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Il suffit d'un amour

Il suffit d'un amour

Titel: Il suffit d'un amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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même que personne dans le quartier n'y comprend rien. Quant à être malade, il faut entendre quel genre de vêpres elle chante dans la soirée. Sans doute qu'elle est fatiguée de travailler... ou de boire !
    — Je fais ce que je veux, grogna la mère Caboche en faisant de vains efforts pour refermer sa porte.
    Mais la sandale du frère était disposée de manière à la coincer.
    — Donnez un peu de vin, alors, suggéra le frère éclairé par la déclaration de la commère.
    Mais son adversaire, devenue soudain rouge comme une brique sous sa coiffe de toile jaune, poussa un rugissement :
    — Je n'ai pas de vin ! Et puis allez au Di...
    — Oh ! ma fille... coupa le frère choqué en se signant précipitamment.
    Il ne retira pas son pied pour autant. Les gens s'attroupaient autour de la maison de la tripière. On connaissait le moine quêteur qui était le frère Eusèbe, le plus obstiné de tout le couvent. Il avait été légèrement souffrant ces derniers temps et de là venait qu'on ne l'avait pas vu dans la Cité. Il entendait bien regagner le temps perdu.
    Landry, amusé, s'était approché comme les autres pour voir qui des deux aurait raison, de l'avarice bien connue de la mère Caboche ou de l'entêtement du frère Eusèbe. Les uns riaient seulement, les autres prenaient parti pour ou contre le frère suivant qu'ils étaient pour l'Église ou pour Simon le coutelier. Cela fit bientôt un beau vacarme que dominaient les deux adversaires sur leur pas de porte et auquel vint bientôt s'ajouter un haquet traîné par un portefaix et qui, vu l'étroitesse de la rue, se coinça entre deux maisons débordantes...
    C'est alors que, levant la tête involontairement vers les étages supérieurs, Landry, grimpé sur une borne pour mieux voir, avait aperçu un visage pâle derrière l'unique fenêtre de l'étage de la mère Caboche. Cette fenêtre avait l'un de ses carreaux en papier huilé déchiré, et c'était suffisant pour que le jeune garçon reconnût celle qui essayait de voir la raison du tumulte. Instinctivement, il fit un geste du bras auquel répondit un signe rapide, puis plus rien. Loyse l'avait reconnu, il en était aussi sûr que de l'avoir reconnue lui-même, mais elle avait aussitôt disparu. Dégringolant de sa borne et oubliant les tripes maternelles, il avait joué vigoureusement des coudes pour se faire place. Sorti de la cohue, il s'était mis à courir vers la Cour Saint Sauveur.
    Catherine avait écouté le récit de Landry avec admiration, mais Barnabé était soucieux.
    — J'aurais dû m'en douter, fit-il, Caboche voulait la petite. Il a profité de l'attaque de la maison pour l'emmener chez lui où la vieille la garde. Ce ne sera pas facile de lui faire lâcher prise...
    Effondrée sur la pierre de l'âtre, Jacquette Legoix sanglotait éperdument, la tête dans ses jupes. Penchée sur elle, Sara caressait les épaisses tresses d'un blond foncé, à peine grisonnantes, de la pauvre femme, essayant de la calmer. Mais c'était en vain.
    — Ma petite !... ma douce agnelle qui se voulait garder bien pure pour le Seigneur !... Il me l'a prise, ce pourceau !... ce monstre !...
    Hélas ! Hélas !...
    Jacquette étouffait littéralement de chagrin sans que Catherine, muette de saisissement, ou les autres tout aussi désolés, trouvassent quelque consolation vraiment efficace. Ce fut Barnabé qui, le premier, parvint à lui faire relever la tête et découvrit un pauvre visage tuméfié et rouge, tout ruisselant de larmes. Bouleversée du chagrin de sa mère et bouillonnant d'indignation intérieure contre l'abominable Caboche, Catherine courut se jeter à son cou.
    — Facile ou pas, fit Barnabé, il faut reprendre Loyse à Caboche.
    Dieu seul sait le genre d'expériences que la malheureuse a dû faire avec lui !
    — Mais, demanda Sara, comment penses-tu pouvoir la tirer de là ?

    — Pas tout seul, bien sûr ! Il suffirait que la mère Caboche crie à l'aide pour qu'il lui vienne une foule de gens avides de se faire bien voir de son fils ou même de ne pas s'attirer sa colère. Il n'y a qu'une seule solution : Mâchefer. Lui seul peut nous aider.
    Sara avait quitté l'épaule de Jacquette et avait rejoint Barnabé qui se tenait appuyé d'un pied sur l'escalier et mordillait ses ongles nerveusement. Elle murmura assez bas pour que les autres n'entendent pas. Pas assez bas tout de même pour éviter l'oreille fine de Catherine
    : — Tu ne crains pas que Mâchefer veuille se faire payer... en

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