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Il suffit d'un amour

Il suffit d'un amour

Titel: Il suffit d'un amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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serrait ses mains l'une contre l'autre à les meurtrir en un geste qui lui était familier quand elle était émue.
    Elle vit, à quelques places de Philippe, une belle jeune femme, somptueusement vêtue, se pencher et attacher une écharpe rose brodée d'or à la lance du bâtard après avoir adressé un sourire triomphant au Duc. Jean de Saint-Rémy chuchota :
    — La dame de Presles ! La plus récente maîtresse de Monseigneur
    ! Elle montre ainsi les vœux qu'elle forme pour la cause de son amant, en donnant ses couleurs à son champion. Elle a donné un fils à Philippe et se croit déjà duchesse !
    Catherine eut donné tout au monde pour pouvoir accrocher, elle aussi, à la lance d'Arnaud, le léger voile de mousseline qu'elle avait entre les mains. Mais, dans la grande loge, quelque chose se passait. La princesse Marguerite s'était levée et, tournée vers Arthur de Richemont, demandait :
    — Me permettez-vous, Monseigneur ?
    Sa voix claire fut entendue de tous. Richemont inclina la tête avec un sourire un peu amusé qui plissa son visage couturé. Les larmes aux yeux, car elle se souvenait des prières douloureuses de la princesse à l'hôtel Saint-Pol, Catherine vit Marguerite se pencher et, avec un sourire ému, attacher son voile, du même bleu que les caparaçons du chevalier à la lance du champion royal.
    — Messire-Dieu vous donne bon courage, Arnaud de Montsalvy
    ! Votre frère était mon ami et votre cause est noble ! Je prierai pour vous !
    Sous l'armure, Arnaud s'inclina presque à toucher le cou de son cheval :
    — Grand merci, gracieuse dame ! Je me battrai donc également pour l'amour de vous et du vaillant capitaine qui va être votre heureux époux. J'en suis fier et mourrai plutôt que vous décevoir !
    Dieu vous donne bonheur aussi grand que votre noble cœur !
    Le visage de Philippe de Bourgogne avait frémi. En un instant il eut dix ans de plus. Sans regarder son frère, Marguerite regagna sa place. Maintenant les deux adversaires se tournaient le dos et rejoignaient une extrémité de la lice où leurs écuyers préparaient des lances. Lances de frêne et de fer à la pointe aiguë et non lances courtoises de bois léger. Près de l'écuyer d'Arnaud, Catherine reconnut la tignasse rousse de Xaintrailles qui devait rencontrer ensuite le sire de Rebecque, second de Vendôme. A nouveau les trompettes sonnèrent. Puis, d'une voix forte, le héraut Beaumont cria
    : — Coupez cordes et heurtez bataille quand vous voudrez !
    Sous le couteau des poursuivants, les cordes tombèrent à terre. La lice était libre, le combat commençait. Lance en arrêt, l'écu au coude, les deux combattants s'élancèrent l'un vers l'autre.
    Un instant, Catherine ferma les yeux Elle avait l'impression que le lourd galop des chevaux chargés de fer, sous lequel résonnait la terre durcie, passait sur son propre cœur. Dans la tribune, chacun retenait son souffle. La main d'Ermengarde se posa, impérieuse, sur celles de la jeune femme.
    — Regardez donc ! Le spectacle en vaut la peine et une noble dame doit savoir tout regarder en face. (Puis, plus bas :) Regardez morbleu !
    Votre mari a les yeux fixés sur vous.
    Catherine ouvrit les yeux aussitôt.

    Il y eut un choc violent, un cri énorme jaillit de toutes les poitrines.
    Les lances avaient frappé juste le centre des boucliers. Le coup avait été violent. Les deux adversaires avaient plié sur leur selle mais n'avaient vidé les étriers ni l'un ni l'autre. Au petit trot, ils repartaient déjà vers les bouts de la lice pour prendre des lances neuves aux mains des écuyers.
    — Je crois que nous allons voir un très beau combat, fit tranquillement Saint-Rémy de sa voix affectée. Ce coup était remarquable !
    Catherine le regarda de travers. Cet enthousiasme sportif la choquait car il lui paraissait peu de mise là où il s'agissait de vies humaines. Elle chercha à le blesser :
    — Comment se fait-il que, né à Abbeville, vous ne soyez pas au roi de France ? lui lança-t-elle dans une intention nettement provocatrice.
    Mais il ne se formalisa pas.
    J'y étais, fit-il tranquillement. Mais la cour d'Ysabeau est pourrie et l'on ne sait si celui qui se dit Charles VII est vrai fils de France. Je préfère le duc de Bourgogne.
    — Cependant, vous semblez faire des vœux pour Arnaud de Montsalvy ?
    — Je l'aime beaucoup. S'il était Charles VII, je n'aurais pas la joie d'être auprès de vous car je serais auprès de lui.
    — Le fait qu'il serve le

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