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La Guerre et la Paix - Tome III

La Guerre et la Paix - Tome III

Titel: La Guerre et la Paix - Tome III Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Léon Tolstoï
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Diane ! »
    Le mari s’approcha à ce moment et demanda à sa femme d’un air sombre le sujet de leur conversation.
    « Ah ! Nikita Ivanitch ! » dit Rostow en se levant poliment… et, comme pour l’inviter à prendre part à ses plaisanteries, il lui exposa son intention d’enlever une blonde.
    Cette confidence fut froidement reçue par le mari : la femme rayonnait. Mme la gouvernante, qui était une excellente personne, s’approcha d’eux d’un air moitié souriant et moitié sévère.
    « Anna Ignatievna demande à te voir, Nicolas, – et elle prononça ce nom de manière à lui faire comprendre que cette dame était un personnage important. – Allons, viens !
    – À l’instant, ma tante, mais qui est-elle ?
    – C’est Mme Malvintzew. Elle a entendu parler de toi par sa nièce que tu as sauvée… devines-tu ?
    – Mais il y en a beaucoup que j’ai sauvées, reprit Nicolas.
    – Sa nièce est la princesse Bolkonsky ; elle est ici avec sa tante. Oh ! comme te voilà rouge, qu’est-ce donc ?
    – Mais pas du tout, ma tante, je vous assure.
    – Bien, bien, monsieur le mystérieux ! » Et elle le présenta à une vieille dame, très grande, très forte, coiffée d’une toque bleue, qui venait de finir sa partie avec les gros bonnets la ville.
    C’était Mme Malvintzew, la tante de la princesse Marie, du côté de sa mère, veuve riche et sans enfants, fixée pour toujours à Voronège. Elle était debout et payait sa dette de jeu, lorsque Rostow la salua. Le regardant de toute sa hauteur, et fronçant le sourcil, elle continua à malmener le général qui lui avait gagné son argent.
    « Enchantée, mon cher ! dit-elle en lui tendant la main. Venez me voir. »
    Après avoir échangé quelques mots avec lui au sujet de princesse Marie, et de son défunt père, qu’elle n’avait jamais porté dans son cœur, elle lui demanda des nouvelles du prince André, pour lequel elle n’avait pas non plus une grande sympathie ; elle le congédia enfin, en lui réitérant son invitation, Nicolas lui promit de s’y rendre et rougit de nouveau en la quittant, car le nom de la princesse Marie lui faisait éprouver un sentiment incompréhensible de timidité et même de crainte.
    Sur le point de retourner à la danse, il fut arrêté par la petite main potelée de Mme la gouvernante, qui avait quelques mots à lui dire ; elle l’emmena dans un salon d’où les invités se retirèrent par discrétion.
    « Sais-tu, mon cher, lui dit-elle en donnant un air de gravité à son bienveillant petit visage, j’ai trouvé un parti pour toi ; veux-tu que je te marie ?
    – Avec qui, ma tante ?
    – La princesse Marie ! Catherine Pétrovna propose Lili ; moi, je penche pour la princesse… Veux-tu ? Je suis sûre que ta maman m’en remerciera ; c’est une fille charmante et pas du tout si laide qu’on veut bien le dire.
    – Mais elle n’est pas laide du tout, s’écria Nicolas d’un ton offensé ; quant à moi, ma tante, j’agis en soldat, je ne m’impose à personne, et je ne refuse rien, poursuivit-il sans se donner le temps de réfléchir à sa réponse.
    – Alors souviens-toi que ce n’est pas une plaisanterie, et dans ce cas, mon cher, je te ferai observer que tu es trop assidu auprès de l’autre, de la blonde ! Le mari fait vraiment peine à voir !
    – Quelle idée ! Nous sommes amis, » reprit Nicolas, qui, dans sa naïve simplicité, ne pouvait supposer qu’un aussi agréable passe-temps pût porter ombrage à quelqu’un… « J’ai pourtant répondu une fière bêtise à la femme du gouverneur, se dit-il à souper. La voilà qui va tripoter mon mariage ; et Sonia ? »
    Aussi, lorsqu’il lui fit ses adieux et qu’elle lui rappela en souriant leur conversation, il la prit à part :
    « Je dois vous dire, ma tante, que…
    – Viens, viens ici, mon ami, asseyons-nous… » Et tout à coup il se sentit irrésistiblement poussé à prendre pour confidente cette femme, qui était presque une étrangère pour lui, et à lui confier ses plus secrètes pensées, celles qu’il n’aurait pas même dites à sa mère, à sa sœur ou à son ami le plus intime.
    Lorsque plus tard il se souvint de cette explosion de franchise inexplicable, que rien ne motivait et qui eut pour lui de très graves conséquences, il l’attribua à un effet du hasard.
    « Voici ce que c’est, ma tante. Maman tient à me marier depuis longtemps à quelqu’un de riche, mais un

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