La chevauchée vers l'empire
contrôler
une province soumise. Au XVII e siècle, le chroniqueur musulman
Abou’l Ghazi écrivit ces mots :
Sous le règne de Gengis Khan, tout le pays compris entre
l’Iran et la terre des Turcs était si sûr qu’un homme aurait pu voyager du
levant au couchant avec un plateau d’or sur la tête sans craindre la moindre
violence de quiconque.
Vitesse et destruction étaient fondamentales pour les
victoires mongoles. Pendant la campagne contre l’empereur jin, les armées du
khan donnèrent l’assaut à plus de quatre-vingt-dix villes en une seule année. Gengis
prit part à vingt-huit de ces batailles et ne fut repoussé que quatre fois. Il
bénéficia certes du fait que la Chine n’avait pas encore commencé à utiliser
efficacement la poudre pour faire la guerre. Six ans seulement après la chute
de Yenking, en 1221, une armée jin lança contre la ville song de Quzhou des
pots de fer explosifs projetant des éclats à la façon des grenades modernes. Ceux
qui viendraient après Gengis devraient faire face aux armements d’une nouvelle
ère.
La bataille contre les chevaliers russes décrite dans le
premier chapitre se déroule à peu près à l’époque de la cinquième croisade en
Terre sainte. Pour replacer la Russie dans son contexte historique, précisons
que la construction de l’immense cathédrale Sainte-Sophie de Novgorod commença
dès 1045 et qu’elle remplaçait une église en bois à treize dômes édifiée un
siècle plus tôt. La Russie médiévale et toute l’Europe étaient à la veille d’une
longue période de construction de cathédrales et d’expansion chrétienne qui se
heurterait à l’islam pendant les quatre siècles suivants. J’ai décrit les
armures et les armes des chevaliers de cette époque aussi exactement que
possible.
Les Mongols allèrent effectivement jusqu’à la Corée, à
laquelle j’ai laissé son nom ancien de Koryo, qui signifie « haut et beau
pays ». Les armées mongoles anéantirent les Khara-Khitaï, une branche des
Jin qui avait quitté l’empire pour se retrancher dans les montagnes de Corée, d’où
la dynastie au pouvoir ne pouvait la déloger.
En la personne de son frère Khasar, de Djebe et de Süböteï, le
khan trouva des généraux qui méritèrent le nom de « chiens de chasse de
Gengis ». On ne pouvait quasiment pas les arrêter et pourtant Gengis se
tourna vers l’Asie centrale musulmane avant même que la conquête de la Chine, ou
même simplement de la Chine du Nord, soit achevée. Dans la réalité, Djebe –
la Flèche – fut établi dans son rôle plus tôt que je ne l’écris, mais la
construction d’une intrigue impose parfois des changements inévitables. Süböteï
et lui devinrent les deux généraux les plus célèbres de leur temps, égaux en talent,
en dureté et en loyauté absolue au khan.
Gengis ne combattit pas pour gouverner des villes dont il n’avait
que faire. Son objectif était le plus souvent personnel : briser ou
exterminer un ennemi, quel que soit le nombre d’armées et de cités qu’il trouvait
sur sa route. Il était prêt à négocier avec l’empereur jin pour Yenking, mais, lorsque
celui-ci se réfugia à Kaifeng, Gengis incendia la ville et envoya une armée à
ses trousses. Malgré les terribles destructions qui suivirent, ce n’était
encore qu’une bataille entre un homme, Gengis, et une famille, les souverains
jin.
D’autres événements amenèrent le khan à abandonner sa
conception personnelle de la guerre. Il est exact qu’un groupe d’émissaires –
traduisez « espions » – mongols furent exécutés par le shah du
Khwarezm. Le gouverneur d’Otrar, un parent du shah, fit arrêter les cent ou
quatre cent cinquante hommes – selon les sources – envoyés par Gengis.
Même alors, le khan présuma que ce gouverneur avait agi de son propre chef et
envoya trois cents hommes de plus pour se le faire livrer et négocier la
libération du premier groupe. Tous furent massacrés et ce fut cet acte qui
amena Gengis à envahir des terres musulmanes. À ce moment-là, il avait très
probablement l’intention d’achever d’abord la conquête de la Chine. Il ne
tenait pas à ouvrir un deuxième front contre un ennemi si nombreux. Mais il n’était
pas homme à ignorer un défi délibéré à son autorité. L’armée mongole se mit en
mouvement et des millions d’hommes et de femmes moururent. Gengis monta seul
sur le sommet d’une
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