La Bataillon de la Croix-Rousse
de ses amis Pierre Crolas et Saint-Just, tant qu’il fut maître d’agir à sa guise, il fut clément, si clément qu’il excita les fureurs du parti des Violents à la Convention.
« Couthon, de son côté, dit Louis Blanc, avait apporté à Lyon, avec un désir fougueux de soumettre la ville, le parti pris de la pacifier.
« Sentant combien la destruction de ce foyer d’industrie importait à l’Angleterre, il eût voulu pouvoir le conserver à la République ; d’autant qu’en y consacrant ses soins, il ne faisait que se conformer à la politique qu’avec Robespierre et Saint-Just il représentait au sein du Comité de Salut public.
« Couthon ne négligea rien pour faire prévaloir à Lyon la politique ferme, vigilante, mais modérée que Robespierre essayait à Paris. »
Des malveillants excitaient les soldats à violer leur serment de respecter les propriétés : Couthon, de concert avec Laporte et Maignet, annonça que quiconque serait pris à piller serait fusillé dans les vingt-quatre heures.
Les vengeances privées brûlaient de s’assouvir : Couthon fait publier par Doppet, l’écho fidèle de ses pensées, une proclamation où les soldats sont adjurés de se prêter à la répression de tout acte arbitraire.
Le travail s’était arrêté, paralysé par la peur ; Couthon, Laporte et Maignet ordonnent que les ateliers soient ouverts et que les relations commerciales reprennent leur cours.
L’esprit sectionnaire s’agitait : Couthon, Maignet et Châteauneuf-Randon défendent aux citoyens de s’assembler en sections jusqu’à ce que toute fermentation dangereuse ait disparu.
Il eût été peu équitable de comprendre dans la même catégorie ceux des rebelles qui avaient été saisis les armes à la main et ceux qui, moins ostensiblement, s’étaient engagés dans la révolte : nul doute ne pouvant exister à l’égard des premiers et une erreur étant possible à l’égard des seconds, Couthon, d’accord avec ses trois collègues Châteauneuf-Randon, Maignet et Laporte, institua pour juger le cas de flagrant délit, une commission militaire et, pour examiner les autres cas, une commission de justice populaire procédant par voie de jurés, et soumise à une stricte observation des formes.
La condescendance fut même poussée jusque là que le désarmement des Lyonnais, annoncé dès le 11 octobre, n’était pas encore commencé le 18.
Mais il ne nous suffit pas de la voix éloquente de Louis Blanc pour justifier Couthon des accusations exagérées portées contre sa mémoire ; nous invoquons le témoignage du grand historien girondin, de Lamartine qui ne put être trop indulgent pour Couthon, Jacobin, et qui cependant le réhabilite avec chaleur.
« Tous les crimes de la République à Lyon, dit Lamartine, ont été rejetés sur Couthon parce que Couthon était l’ami et le confident de Robespierre dans la répression du fédéralisme, dans la victoire des républicains unitaires contre l’anarchie civile. Les dates, les faits et les paroles impartialement étudiés démentent ces préjugés. Couthon entra à Lyon en pacificateur plutôt qu’en bourreau : il y combattit, avec toute l’énergie que lui permettait son rôle, les excès et les vengeances des Jacobins.
« Il se borna, conformément aux lois existantes, à renvoyer devant une commission militaire les Lyonnais fugitifs pris les armes à la main après la capitulation. Il institua quelques jours après, par ordre du Comité de Salut public, un second tribunal sous le nom de Commission de Justice Populaire. Ce tribunal devait juger tous ceux des citoyens qui, sans être militaires, auraient trempé dans la résistance armée de Lyon à la République. Les formes judiciaires et lentes de ce tribunal donnaient, sinon des garanties à l’innocence, du moins du temps à la réflexion. Couthon garda dix jours le décret qui instituait ce tribunal pour donner aux individus compromis et aux signataires des actes incriminés pendant le siège, le temps de s’évader. Vingt mille citoyens, prévenus par ses soins du danger qui les menaçait, sortirent de la ville et se réfugièrent en Suisse ou dans les montagnes du Forez. »
Voilà ce que pense Lamartine sur le rôle de Couthon :
« Ne sommes-nous pas en droit de penser que, s’il était resté maître de la situation à Lyon, il eût épargné à la ville les horreurs qui suivirent son départ ? »
Malheureusement, et nous
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