Guerre Des Gaules
à
exprimer, qu'ils revinssent aux ides d'avril. »
8. En attendant, il employa la légion qu'il
avait et les soldats qui étaient venus de la province à construire,
sur une longueur de dix-neuf milles, depuis le lac Léman, qui
déverse ses eaux dans le Rhône, jusqu'au Jura, qui forme la
frontière entre les Séquanes et les Helvètes, un mur haut de seize
pieds et précédé d'un fossé. Ayant achevé cet ouvrage, il distribue
des postes, établit des redoutes, afin de pouvoir mieux leur
interdire le passage s'ils veulent le tenter contre son gré. Quand
on fut au jour convenu, et que les envoyés revinrent, il déclara
que les traditions de la politique romaine et les précédents ne lui
permettaient pas d'accorder à qui que ce fût le passage à travers
la province ; s'ils voulaient passer de force, ils le voyaient
prêt à s'y opposer. Les Helvètes, déchus de leur espérance,
essayèrent, soit à l'aide de bateaux liés ensemble et de radeaux
qu'ils construisirent en grand nombre, soit à gué, aux endroits où
le Rhône avait le moins de profondeur, de forcer le passage du
fleuve, quelquefois de jour, plus souvent de nuit ; mais ils
se heurtèrent aux ouvrages de défense, furent repoussés par les
attaques et les tirs de nos soldats, et finirent par renoncer à
leur entreprise.
9. Il ne leur restait plus qu'une route, celle
qui traversait le territoire des Séquanes ; ils ne pouvaient,
à cause des défilés, s'y engager sans le consentement de ce peuple.
Ne pouvant le persuader à eux seuls, ils envoient une ambassade à
l'Héduen Dumnorix, afin que par son intercession il leur obtienne
le passage. Dumnorix, qui était populaire et généreux, disposait de
la plus forte influence auprès des Séquanes ; c'était en même
temps un ami des Helvètes, parce qu'il s'était marié dans leur
pays, ayant épousé la fille d'Orgétorix ; son désir de régner
le poussait à favoriser les changements politiques, et il voulait
s'attacher le plus de nations possible en leur rendant des
services. Aussi prend-il l'affaire en main : il obtient des
Séquanes qu'ils laissent passer les Helvètes sur leur territoire,
et amène les deux peuples à échanger des otages, les Séquanes
s'engageant à ne pas s'opposer au passage des Helvètes, ceux-ci
garantissant que leur passage s'effectuera sans dommages ni
violences.
10. On rapporte à César que les Helvètes se
proposent de gagner, par les territoires des Séquanes et des
Héduens, celui des Santons, qui n'est pas loin de la cité des
Tolosates, laquelle fait partie de la province romaine. Il se rend
compte que si les choses se passent ainsi, ce sera un grand danger
pour la province que d'avoir, sur la frontière d'un pays sans
défenses naturelles et très riche en blé, un peuple belliqueux,
hostile aux Romains. Aussi, confiant à son légat Titus Labiénus le
commandement de la ligne fortifiée qu'il avait établie, il gagne
l'Italie par grandes étapes ; il y lève deux légions, en met
en campagne trois autres qui prenaient leurs quartiers d'hiver
autour d'Aquilée, et avec ses cinq légions il se dirige vers la
Gaule ultérieure, en prenant au plus court, à travers les Alpes.
Là, les Centrons, les Graiocèles, les Caturiges, qui avaient occupé
les positions dominantes, essayent d'interdire le passage à son
armée. Parti d'Océlum, qui est la dernière ville de la Gaule
citérieure, il parvient en sept jours, après plusieurs combats
victorieux, chez les Voconces, en Gaule ultérieure ; de là il
conduit ses troupes chez les Allobroges, et des Allobroges chez les
Ségusiaves. C'est le premier peuple qu'on rencontre hors de la
province au-delà du Rhône.
11. Les Helvètes avaient déjà franchi les
défilés et traversé le pays des Séquanes ; ils étaient
parvenus chez les Héduens, et ravageaient leurs terres. Ceux-ci, ne
pouvant se défendre ni protéger leurs biens, envoient une ambassade
à César pour lui demander secours : « Ils s'étaient, de
tout temps, assez bien conduits envers le peuple romain pour ne pas
mériter que presque sous les yeux de notre armée leurs champs
fussent dévastés, leurs enfants emmenés en esclavage, leurs villes
prises d'assaut. En même temps les Ambarres, peuple ami des Héduens
et de même souche, font savoir à César que leurs campagnes ont été
ravagées, et qu'ils ont de la peine à défendre leurs villes des
agressions de l'ennemi. Enfin des Allobroges qui avaient sur la
rive droite du Rhône des
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