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Il suffit d'un Amour Tome 2

Il suffit d'un Amour Tome 2

Titel: Il suffit d'un Amour Tome 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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certes pas dans les circonstances que vous imaginez. En fait, Monseigneur... vous l'avez fait pendre!
    Cauchon eut un haut-le-corps.

    — Pendre ? Un gentilhomme ? Madame... si pareille chose était arrivée par mon ordre, je m'en souviendrais !
    Aussi n'était-il pas gentilhomme, poursuivit Catherine, tranquillement, mais avec, dans sa voix, une inquiétante douceur. Ce n'était qu'un simple bourgeois... un modeste orfèvre du Pont-au-Change à Paris..C'était il y a dix ans. Il se nommait Gaucher Legoix, un nom qui doit vous rappeler quelque chose. Vous et votre ami Caboche l'avez fait pendre parce que moi, pauvre innocente, j'avais caché un jeune homme dans notre cave... un autre innocent que l'on a massacré sous mes yeux.
    Au nom de Caboche, deux plaques rouges s'étaient dessinées sur les joues grasses et pâles de l'évêque de Beauvais. Dans sa nouvelle dignité épiscopale, il n'aimait pas ce rappel à d'anciennes relations très peu flatteuses. Mais ses petits yeux jaunes s'attachèrent au visage de Catherine avec insistance.
    — Voilà pourquoi votre visage me rappelait quelque chose. Vous êtes la petite Catherine, n'est- ce pas ? Je suis excusable de ne vous avoir point reconnue car vous avez beaucoup changé. Qui eût pu supposer...
    — ... qu'une modeste fille d'artisan évoluerait à la Cour de Bourgogne ?
    Ni votre Révérence, ni moi, certes. Pourtant, il en est ainsi. Le destin est une chose étrange, n'est-ce pas, Monseigneur ?
    — Très étrange ! Vous me rappelez des choses que je voudrais oublier.
    Vous voyez que je suis franc ? Je vais l'être encore davantage : je n'avais aucune animosité personnelle contre votre père. Je l'eusse peut-être sauvé, si la chose eût été possible. Mais elle ne l'était pas !
    — Êtes-vous bien sûr d'avoir tout fait pour lui éviter la corde ? Vous aviez coutume, alors, de balayer ce qui vous gênait. Or, il vous gênait...
    Cauchon ne broncha pas. Son lourd visage demeura impassible. Son regard était dur comme une pierre d'ambre pâle.
    Il me gênait, en effet ! Le temps n'était pas aux demi-mesures. Après tout, peut-être avez-vous raison. Je n'ai pas cherché à le sauver parce que je n'en voyais pas l'utilité.
    — Voilà qui est franc !
    Ils étaient arrivés dans l'embrasure profonde d'une fenêtre. L'évêque posa sa main sur l'un des carreaux, suivant distraitement du doigt les méandres de plomb qui le sertissaient, le regard au loin.
    — Acceptez que je vous pose une question ? Pourquoi avez-vous désiré me rencontrer ? Vous devez me haïr ?

    — Je vous hais, en effet, répondit Catherine imperturbablement calme.
    J'ai seulement voulu vous voir de près... et aussi vous dire que j'existais.
    Enfin, je vous dois quelques remerciements car votre corde a épargné à mon père une fin aussi pénible mais infiniment plus longue...
    — Laquelle ?
    — Mourir de chagrin ! Il aimait trop son pays, son Roi et sa ville de Paris pour endurer d'un cœur paisible d'y voir régner l'Anglais.
    Une flambée de colère fit briller momentanément le regard atone de Pierre Cauchon.
    — L'Anglais y règne par droit de naissance et par héritage royal ! Il est notre très légitime souverain, né d'une fille de France et choisi par ses grands- parents, tandis que le bâtard de Bourges... n'est qu'un aventurier !
    Le rire bref et insolent de Catherine lui coupa la parole.
    A qui ferez-vous croire cela ? Pas à moi, en tout cas... et pas même à vous !
    Votre Révérence n'ignore pas que le roi Charles VII ne l'aurait certes pas choisie pour être aumônier de France. L'Anglais est moins difficile... et pour cause ! Il n'a guère le choix ! Mais permettez-moi de vous faire remarquer que, pour un prêtre de Dieu, vous ne vous y entendez guère à distinguer celui qu'il a élu par droit de naissance pour régner sur la France.
    — Henri VI, seul, est vrai Roi de France...
    L'évêque semblait proche de l'apoplexie, mais
    Catherine lui adressa son plus délicieux sourire.
    — L'ennui, avec vous, Monseigneur, c'est que Votre Révérence aimerait sans doute mieux périr que reconnaître qu'elle s'est trompée ! Allons, souriez, Monseigneur ! On nous regarde... singulièrement le duc Philippe.
    On a dû vous dire que nous sommes de grands amis.
    Au prix d'un effort surhumain, Pierre Cauchon réussit à unifier son visage. Il sourit même, mais du bout des lèvres, et siffla entre ses dents serrées :
    — Soyez sûre que je ne vous oublierai pas, Madame

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