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Douze ans de séjour dans la Haute-Éthiopie

Douze ans de séjour dans la Haute-Éthiopie

Titel: Douze ans de séjour dans la Haute-Éthiopie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arnauld d'Abbadie
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douane. Ce fonctionnaire, ordinairement musulman, était nommé pour trois ans par le Ras, auquel il payait une ferme en échange de la perception des droits de douane.
    La ville avait aussi un Gouverneur qui prenait le titre spécial de Kantiba: il était nommé chaque année par le Ras, et était chargé de la police de toute la ville, de la direction des marchés et de la perception de certains impôts; il recrutait pour ce service une troupe dont le chiffre variait de soixante à trois cents lances.
    Gondar, un des centres commerciaux les plus importants, est également un centre d'industrie. La simplicité des besoins des Éthiopiens ne rend nécessaire qu'un nombre restreint de métiers: des tisserands, tous musulmans, des corroyeurs, des maroquiniers, des lormiers, des forgerons et des fabricants de javelines, de sabres et de couteaux; des selliers, des sandaliers, des relieurs, des clercs, copistes et apprêteurs de diphthère ou parchemin grossier; des gaîniers, et tous ceux qui cousent le cuir; des orfèvres, des fondeurs et ouvriers en cuivre; ceux qui brodent les pretintailles pour les selles des mules ou les amulettes que portent les femmes, les hommes et les chevaux, comme aussi ceux qui brodent en soie de couleur les stoles ou longues chemises des femmes, leurs burnous et ceux des prêtres; des fabricants de boucliers, des charpentiers, des tourneurs, ceux qui mettent en bois les carabines, ceux qui façonnent les cornes à boire, les femmes qui confectionnent des ustensiles de vannerie faite en paille et celles qui font du bouza, de l'hydromel et de l'eau-de-vie pour la vente de détail. La poterie est faite par les femmes félachas ou juives, et leurs maris maçonnent en bousillage; ces sectaires sont établis dans les villages aux environs de la ville. L'industrie de potier est partout frappée d'infamie, ainsi que celle de tisserand, de corroyeur et d'ouvrier en fer. Tous ces ouvriers travaillent chacun pour leur compte, mais avec mesure. Lorsque le désir de voyager les prend, ils vont s'établir dans d'autres villes ou se laissent embaucher par les seigneurs ou les princes et font quelquefois le tour de l'Éthiopie à la suite des armées.
    Le clergé de Gondar fournit toujours quelque célèbre professeur de grammaire, de droit ou de théologie, qui attire les étudiants de provinces éloignées. Ces étudiants se partagent en deux classes: l'une d'hommes de tout âge se destinant à la vie monastique; l'autre, plus nombreuse, composée de jeunes gens aspirant à la prêtrise ou à la cléricature. Ils manifestent envers leurs professeurs cet attachement profond, qui existait dans l'antiquité et le moyen-âge entre les maîtres et leurs élèves ou disciples. Il est touchant de voir les soins pieux dont ils entourent leurs professeurs, qu'ils choisissent librement; l'émulation qu'ils mettent à les servir en toutes choses, et l'on ne peut s'empêcher de regretter que ce culte filial, qui n'est que la reconnaissance envers ceux qui se consacrent à nous enseigner à penser, à croire, à vivre enfin, se soit refroidi parmi nous. Beaucoup de ces étudiants mendient leur subsistance, fabriquent des parasols en roseau et en cœur de jonc, ou bien se louent une partie de la journée pour divers services. Des anachorètes, désireux de s'édifier sur quelque point de dogme, viennent se réfugier pour quelques jours dans les églises les moins fréquentées; en tout temps d'ailleurs, on voit en ville beaucoup de moines mendiants et gyrovagues.
    La ville de Gondar, grâce à sa situation centrale, à la présence des deux plus grands dignitaires de l'Église d'Éthiopie, grâce aux lumières et à la prépondérance de son clergé, à sa vigilance à maintenir son droit d'asile, à ses deux marchés hebdomadaires, à son commerce, à ses diverses industries et enfin à la puissance de la tradition, se maintient, depuis l'abaissement du pouvoir impérial, comme une sorte de terrain neutre où les hommes de tous les partis se rencontrent, et quoique les arbitres de l'état politique n'y résident plus, elle n'en reste pas moins moralement la véritable capitale de l'Éthiopie. La population, que Bruce évaluait à 30,000 âmes, est aujourd'hui de 11 à 13,000; en temps de trouble, cette population s'accroît de réfugiés dans la proportion d'un tiers environ. Comme la ville est assise sur un terrain d'une altitude moyenne, situé entre les basses terres et les hauts plateaux, on y jouit d'une

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