Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814
entra dans la coalition, et les hostilités recommencèrent. La guerre seule pouvait vider ce grand débat. L’empereur n’avait que deux cent quatre-vingt mille hommes contre cinq cent vingt mille ;il voulait refouler l’ennemi derrière l’Elbe, et dissoudre, à son ordinaire, cette nouvelle coalition par la promptitude et la vigueur de ses coups. La victoire parut le seconder d’abord. Il battit à Dresde les alliés réunis ; mais les défaites de ses lieutenants dérangèrent ses desseins. Macdonald fut vaincu en Silésie ; Ney, près de Berlin ; Vandamme à Kulm. Ne pouvant plus faire barrière contre l’ennemi prêt à le déborder de toutes parts, Napoléon songea à la retraite. Les princes de la confédération du Rhin choisirent ce moment pour déserter l’empire. Un vaste engagement ayant eu lieu à Leipsik entre les deux armées, les Saxons et les Wurtembergeois passèrent à l’ennemi sur le champ de bataille même. Cette défection et la force des coalisés, qui avaient appris à faire une guerre plus serrée et plus habile, contraignirent Napoléon à la retraite, après une lutte de trois jours. L’armée marcha avec beaucoup de confusion vers le Rhin, dont les Bavarois, qui avaient également défectionné, voulurent lui fermer le passage. Mais elle les écrasa à Hanau, et rentra sur le territoire de l’empire le 3o octobre 1813. La fin de cette campagne fut aussi désastreuse que celle de la campagne précédente. La France fut menacée dans ses propres limites, comme en 1799 ; mais elle n’avait plus le même enthousiasme d’indépendance ; et l’homme qui l’avait destituée de ses droits, la trouva, dans cette grande crise, incapable de le soutenir et de se défendre. On expie tôt ou tard la servitude des nations.
Napoléon retourna à Paris, le 9 novembre 1813. Il obtint du sénat une levée de trois cent mile hommes, et fît avec la plus grande ardeur les préparatifs d’une nouvelle campagne. Il convoqua le corps législatif pour l’associer à la défense commune ; il lui communiqua les pièces relatives aux négociations de Prague, et lui demanda un nouvel et dernier effort, afin d’assurer glorieusement la paix, qui était le vœu universel de la France. Mais le corps législatif, jusque-là muet et obéissant, choisit cette époque pour résister à Napoléon.
Il était accablé de la fatigue commune, et se trouvait, sans le savoir, sous l’influence du parti royaliste, qui s’agitait secrètement depuis que la décadence de l’empire avait relevé son espoir. Une commission, composée de MM. Laine, Raynouard, Gallois, Flaugergues, Maine de Biran, fit un rapport très-hostile sur la marche suivie par le gouvernement, et demanda l’abandon des conquêtes et le rétablissement de la liberté. Ce vœu, très-juste dans un autre temps, n’était propre alors qu’à faciliter l’invasion étrangère. Quoique les confédérés parussent mettre la paix au prix de l’évacuation de l’Europe, ils étaient disposés à pousser la victoire jusqu’au bout. Napoléon, irrité de cette opposition inattendue et inquiétante, renvoya subitement le corps législatif. Ce commencement de résistance annonça les défections intérieures. Après s’être étendues de la Russie à toute l’Allemagne, elles allaient s’étendre de l’Allemagne à l’Italie et à la France. Mais tout dépendait cette fois, comme les précédentes, du sort de la guerre, que l’hiver n’avait pas ralentie. Napoléon tourna de ce côté toutes ses espérances ; il partit de Paris, le 25janvier, pour cette immortelle campagne.
L’empire était envahi par tous les points. Les Autrichiens s’avançaient en Italie ; les Anglais, qui s’étaient rendus maîtres de la Péninsule entière dans les deux dernières années, avaient passé la Bidassoa sous le général Wellington, et paraissaient aux Pyrénées. Trois armées pressaient la France à l’est et au nord. La grande armée alliée, forte de cent cinquante mille hommes sous Schwartzemberg, avait débouché par la Suisse ; celle de Silésie, de cent trente mille sous Blucher, était entrée par Francfort ; et celle du nord, de cent mille hommes sous Bernadotte, avait envahi la Hollande, et pénétrait dans la Belgique. Les ennemis négligeaient à leur tour les places fortes, et, formés à la grande guerre par leur vainqueur, ils marchaient sur la capitale. Au moment où Napoléon quitta Paris, les deux
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