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Emile Zola

Emile Zola

Titel: Emile Zola Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edmond Lepelletier
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humain, pousser des oh ! et des ah ! avec force points d'exclamations, cela ne me soucie nullement. N'importe, je vais tâcher de te dire le mieux possible la sensation que fait naître en moi ce grand écrivain. Si je le juge mal, si je me rencontre avec d'autres critiques, je n'en puis mais. Tout ce que je te promets, c'est de parler d'après moi, et non d'après tel ou tel livre. Je ne puis lire Shakespeare que dans une traduction, ce qui ne permet guère d'apprécier le style... J'avoue que je trouve bien des choses qui me choquent, les phrases ici précieuses, là trop crues. Dieu me garde d'être bégueule ! Tu sais combien je désire la liberté dans l'art, combien je suis romantique, mais avant tout je suis poète, et   j'aime l'harmonie des idées et des images...
       ... Tout en restant réel par excellence, Shakespeare n'a pas rejeté l'idéal ; de même que, dans la vie, l'idéal a une large place, de même, dans ses drames, nous voyons toujours flotter une blanche vision...
       Shakespeare me semble donc voir, dans chacun de ses drames, une matière à peindre la vie. Une action quelconque n'est pour lui qu'un prétexte à passions, non à caractères. Elle n'est que secondaire ; ce qui lui importe, c'est de peindre l'homme, et non les hommes. Chaque drame est comme un chapitre séparé d'une oeuvre d'humanité ; il y peint un de ses côtés, quelquefois plusieurs, largement soucieux de ne rien omettre, introduisant tout ce qui peut lui servir. Othello, ce n'est pas un homme jaloux, c'est la jalousie ; Roméo, c'est l'amour ; Macbeth, l'ambition et le vice ; Hamlet, le doute et la faiblesse ; Lear le désespoir...
    On ne saurait mieux dire, et voilà Shakespeare exceptionnellement compris.
    La plupart se contentent de l'admirer. Zola a reçu de cette lecture une sorte d'initiation. À cette époque, tout à la fantaisie, aux élans d'un lyrisme un peu rebelle, inspiré de Musset, il ne s'apercevra guère de l'influence profonde de ce maître ; peut-être ne soupçonnera-t-il, jamais, lui le Docteur du Naturalisme, qui a tant raisonné sur l'expérimentation, sur le caractère scientifique des romans de son temps, qu'il procède bien plus de Shakespeare que de Duranty, de Stendhal et de Flaubert. Ce qu'il vient de formuler sur Shakespeare, il l'exécutera quand il écrira ses Rougon-Macquart. Comme le grand Anglais, il peindra l'homme et non les hommes, et il poursuivra l'étude des passions, des vices, des névroses, et non celle des caractères.
    Est-ce que Coupeau n'est pas l'Ivrogne, comme Othello est le Jaloux ? Nana, c'est la Courtisane, la femme dont la chair domine, produit la richesse et la ruine, enfante la joie et le désespoir, ce n'est pas telle femme galante, avec ses particularités, ses originalités, ses caractérisations propres. Prenez, un à un, tous les personnages des Rougon-Macquart ; tous, sans exception, tournent au type.
    Là, se constate l'influence du Midi. Là, nous retrouvons l'influence du sol natal, le produit du terroir, l'hérédité italienne et l'éducation provençale. L'art méridional a créé des types,-les personnages de la Comédie Italienne, Arlequin, Cassandre, Colombine,-le Nord a plutôt cherché à peindre les caractères. C'est pour cela que Zola est bien plus proche, dans ses romans qualifiés de réalistes, de Shakespeare et de Hugo que de Richardson ou de Dickens. Avec Shakespeare, sur lequel la littérature italienne eut si grande influence, ce fut, en effet, Victor Hugo qui eut en lui une pénétration dominatrice. Et, cependant, il ne fut jamais qu'un poète noué, comme Chateaubriand, ou plutôt un lyrique avorté.
    Il ne reprenait sa vigueur et sa souplesse que lorsqu'il cessait de vouloir écrire en vers. Sa muse aptère retrouvait des ailes, et de quelle envergure puissante, quand, renonçant à se débattre dans le champ poétique, il lui donnait son vol dans la prose.
    Il lut avec plaisir André Chénier, le pasticheur élégant de l'antiquité pastorale, mais ce Grec modernisant n'eut sur lui aucune action sensible.
    Il produisit plutôt une réaction. Zola reconnaît la grâce de ses vers, mais il lui reproche son style mythologique et son goût du monde antique.
    Le génie, sans doute, sait faire tout accepter, et les naïades d'Homère, comme les ondines d'Ossian, lui appartiennent, mais le jeune rimeur du collège d'Aix, déjà préoccupé par la vie présente, rêvait d'une poésie qui n'imiterait pas plus les chantres de

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