Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Il suffit d'un amour

Il suffit d'un amour

Titel: Il suffit d'un amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
Vom Netzwerk:
dont il rêve comme emblème de sa gloire, j'en deviendrai le roi d'armes ! confia- t-il à Catherine.
    — Ce serait merveilleux, fit machinalement Catherine qui s'en moquait éperdument.
    Toute son attention était centrée sur Beaumont. Il proclamait, dans le silence qui avait suivi l'appel des trompettes, les termes et clauses du combat. Depuis vingt-quatre heures, les hérauts des deux partis parcouraient la ville en répétant, à chaque carrefour, ces mêmes clauses. Catherine les savait par cœur. Mentalement, elle récitait en même temps que Beaumont : « ... les armes choisies sont la lance et la hache d'armes. Il sera couru six lances de part et d'autre... » Les mots frappaient, sans entrer, son oreille et sa mémoire. De tout son cœur, tandis que s'achevait la proclamation, Catherine adressait une fervente prière à la petite vierge noire de Dijon, à Notre-Dame-de- Bon-Espoir...

    « Protégez-le, implorait-elle fiévreusement, protégez-le, douce mère du Sauveur ! Faites que nul mal ne lui advienne. Qu'il vive, surtout, qu'il vive... même si je devais le perdre à jamais ! Qu'au moins je puisse penser qu'il respire quelque part, sous le même ciel que moi. Sauvez-le-moi, Notre-Dame, sauvez-le !... »
    Puis, d'un coup, sa gorge se sécha. À l'appel du héraut, le bâtard de Vendôme, à cheval et armé de toutes pièces, était arrivé au petit trot et se rangeait devant le duc. Avec terreur, Catherine regarda le gigantesque chevalier, ses armes d'acier bleu, son cheval roux disparaissant sous la cotte de soie et le caparaçon pourpre. Sur son casque, entre deux cornes de taureau s'érigeait un lion d'or, son emblème. Il avait l'air d'un mur rouge et gris ! Il était hallucinant !
    Catherine, fascinée, ne pouvait en détacher ses yeux mais un cri de surprise, sorti de mille poitrines, la fit sursauter.
    — Oh ! fit Saint-Rémy à la fois admiratif et scandalisé, quelle audace !... ou quelle faveur insigne !...
    Ermengarde était restée sans voix. Quant à Catherine, elle vit, comme dans un rêve, Arnaud sortir à cheval et tout armé de son pavillon. Au pas lent de son destrier noir, il s'avança jusqu'à la tribune ducale dans un silence impressionnant. Le gigantesque Lionel de Vendôme le regardait approcher avec une insolite expression de respect. C'est que celui qui s'avançait n'était plus le chevalier à l'épervier de l'autre soir. Par faveur insigne, sans doute, comme le disait Saint-Rémy, Arnaud de Montsalvy portait les armes du Roi de France !
    Par-dessus son armure, il portait une cotte de soie bleue fleurdelisée d'or, assortie à la housse qui enveloppait le cheval jusqu'aux sabots.
    Bleus et or étaient les lambrequins de cuir découpés qui tombaient du casque et protégeaient la nuque. Sur le heaume, enfin, l'épervier noir et la couronne comtale avaient fait place à une haute fleur de lys d'or à chaque pointe de laquelle brillait un gros saphir. Le cheval, lui aussi, portait, sur la tête, la fleur de lys. Une seule chose indiquait qu'il ne s'agissait pas là du Roi en personne : autour du casque, la couronne royale avait été remplacée par un simple tortil bleu et or. Ventaille relevée, laissant voir son visage immobile, Arnaud s'avançait sous les armes royales, splendide image de chevalerie, éclatant symbole féodal qui forçait le respect.

    — Il est magnifique ! fit auprès de Catherine la voix enrouée d'Ermengarde. C'est l'Archange Saint- Michel en personne !
    Saint-Rémy, lui, hocha la tête avec un peu de tristesse et de scepticisme :
    — Il serait à souhaiter qu'il le fût vraiment ! Les fleurs de lys ne doivent point mordre la poussière où le Roi est déshonoré ! Et Monseigneur est blême !
    C'était vrai. Se tournant vers Philippe, Catherine vit qu'il avait l'air d'un spectre. Entre le noir du chaperon et celui du pourpoint, le visage allongé était gris avec des reflets verdâtres. Les dents serrées, il regardait venir cette admirable image d'un souverain qu'il voulait renier. Ses yeux gris qui ne cillaient pas, se fixaient surtout sur la fleur de lys du heaume, réplique exacte de celle qu'il portait lui-même à son propre casque lorsqu'il revêtait l'armure. Le reproche était sanglant pour ce prince Valois qui recevait l'Anglais. Mais il lui fallait se dominer.
    Avec ensemble, les deux chevaliers, côte à côte mais séparés par les couloirs de cordes, abaissaient leur lance vers la tribune. Catherine tremblait de tous ses membres et

Weitere Kostenlose Bücher