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Délivrez-nous du mal

Délivrez-nous du mal

Titel: Délivrez-nous du mal Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Romain Sardou
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Dioclétien.
    Gui leva les sourcils.
    — Tu as parcouru toute la ville par ce froid ?
    La jeune fille répondit d’une voix vibrante :
    — On m’a certifié que vous étiez un homme de bien et que vous pouviez tout résoudre. Même si vous aviez demeuré à Viterbe, je serais venue vous trouver !
    Bénédict lui sourit et s’assit en face d’elle.
    — Je t’écoute.
    — Je ne sais par où commencer. J’ai eu beau formuler des phrases dans ma tête, là devant votre porte…
    — J’ai vu. Ne te précipite pas. Commence par le début. Que t’est-il arrivé ?
    Elle prit une longue inspiration.
    — Mon frère a disparu.
    — Ton frère. Son nom ?
    — Rainerio.
    — Quand l’as-tu vu pour la dernière fois ?
    — Cela remonte à cinq jours. Deux hommes se sont présentés chez nous. Nous habitons avec nos parents. Mon frère s’est entretenu seul avec eux. La conversation n’a pas duré. Au bout de quelques instants, il est sorti pour les suivre, me faisant un signe de la main qui se voulait rassurant. Nous ne l’avons pas revu depuis.
    — Cinq jours ?
    La fille acquiesça et ajouta :
    — Notre père et notre mère sont âgés, monsieur, ils sont aujourd’hui un fardeau plus qu’un soutien. C’est mon frère qui subvient à notre boire et à notre manger.
    Elle s’exclama :
    — Jamais il n’oserait s’absenter si longtemps sans nous prévenir ou nous faire porter de ses nouvelles. Il faut qu’un malheur lui soit arrivé !
    — Je vois.
    Bénédict sortit de son écritoire une tablette de cire et un stylet en os.
    — Que fait ton frère pour nourrir sa famille ?
    Zapetta avala une gorgée de lait et dit :
    — Il travaille au palais du Latran.
    À peine eut-il commencé, Bénédict s’arrêta d’écrire. Dans ses enquêtes, il était précautionneux en bien des points pour lui-même, dont celui qui commandait de ne jamais trop s’approcher du Latran et de ses prélats puissants. Les intrigues qui s’y nouaient étaient les plus dangereuses qui soient.
    — Vraiment ? s’étonna-t-il. Et comment le fils d’un ébéniste se trouve-t-il en un lieu si prestigieux ? A-t-il prononcé ses vœux ?
    — Non, Rainerio est un laïque. Mais lorsque nous étions enfants, nous avions pour voisin un vieil homme solitaire qui a pris mon frère en affection et lui a enseigné à lire et à écrire le latin. À seize ans, Rainerio est devenu son secrétaire. Ce monsieur se nommait Otto Cosmas et il venait du royaume de Bohême ; il restait reclus chez lui et travaillait à la rédaction d’un livre qui, selon Rainerio, devait relater la vie des saints. Mon frère assurait que c’était une commande du Latran et que l’ouvrage ferait date. Il était fier d’y participer. Mais le vieux Otto Cosmas est mort avant de l’achever. Mon frère s’est alors mis en tête de le terminer à sa place. Cela lui a pris un an, un an où il s’est privé de tout, s’enfermant dans le réduit dont il avait hérité du Bohémien. Il a remis l’ouvrage complété à ceux-là qui ne l’attendaient plus.
    La sœur sourit :
    — Son travail a suscité tant d’éloges que Rainerio a été recruté sur-le-champ dans l’administration du Latran ! Depuis lors, dès qu’il évoquait l’homme auprès duquel il avait été attaché, il disait : « Monsieur le Promoteur de Justice. » Et parfois il lançait avec fierté : « Ce matin je retourne à la Sacrée Congrégation ! » Nous n’en savions guère plus. Il affirmait qu’il n’avait pas le droit de parler ; que cela pourrait porter préjudice aux affaires qu’il instruisait. Il ramenait désormais l’argent que notre père ne pouvait plus garantir avec son atelier. Nous lui en étions très reconnaissants.
    Bénédict resta un moment silencieux. Il souligna sur sa tablette le nom d’Otto Cosmas.
    Après avoir vidé son bol, la fille demanda :
    — Vous savez, vous, maître Gui, ce que sont cette « Sacrée Congrégation » et ce « Promoteur de Justice » ?
    — Je n’en ai pas la moindre idée !
    — Je croyais que vous aviez réponse à tout ?
    Il sourit d’un air bénin.
    — Je ne peux pas tout connaître à chaque bout de champ ! Mais sois tranquille, ce que je ne sais pas, je ne mets jamais longtemps à le découvrir.
    Il soumit alors Zapetta à une batterie de questions et fixa ses réponses sur sa tablette de cire.
    — Ton frère, depuis quand travaillait-il au Latran ?
    — Presque deux

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