avoir tant de choses à lui dire ! Mais comment s'isoler avec lui sous le regard méfiant de Cadet Bernard qui semblait s'être constitué le défenseur des droits d'Arnaud ? Heureusement, à cet instant précis, les serviteurs du château cornèrent l'eau et, au même moment, le Grand Maître de l'Hôtel du Roi s'approcha de Catherine.
    — Le désir de notre sire est que vous soupiez à sa table, Madame.
    Permettez-moi de vous conduire.
    Un soupir de soulagement dégonfla la poitrine de Catherine. Elle adressa au comte de

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