La Guerre des Gaules
aux Atrébates ; trois mille aux Véliocasses, aux Lexovii, aux Aulerques Eburovices ; mille aux Rauraques, aux Boïens ; vingt mille à l'ensemble des peuples qui bordent l'Océan et qui se donnent le nom d'Armoricains : Coriosolites, Redons, Ambibarii, Calètes, Osismes, Lémovices, Unelles. Les Bellovaques ne fournirent pas leur contingent, parce qu'ils prétendaient faire la guerre aux Romains à leur compte et à leur guise, et n'obéir aux ordres de personne ; pourtant, à la prière de Commios, ils envoyèrent deux mille hommes en faveur des liens d'hospitalité qui les unissaient à lui.
76. Ce Commios, comme nous l'avons exposé plus haut, avait fidèlement et utilement servi César, dans les années précédentes, en Bretagne ; en récompense, celui-ci avait ordonné que sa cité fût exempte d'impôts, lui avait restitué ses lois et ses institutions, et avait donné à Commios la suzeraineté sur les Morins. Pourtant, telle fut l'unanimité de la Gaule entière à vouloir reconquérir son indépendance et recouvrer son antique gloire militaire, que la reconnaissance et les souvenirs de l'amitié restèrent sans force, et qu'ils furent unanimes à se jeter dans la guerre de tout leur cœur et avec toutes leurs ressources. On réunit huit mille cavaliers et environ deux cent quarante mille fantassins et on procéda sur le territoire des Héduens au recensement et au dénombrement de ces forces, à la nomination d'officiers. Le commandement supérieur est confié à Commios l'Atrébate, aux Héduens Viridomaros et Eporédorix, à l'Arverne Vercassivellaunos, cousin de Vercingétorix. On leur adjoint des délégués des cités, qui formeront un conseil chargé de la conduite de la guerre. Tous partent pour Alésia pleins d'enthousiasme et de confiance, car aucun d'entre eux ne pensait qu'il fût possible de tenir devant le seul aspect d'une telle multitude, surtout quand il y aurait à livrer deux combats à la fois, les assiégés faisant une sortie tandis qu'à l'extérieur paraîtraient des forces si imposantes de cavalerie et d'infanterie.
77. Cependant les assiégés, une fois passé le jour pour lequel ils attendaient l'arrivée des secours, n'ayant plus de blé, ne sachant pas ce qu'on faisait chez les Héduens, avaient convoqué une assemblée et délibéraient sur la façon dont devait s'achever leur destin. Plusieurs avis furent exprimés, les uns voulant qu'on se rendît, les autres qu'on fît une sortie tandis qu'on en avait encore la force ; mais je ne crois pas devoir passer sous silence le discours de Critognatos, à cause de sa cruauté singulière et sacrilège. Ce personnage, issu d'une grande famille arverne et jouissant d'un grand prestige, parla en ces termes : « Je ne dirai rien de l'opinion de ceux qui parlent de reddition, mot dont ils voilent le plus honteux esclavage ; j'estime que ceux-là ne doivent pas être considérés comme des citoyens et ne méritent pas de faire partie du conseil. Je ne veux avoir affaire qu'à ceux qui sont pour la sortie, dessein dans lequel il vous semble à tous reconnaître le souvenir de l'antique vertu gauloise. Mais non, c'est lâcheté, et non pas vertu, que de ne pouvoir supporter quelque temps la disette. Aller au-devant de la mort, c'est d'un courage plus commun que de supporter la souffrance patiemment. Et pourtant, je me rangerais à cet avis, – tant je respecte l'autorité de ceux qui la préconisent – s'il ne s'agissait d'aventurer que nos existences ; mais en prenant une décision, nous devons tourner nos regards vers la Gaule entière, que nous avons appelée à notre secours. De quel cœur pensez-vous qu'ils combattront, quand en un même lieu auront péri quatre-vingt mille hommes de leurs familles, de leur sang, et qu'ils seront forcés de livrer bataille presque sur leurs cadavres ? Ne frustrez pas de votre appui ces hommes qui ont fait le sacrifice de leur vie pour vous sauver, et n'allez pas, par manque de sens et de réflexion, ou par défaut de courage, courber la Gaule entière sous le joug d'une servitude éternelle. Est-ce que vous doutez de leur loyauté et de leur fidélité, parce qu'ils ne sont pas arrivés au jour dit ? Eh quoi ? pensez-vous donc que ce soit pour leur plaisir que les Romains s'exercent chaque jour là-bas, dans les retranchements de la zone extérieure ? Si vous ne pouvez, tout accès vers nous leur étant fermé, apprendre par leurs messagers que l'arrivée des nôtres est proche,
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