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Il suffit d'un amour

Il suffit d'un amour

Titel: Il suffit d'un amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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ses longues poulaines d'acier, il avait vivement arraché ses solerets avant de saisir la hache d'armes plantée non loin de lui. Il était presque devant Catherine à cet instant et la jeune femme le vit avancer sur son adversaire à petits pas courts, les prunelles rétrécies, la targe au coude gauche et la hache levée. A son tour, Lionel de Vendôme se redressait. Debout, face à face, la différence de taille entre les deux adversaires était criante. Arnaud mesurait à peu près un mètre quatre-vingt-trois ou quatre, mais, auprès des deux mètres dix du bâtard, il semblait petit. Dans la poigne de Lionel, la hache avait l'air d'un tronc d'arbre emmanché d'acier gris. Sans reprendre haleine et sans en laisser le temps au bâtard, Arnaud avait bondi. Il voulait vaincre et vaincre vite.
    Ses blessures, le sang qu'il perdait, ne lui laissaient que cette seule alternative et Catherine le sentait dans sa chair même. Elle souffrait, physiquement, pour lui. La hache rebondit sur l'armure de Vendôme qui s'apprêtait à frapper. D'un mouvement vif, Arnaud sauta de côté, évita le coup qui l'eût assommé, revint à la charge, frappa encore... Le heurt des haches sur l'acier retentissait avec un bruit de cloches, faisant jaillir des étincelles. Le chevalier du Roi porta alors un coup qui arracha les « vivats » des assistants. Sa hache s'abattit sur le timbre du heaume de Lionel, tranchant net le lion d'or qui roula dans le sable. Le rugissement de rage du bâtard fut entendu de tous. Il se dressa de toute sa hauteur, empoignant la hache à deux mains pour assommer l'insolent qui venait de le découronner. Mais ses poulaines de fer le gênaient. Il buta, faillit tomber et Arnaud n'eut aucune peine à détourner le coup avec le manche de sa cognée. Catherine devina qu'une fureur aveugle possédait Vendôme. Il voulait tuer, tuer vite !
    Ses coups, rapides mais peu précis l'épuisaient sans avoir toute l'efficacité désirable. Il frappait en aveugle, possédé par la rage.
    Arnaud, au contraire, semblait se faire plus froid d'instant en instant. Il saisit son moment, porta plusieurs coups de tranchant à la visière de Lionel qu'il fit sauter, découvrant la face rouge et suante de son ennemi. Le bâtard tendit la main pour empoigner la hache du jeune homme mais celui-ci la lança loin de lui et se jeta sur le géant, les griffes de fer de ses gantelets visant le visage. Vendôme, sentant les serres du chevalier lui labourer la face eut un mouvement de recul, glissa et s'écroula à terre. Arnaud se laissa tomber sur lui, continuant avec acharnement son travail d'écorcheur. Le bâtard, brusquement vidé de ses forces, aveuglé à demi, beuglait comme un bœuf à l'abattoir. On l'entendit crier merci !
    Arnaud, un genou sur la gorge de son ennemi, fit un geste pour tirer sa dague, mais se ravisa. Il se releva, secouant ses gantelets dont le sang dégouttait puis, avec dédain :
    — Dieu a jugé ! s'écria-t-il. Relève-toi ! Un chevalier du roi de France n'égorge pas l'ennemi vaincu. Tu as crié merci. Je te fais grâce... duc de Bourgogne !
    Sans rien ajouter, sous les vivats impartiaux de la foule amassée le long des barrières de la lice, il se détourna. Catherine bouleversée le sentait s'affaiblir comme si c'eût été son propre sang qui s'écoulait sur la terre. En s'acheminant vers son pavillon, Arnaud titubait comme un homme ivre. Son écuyer et Xaintrailles accoururent juste à temps pour le recueillir dans leurs bras au moment précis où il perdait connaissance et s'écroulait.
    — Les lys de France n'ont point mordu la poussière, fit gravement Saint-Rémy. C'est peut-être un présage...

    Catherine le regarda mais, cette fois, son expression était indéchiffrable. Nul ne pouvait dire si le gentilhomme était satisfait ou mécontent de l'issue du combat. Peut-être n'osait-il se réjouir quand le dépit crispait le visage glacé de Philippe où roulaient des larmes de colère. Elle haussa les épaules avec mépris, se leva, ramassant sa robe, et entreprit de gagner la sortie du hourd. Ermengarde l'arrêta.
    — Où allez-vous ?
    — Vous le savez bien ! Et vous savez aussi que, cette fois, vous n'aurez pas le pouvoir de m'arrêter. Personne n'a ce pouvoir. Pas même le Duc !
    — Qui vous dit que j'y songe seulement ? fit la comtesse en haussant les épaules. Courez, mon beau papillon, courez vous brûler les ailes. Quand vous reviendrez, je verrai ce que je peux faire pour éteindre

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