Guerre Des Gaules
les
veilleurs du camp entendent le bruit de cette troupe en marche, on
envoie des éclaireurs qui rapportent ce qui se passe, et Caninius,
promptement, avec les cohortes qui étaient sous les armes dans les
postes voisins, charge les pourvoyeurs aux premières lueurs du
jour. Ceux-ci, surpris, prennent peur et s'enfuient de tous côtés
vers les troupes de protection dès que les nôtres aperçoivent ces
dernières, la vue d'hommes en armes accroît encore leur ardeur, et
ils ne font pas un seul prisonnier. Luctérios réussit à s'enfuir
avec une poignée d'hommes, mais il ne rentre pas au camp.
36. Après cette heureuse opération, Caninius
apprend par des prisonniers qu'une partie des troupes est restée
avec Drappès dans un camp qui n'est pas à plus de douze milles.
S'étant assuré du fait par un grand nombre de témoignages, il
voyait bien que, puisque l'un des deux chefs avait été mis en
fuite, il serait facile de surprendre et d'écraser ceux qui
restaient ; mais il n'ignorait pas non plus que ce serait une
grande chance si aucun survivant n'était rentré au camp et n'avait
apporté à Drappès la nouvelle du désastre ; néanmoins, comme
il ne voyait aucun risque à tenter la chance, il envoie en avant
vers le camp ennemi toute la cavalerie et les fantassins Germains,
qui étaient d'une agilité extrême ; lui-même, après avoir
réparti une légion dans les trois camps, emmène l'autre en tenue de
combat. Arrivé à peu de distance des ennemis, les éclaireurs dont
il s'était fait précéder lui apprennent que, selon l'usage
ordinaire des Barbares, ils ont laissé les hauteurs pour établir
leur camp sur les bords de la rivière ; les Germains et les
cavaliers n'en sont pas moins tombés sur eux à l'improviste et ont
engagé le combat. Fort de ces renseignements, il y mène sa légion
en armes et rangée pour la bataille. Les troupes, à un signal
donné, surgissant de toutes parts, occupent les hauteurs.
Là-dessus, les Germains et les cavaliers, à la vue des enseignes de
la légion, redoublent d'ardeur. Sans désemparer, les cohortes, de
tous côtés, se précipitent : tous les ennemis sont tués ou
pris, et l'on fait un grand butin. Drappès même est fait prisonnier
au cours de l'action.
37. Caninius, après cette affaire si
heureusement menée, sans qu'il eût presque aucun blessé, retourne
assiéger les gens d'Uxellodunum et, débarrassé maintenant de
l'ennemi extérieur, dont la crainte l'avait jusque-là empêché de
disperser ses forces dans des postes et d'investir complètement la
place, il ordonne qu'on travaille partout à la fortification. Laïus
Fabius arrive le lendemain avec ses troupes, et se charge d'un
secteur d'investissement.
38. Cependant César laisse son questeur Marcus
Antonius avec quinze cohortes chez les Bellovaques, pour que les
Belges ne puissent pas une fois encore former des projets de
révolte. Il va lui-même chez les autres peuples, se fait livrer de
nouveaux otages, ramène des idées saines dans les esprits qui tous
étaient en proie à la peur. Arrivé chez les Carnutes, dont César a
raconté dans le précédent commentaire comment la guerre avait pris
naissance dans leur citée, voyant que leurs alarmes étaient
particulièrement vives, parce qu'ils avaient conscience de la
gravité de leur faute, afin d'en libérer plus vite l'ensemble de la
population, il demande qu'on lui livre, pour le châtier, Gutuater,
principal coupable et auteur responsable de la guerre. Bien que le
personnage ne se fiât plus même à ses propres concitoyens,
néanmoins, chacun s'appliquant à le rechercher, on l'amène
promptement au camp. César, malgré sa naturelle clémence, est
contraint de le livrer au supplice par les soldats accourus en
foule : ils mettaient à son compte tous les dangers courus,
tous les maux soufferts au cours de la guerre, et il fallut qu'il
fût d'abord frappé de verges jusqu'à perdre connaissance, avant que
la hache l'achevât.
39. César était chez les Carnutes quand il
reçoit coup sur coup plusieurs lettres de Caninius l'informant de
ce qui avait été fait concernant Drappès et Luctérios, et de la
résistance à laquelle s'obstinaient les habitants d'Uxellodunum.
Bien que leur petit nombre lui parût méprisable, il estimait
cependant qu'il fallait châtier sévèrement leur opiniâtreté, afin
que l'ensemble des Gaulois n'en vînt pas à s'imaginer que ce qui
leur avait manqué pour tenir tête aux Romains, ce n'était pas
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