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Helvétie

Helvétie

Titel: Helvétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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à la municipalité de Vevey 1 , enjoignant de « faire enlever de suite toutes les planches, pièces de bois ou autres embarras » qui encombraient la place avaient été suivies d’effet. Les tas de planches et de madriers subsistaient, certes, mais, empilés sur les côtés de l’esplanade, ils en laissaient, ainsi qu’il avait été demandé, « toute la surface complètement libre ».
     
    Pratique, le maréchal des logis observa que le lieu manquait d’ombrage :
     
    – C’est pas les dix marronniers qu’on voit là-bas – il désigna l’est de la place – qui protégeront six mille troupiers des rayons du soleil ! dit-il avec un peu d’humeur.
     
    Au moins autant que la gendarmerie, Trévotte détestait les revues, qui occasionnaient toujours, pour les ordonnances, des astiquages supplémentaires. Le capitaine passait pour un maniaque du brossage, du lustrage, du repassage. Aussi, les consignes que donna l’officier, sans relever la nouvelle insolence du subalterne, ne prirent pas ce dernier au dépourvu.
     
    – Va tout de suite chez ce bon bourgeois qui doit nous loger. Défais les bagages, prépare la grande tenue, n’oublie pas de faire briller les boutons. Tu as touché du blanc d’Espagne, hein, c’est le moment de t’en servir. Sans tacher le tissu, s’il te plaît. Et passe au tampon mes nouvelles bottes. Et ne te contente pas de bouchonner les chevaux. Use de l’étrille et de la brosse. Je veux voir au sol huit raies de poussière comme dans les écuries prussiennes. N’oublie pas de cirer les harnais. Et sois poli avec tout le monde !
     
    – Comme toujours, citoyen capitaine !
     
    – Mieux que toujours, Titus !
     
    – Et pour votre manger, tout à l’heure ?
     
    – Ne t’occupe pas de moi. Pour toi, je suis bien certain que tu trouveras chez le logeur une cuisinière sensible à ta tournure et qui te donnera un quignon de pain et un bout de fromage. Mais, prends garde, je ne veux pas d’histoires, comme à Genève avec la domestique de M me  de Saussure. Je ne sais ce que tu lui as dit ou fait, mais cela a failli causer un vrai scandale. Déjà que le général Bonaparte n’était pas de bonne humeur !
     
    – Cette fille est une fieffée gourgandine. Elle voulait bien et puis, tout d’un coup, elle a plus voulu ! Et la veuve Saussure a cru ce qu’elle disait ! C’est des menteries de ci-devant !
     
    Trévotte suffoquait encore d’indignation au rappel de l’incident : la servante de M me  de Saussure, une grosse fille qui s’était laissé embrasser sans façon dans sa cuisine, avait soudain poussé des cris d’orfraie quand le maréchal des logis s’était avisé de la renverser sur la table pour conclure à la hussarde. On avait perçu les cris de la fille jusqu’au salon où le Premier consul s’entretenait avec le dernier ministre des Finances de Louis XVI 2  !
     
    – L’affaire de Genève est oubliée. Mais, dorénavant, tiens-toi à distance des femmes. Et ne laisse pas folâtrer tes grandes pattes ! Tu vois ce que je veux dire. La moindre plainte à ce sujet et je te renvoie à ton bataillon !
     
    – Promis, capitaine ! Je bouchonnerai que les chevaux !
     
    Comme ils atteignaient l’entrée d’une rue, parallèle au lac et qui s’enfonçait dans la ville, Blaise mit pied à terre, confia son cheval à Trévotte et s’enquit auprès d’un passant de la direction du château baillival et de la maison de M. Métaz. Renseigné, il laissa l’ordonnance se rendre seul à Rive-Reine, avec les trois chevaux, et se mit en route, à pied, pour rejoindre le général Musnier.
     
    En marchant sur les pavés arrondis de la rue du Sauveur, il eut tout loisir de constater que sa présence ne suscitait pas grande curiosité. Les Veveysans étaient habitués, depuis deux ans, à voir, dans leurs rues et venelles, des militaires français de tout grade. Il remarqua aussi que la propreté semblait être une règle respectée par tous. On ne trouvait nulle part ces tas d’ordures ou de détritus qu’auraient, ailleurs, fouillés les chiens errants. Le seuil des maisons et des échoppes venait d’être lavé à grande eau. Aux fenêtres, il compta autant de pots de fleurs que de tricots ou camisoles mis à sécher. Les gens eux-mêmes, vêtus avec simplicité, allaient à l’aise dans des vêtements nets. Les habits des hommes connaissaient la brosse et le fer, certains bourgeois arboraient de beaux gilets brodés. Les

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