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George Sand et ses amis

George Sand et ses amis

Titel: George Sand et ses amis Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Albert le Roy
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Il faut croire que, de sa part, c'était un acte d'après boire, mais particulièrement fâcheux dans ce milieu où ils s'étaient connus et fiancés. En vérité, Casimir était trop flegmatique comme prétendant et trop pétulant comme mari. D'abord il avait le coeur sec, et ensuite la main leste. Aurore, à très bon droit, ne pardonna jamais ce procédé brutal, qui devait se renouveler.
    Henri Heine, ayant plus tard rencontré M. Dudevant chez sa femme alors qu'ils étaient déjà séparés de fait, nous a laissé un pittoresque portrait du personnage : «Il avait une de ces physionomies de philistin qui ne disent rien, et il ne semblait être ni méchant, ni grossier, mais je compris facilement que cette quotidienneté humidement froide, ces yeux de porcelaine, ces mouvements monotones de pagode chinoise auraient pu amuser une commère banale, mais devaient, à la longue, donner le frisson à une femme d'âme plus profonde et lui inspirer, avec l'horreur, l'envie de s'enfuir.» L'heure n'était pas encore venue où la coupe d'amertume, trop pleine, déborderait ; mais ni à Nohant, ni à Ormesson, ni à Paris dans un logement meublé du faubourg Saint-Honoré, Aurore ne trouva la quiétude. Elle alla consulter son vieux confesseur l'abbé de Prémord, elle fit une retraite à son couvent ; car Casimir, qui était libre-penseur, voulait une religion pour les femmes. C'était, à son estime, un paratonnerre à l'usage des maris contre certains accidents conjugaux qui n'épargnent même pas les têtes couronnées.
    Il y a là une égalité, de tous les temps et de tous les pays, antérieure à la Révolution française et à la Déclaration des droits de l'homme. George Dandin a des confrères dans toutes les conditions sociales ; la Petite Paroisse d'Alphonse Daudet est une grande confrérie.
      Et la garde qui veille aux barrières du Louvre
      N'en défend pas les rois.
    Pour Aurore le couvent même fut inefficace. On y avait cependant admis Maurice, à condition qu'il passât par le tour ; il y passa. Entre temps, survint un gros chagrin, la mort subite et vraisemblablement le suicide de Deschartres, qui s'était ruiné dans des spéculations malheureuses sur l'huile de navette et de colza. Le séjour de Paris ne convenait guère ni à Aurore ni à Casimir. Ils y voyaient assez fréquemment le baron Dudevant qui sympathisait avec sa bru ; mais sa femme était plus rèche. Elle ne consentait à recevoir le petit Maurice que sous serment qu'on aurait pris toutes les précautions désirables et que ses parquets seraient indemnes. «C'était fort difficile, dit George Sand, Maurice n'ayant pas encore bien compris la religion du serment. Il avait dix-huit mois.»
    Au printemps de 1825, M. et madame Dudevant regagnèrent Nohant, où Casimir vivait en grande intimité de table et de cabaret avec le demi-frère d'Aurore, Hippolyte Chatiron, marié à une demoiselle Emilie de Villeneuve, et qui était le plus incorrigible des buveurs et le meilleur des garçons à jeun. M. Dudevant, en prenant sur lui modèle, fut non moins ivrogne, mais il eut le vin hargneux et méchant.
    A eux deux, ils symbolisaient l'un et l'autre aspect du genre : le bon et le mauvais pochard. Et Aurore était obligée de supporter leurs interminables et bruyantes «beuveries» qui se prolongeaient parfois jusqu'à l'aube.
    La santé de la jeune femme étant assez précaire, les médecins conseillèrent une cure à Cauterets. «J'avais, dit-elle, une toux opiniâtre, des battements de coeur fréquents et quelques symptômes de phtisie.» Elle murmurait en partant : «Allons, adieu, Nohant, je ne te reverrai peut-être plus.» Ce voyage aux Pyrénées est longuement relaté dans l'Histoire de ma Vie, sous forme de journal, et inspira quelques lettres descriptives adressées à madame Dupin : ce sont les premiers essais littéraires de George Sand. M. et madame Dudevant avaient quitté Nohant le 5 juillet 1825 ; ils s'arrêtèrent à Bordeaux, et Aurore entra en relations avec l'avocat général Aurélien de Sèze, fils du défenseur de Louis XVI, qui lui-même devait siéger à la Constituante et à la Législative, sur les bancs de l'extrême droite légitimiste. Ce fut pour Aurore l'objet d'un premier amour, essentiellement platonique. De vrai, l'homme était charmant et le paraissait encore davantage, par contraste avec Casimir Dudevant. C'est à celui-ci que fait allusion un passage du journal : «Monsieur*** chasse avec passion.

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