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Il suffit d'un amour

Il suffit d'un amour

Titel: Il suffit d'un amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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fille, c'était au moment où, en pleine crise de nerfs, sa cadette perdait conscience. Loyse avait recueilli la petite dans ses bras. Mais un remous de la foule avait arraché Catherine à sa sœur dont les bras n'avaient pas eu la force nécessaire pour la retenir. Landry s'était trouvé là à point nommé pour récupérer sa petite amie. Quant à Loyse, elle s'était noyée dans la poussée furieuse des pillards lancés à l'assaut de « l'Arche d'Alliance
    ». Personne n'avait pu dire ce qu'elle était devenue.
    — Elle est peut-être tombée à l'eau, dit Jacquette en tamponnant ses yeux que les larmes gonflaient continuellement. Mais, en ce cas, la Seine eût rejeté son corps. Barnabé va chaque jour à la morgue du Grand Châtelet et ne l'a pas encore retrouvée. Il est persuadé qu'elle est vivante et il la cherche. Jusque- là il faut attendre...
    — Et ensuite, que ferons-nous ? demanda Catherine. Resterons-nous ici, chez Barnabé ?
    — Non ! Dès que nous aurons retrouvé Loyse, si Dieu le veut, nous essayerons de quitter Paris pour gagner Dijon. Ton oncle Mathieu, tu le sais, y tient boutique de draperie. Il nous accueillera puisqu'il est toute notre famille comme nous sommes toute la sienne...
    Le chagrin de Jacquette paraissait s'atténuer un peu quand elle évoquait la maison de son frère, qui avait été auparavant celle de ses parents où elle avait passé toute son enfance et où Gaucher Legoix était venu l'épouser bien des années plus tôt. C'était là le port vers lequel, déracinée, elle allait tendre de toutes ses forces. Tout en étant très reconnaissante au Coquillart de l'asile généreux qu'il leur donnait, la bonne dame ne pouvait s'empêcher de considérer avec méfiance et dégoût ce monde bizarre des truands au fond duquel elle s'était trouvée précipitée subitement.
    Sara continuait ses soins à Catherine. Ils consistaient en boissons rafraîchissantes, en drogues bizarres qu'elle lui faisait prendre pour faire revenir les forces et sur la composition desquelles, la bohémienne demeurait fort discrète sauf en ce qui concernait les tisanes de verveine. Elle lui en faisait boire continuellement, comme souveraine contre tous maux.
    Peu à peu d'ailleurs, Catherine et même Jacquette s'accoutumaient à la présence de la femme au teint sombre. Barnabé leur en avait conté l'histoire. Sara était née dans l'île de Chypre au milieu de l'une des tribus zinganas établies dans l'île. Mais toute jeune, elle avait été prise par les Turcs, vendue au marché de Candie à un marchand vénitien qui l'avait ramenée chez lui. À Venise, Sara était demeurée une dizaine d'années et c'était là qu'elle avait appris sa science des herbes qui guérissent. Son maître étant venu à mourir, elle avait été rachetée par un changeur lombard qui venait s'installer à Paris. Mais c'était un homme brutal et cruel. Continuellement maltraitée, Sara s'était enfuie, un soir d'hiver. Elle avait cherché refuge dans une église où Maillet-le-loup, le faux aveugle, l'avait trouvée grelottant de froid et de faim.
    Il l'avait emmenée chez lui, dans sa tanière de la Cour Saint-Sauveur.
    Depuis, elle lui servait de ménagère. Sara-la-Noire, outre ses talents de guérisseuse, toujours précieux chez les gueux, savait lire l'avenir dans les mains. Cela lui valait d'être parfois appelée, en grand secret, dans quelque noble demeure... Courant ainsi par la ville et pénétrant là où bien des gens ne pouvaient le faire, Sara apprenait beaucoup de choses sur la ville et la Cour. Elle savait une foule d'histoires et demeurait des heures, accroupie près de l'âtre, entre Catherine et sa mère, partageant avec elles le vin aux herbes qu'elle faisait comme personne et bavardant inlassablement de sa voix paisible et chantante.
    Histoires de sa lointaine tribu ou potins de la Cour, tout y passait ! Et presque chaque soir, quand Barnabé renterait de « ses affaires », il trouvait les trois femmes réunies, cherchant dans leur mutuelle société une manière de réconfort. Il s'asseyait alors au milieu de cette étrange famille que le hasard lui avait constituée et apportait à son tour les bruits du dehors.
    Quand la nuit était tout à fait close et que le royaume des truands s'éveillait à sa tumultueuse vie nocturne, la présence du Coquillart était indispensable pour calmer les frayeurs de ses invitées. C'est qu'elle était terrifiante la Grande Cour des Miracles à l'heure où ses

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