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Catherine et le temps d'aimer

Catherine et le temps d'aimer

Titel: Catherine et le temps d'aimer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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l'avais espéré de ton apparition auprès de lui, mais j'ai été déçu !
    — Pourtant, il m'était très attaché... Je peux même dire qu'il m'aimait sans jamais oser le montrer.
    — Alors, essaie de réveiller cet amour. Il se peut que le miracle se produise. Mais il se peut aussi qu'il ne vienne jamais. Tu seras, alors, sa mémoire et tu devras tout lui réapprendre de son passé.
    Ces paroles, Catherine se les redisait en pénétrant dans l'étroite pièce qu'une seule chandelle éclairait. Gauthier, assis dans l'embrasure de la fenêtre, regardait la nuit. Ses longues jambes repliées, vêtu d'une sorte de gandoura rayée serrée à la taille par une écharpe, il semblait plus grand que jamais. Il tourna la tête lorsque Catherine entra, offrant à la lumière son visage creusé par la souffrance, mais où les yeux gris avaient retrouvé un regard direct. Très amaigrie, la silhouette du Normand restait impressionnante. Catherine, jadis, lui disait souvent, en riant, qu'il avait l'air d'une machine de siège. Il en restait quelque chose, mais la maladie avait paré d'une sorte de distinction le visage rude aux traits grossiers qui avait retrouvé une jeunesse attendrissante.
    Jusqu'aux énormes mains blanchies, qui paraissaient s'effiler.
    Maintenant qu'il n'était plus couché, la chambre semblait trop petite pour le contenir.
    Il voulut se lever quand la jeune femme s'approcha, mais elle l'en empêcha, posant vivement sa main sur l'épaule osseuse.
    — Non... ne bouge pas ! Tu n'es pas encore couché ?
    — Je n'ai pas envie de dormir. J'étouffe dans cette chambre. Elle est si petite !
    — Tu n'y resteras plus longtemps. Quand tu seras assez fort pour chevaucher, nous partirons...
    — Nous ? Est-ce que vous m'emmènerez avec vous ?
    — Tu m'as toujours suivi, fit Catherine tristement. Cela te paraissait naturel... Est-ce que tu ne veux plus venir avec moi ?
    II ne répondit pas tout de suite et le cœur de Catherine se serra douloureusement. S'il allait refuser ? S'il allait vouloir se chercher un autre destin ? Elle n'était plus rien pour lui, qu'une jolie femme, puisque sa mémoire était morte. Et jamais, jamais elle n'avait eu autant besoin de lui, de sa force, de ce refuge inexpugnable qu'il avait toujours représenté. Entre la souffrance et elle, il y avait eu, depuis si longtemps, la large poitrine de Gauthier ! Ne l'avait-elle retrouvé, arraché à une mort horrible, que pour le perdre plus sûrement ? Elle sentit les larmes piquer ses yeux.
    — Tu ne réponds pas ? murmura-t-elle d'une voix qui s'enrouait.
    — C'est que je ne sais pas. Vous êtes si belle que j'aimerais vous suivre... comme une étoile. Mais si je veux retrouver mon passé il vaut peut-être mieux que je m'en aille seul. Il y a en moi quelque chose qui dit que je dois être seul, que je l'ai toujours été...
    — Non, ce n'est pas vrai ! Depuis trois ans tu ne m'as presque pas quittée. Nous avons souffert ensemble, lutté ensemble, défendu nos vies ensemble, tu m'as sauvée tant de fois ! Comment ferai-je si tu m'abandonnes ?
    Elle se laissa tomber assise sur le pied du lit, accablée sous ce surcroît de peine. Cachant son visage dans ses mains tremblantes, elle murmura douloureusement :
    — Je t'en supplie, Gauthier, ne m'abandonne pas ! Sans toi, je suis perdue... perdue !
    Des larmes amères roulaient entre ses doigts. Elle se sentait affreusement seule, abandonnée de tous. Il y avait le moine, ce cauchemar vivant qui hantait les murs de ce château, il y avait la nostalgie qu'elle éprouvait de son pays, de son enfant, il y avait surtout la furieuse morsure de la jalousie qui la tenaillait chaque fois qu'elle évoquait son époux. Alors, que Gauthier se détournât d'elle, qu'il eût tout oublié du passé, c'était plus qu'elle n'en pouvait endurer... Elle l'entendit qui balbutiait :
    — Ne pleurez pas, dame ; si cela vous cause tant de peine, j'irai avec vous...
    Elle releva vers lui, dans un visage inondé de larmes, des yeux fulgurants de révolte.
    — Cela ressemble à de la pitié, ou de la résignation ! Mais tu m'aimais, jadis ! Tu ne vivais que pour moi, que par moi... Si ta mémoire te fait défaut, ton cœur, du moins, devrait me reconnaître !
    Il se pencha vers elle, scrutant le doux visage humide et implorant.
    — Je voudrais tant me souvenir ! fit-il tristement. Cela ne doit pas être difficile de vous aimer. Vous êtes si belle ! On dirait que vous êtes pétrie avec de la lumière. Vos yeux

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