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La Bataillon de la Croix-Rousse

Titel: La Bataillon de la Croix-Rousse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louis Noir
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fichus. Périr pour périr, j’ai préféré risquer le tout pour le tout.
    Mouton se tut car cette considération le frappait.
    Doppet continua   :
    – Mais j’avais cette chance là-bas d’avoir près de moi un jeune capitaine nommé Bonaparte, très fort en art militaire, qui mit sa science au service de mon ardeur et de mes vues hardies. Je lui dois la victoire en grande partie.
    Mouton s’inclina devant Doppet et dit   :
    – Voilà la première fois que j’entends un général rendre justice au subalterne qui lui donne la victoire.
    – Eh bien, dit Doppet montrant Couthon, aidez-moi à convaincre les citoyens représentants qu’ils ont tort, et je vous en attribuerai tout le mérite.
    – Je ne demande pas mieux, général   ! dit Mouton. Mais de quoi s’agit-il   ?
    – Voici   ! dit Doppet. J’arrive   : je n’ai rien vu, rien étudié et les représentants que voici me demandent pour demain un ordre d’assaut général.
    – Vous refusez   ?
    – Naturellement.
    – Général, vous avez cent fois raison.
    Couthon, exaspéré se mit à brandir sa béquille.
    – Les voilà tous, les soldats   ! s’écria-t-il. Pas un d’eux n’a la foi   ! Est-ce que les murailles de Jéricho ne sont pas tombées au son des trompettes   ?
    – Faites donc sonner toutes celles du camp autour des remparts de Lyon riposta Mouton. S’ils s’écroulent, je porte ma tête moi-même sur l’échafaud.
    Doppet, en érudit, se mit à rire.
    – Citoyen Couthon, dit-il, il ne faut pas prendre une figure de rhétorique pour une vérité. Les murailles de Jéricho tombant au son des trompettes, c’est une légende. Les Juifs avaient acheté des traîtres qui leur ouvrirent les portes de la ville.
    – Je m’en doutais, dit Mouton. Cette histoire de Jéricho m’avait toujours paru suspecte.
    – Soit   ! dit Mouton. Mais vous ne nierez pas que soixante mille hommes arrêtés devant Lyon par quelques milliers des muscadins, ce ne soit une injure au courage des républicains.
    – Je vous demande, dit Doppet, d’attendre que je me sois fait une opinion sur le plan d’attaque, après m’être entouré des lumières des hommes du métier.
    – Attendre   ! Toujours attendre   ! Toulon est à l’ennemi   ! Carteaux se maintient péniblement avec une poignée d’hommes autour de cette ville rebelle. Il faudrait tirer les vingt mille hommes réguliers que nous avons ici pour pousser ce siège.
    – Je n’en disconviens pas, dit Doppet. Mais il faut d’abord prendre Lyon.
    – Prenons-le   ! Lançons mes Auvergnats   !
    – Attendez au moins que je les ai vus et essayés.
    – Encore ce mot odieux   : attendre   ! Mais ils menacent déjà de partir. Je leur ai promis que le siège serait fini par un assaut à leur arrivée et qu’ils pourraient s’en aller faire leurs vendanges. Je n’ose plus paraître dans leur camp. Ils me crient que leur raisin pourrit sur pied.
    – En voilà des raisons   ! ne put s’empêcher de s’écrier Mouton.
    – Des raisons péremptoires   ! dit Couthon. Qu’un seul Auvergnat déserte, tous s’en iront   !
    – Les moutons de Panurge, alors   ! dit Doppet.
    – Moutons enragés   ! Essayez-en, vous verrez.
    – Est-ce que, vraiment, ils déserteraient   ? demanda Doppet.
    – Oui   ! Et c’est grave.
    – Écoutez, dit le général, je vais monter à cheval avec mon état-major et avec le capitaine Mouton dont je fais grand cas. Je commencerai ma tournée à l’instant même, j’examinerai tout, et, au retour, je vous donnerai mon opinion. Si l’assaut est possible, on le tentera.
    – Allons, dit Couthon en soupirant, résignons-nous à perdre encore cet après-midi et cette nuit. Mais je jure…
    Doppet, qui avait de l’esprit, s’écria en riant   :
    – Citoyen Couthon, un proverbe dit   : Il ne faut jurer de rien.
    Puis, d’un ton de maître   :
    – Citoyens représentants, chacun de vous a amené une colonne de ces nouvelles troupes de réquisition sur la valeur desquelles on n’est pas fixé. Si je suis responsable de mes décisions quant aux attaques, je vous rends moi, responsables, vous, Couthon et Château-Randon, de vos Auvergnats, vous, Javogue, de vos Nivernais. Donc, à vos camps pour l’inspection que je vais faire   ! Je lancerai mes ordres au retour et ils seront donnés selon ce que j’aurai vu. J’agirai avec la conscience d’un patriote aussi hardi, aussi impatient que pas un de vous, mais

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