La Guerre des Gaules
ceux qui se tenaient cachés dans la forêt – c'était le moment dont ils étaient convenus pour engager le combat –, comme ils avaient formé leur front et disposé leurs unités à l'intérieur de la forêt, augmentant ainsi leur assurance par la solidité de leur formation, ils s'élancèrent soudain tous ensemble et se précipitèrent sur nos cavaliers. Ils n'eurent pas de peine à les défaire et à les disperser ; puis, avec une rapidité incroyable, ils descendirent au pas de course vers la rivière, si bien que presque en même temps ils semblaient se trouver devant la forêt, dans la rivière, et déjà aux prises avec nous. Avec la même rapidité, ils gravirent la colline opposée, marchant sur notre camp et sur ceux qui étaient en train d'y travailler.
20. César avait tout à faire à la fois : il fallait faire arborer l'étendard, qui était le signal de l'alerte, faire sonner la trompette, rappeler les soldats du travail, envoyer chercher ceux qui s'étaient avancés à une certaine distance pour chercher de quoi construire le remblai, ranger les troupes en bataille, les haranguer, donner le signal de l'attaque. Le peu de temps, et l'ennemi qui approchait, rendaient impossible une grande partie de ces mesures. Dans cette situation critique, deux choses aidaient César : d'une part l'instruction et l'entraînement des soldats, qui, exercés par les combats précédents, pouvaient aussi bien se dicter à eux-mêmes la conduite à suivre que l'apprendre d'autrui ; d'autre part, l'ordre qu'il avait donné aux légats de ne pas quitter le travail et de rester chacun avec sa légion, tant que le camp ne serait pas achevé. En raison de la proximité de l'ennemi et de la rapidité de son mouvement, ils n'attendaient pas, cette fois, les ordres de César mais prenaient d'eux-mêmes les dispositions qu'ils jugeaient bonnes.
Figure 9 The Defeat of the Nervii, Plan II: positions of the contending forces at the crisis of the battle
21. César se borna à donner les ordres indispensables et courut haranguer les troupes du côté que le hasard lui offrit il tomba sur la dixième légion. Il fut bref, recommandant seulement aux soldats de se souvenir de leur antique valeur, de ne pas se laisser troubler et de tenir ferme devant l'assaut ; puis, l'ennemi étant à portée de javelot, il donna le signal du combat. Il partit alors vers l'autre aile pour y exhorter aussi les soldats ; il les trouva déjà combattant. On fut tellement pris de court, et l'ardeur offensive des ennemis fut telle, que le temps manqua non seulement pour arborer les insignes, mais même pour mettre les casques et pour enlever les housses des boucliers. Chacun, au hasard de la place où il se trouvait en quittant les travaux du camp, rejoignit les premières enseignes qu'il aperçut, afin de ne pas perdre à la recherche de son unité le temps qu'il devait au combat.
22. Comme les troupes s'étaient rangées selon la nature du terrain et la pente de la colline, en obéissant aux circonstances plutôt qu'aux règles de la tactique et des formations usuelles, comme les légions, sans liaison entre elles, luttaient chacune séparément et que des haies très épaisses, ainsi qu'on l'a dit plus haut, barraient la vue, on n'avait pas de données précises pour l'emploi des réserves, on ne pouvait pourvoir aux besoins de chaque partie du front, et l'unité de commandement était impossible. Aussi bien, les chances étaient-elles trop inégales pour que la fortune des armes ne fût pas aussi très diverse.
23. La 9 e et la 10 e légion, qui se trouvaient à l'aile gaucher, lancèrent le javelot ; harassés par la course et tout hors d'haleine, et, pour finir, blessés par nos traits, les Atrébates (car c'étaient eux qui occupaient ce côté de la ligne ennemie), furent rapidement refoulés de la hauteur vers la rivière, et tandis qu'ils tâchaient de la franchir, les nôtres, les poursuivant à l'épée, en tuèrent un grand nombre. Puis ils n'hésitèrent pas à passer eux-mêmes la rivière, et, progressant sur un terrain qui ne leur était pas favorable, brisant la résistance des ennemis qui s'étaient reformés, ils les mirent en déroute après un nouveau combat. Sur une autre partie du front, deux légions, la 11 e et la 8 e agissant séparément, avaient défait les Viromandues, qui leur étaient opposés, leur avaient fait dévaler la pente et se battaient sur les bords mêmes de la rivière. Mais le camp presque entier,
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