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La mémoire des flammes

La mémoire des flammes

Titel: La mémoire des flammes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Armand Cabasson
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dernière carte dans la bataille : une idée, une spéculation, une hypothèse encore trop peu argumentée... Mais, s’il ne disait rien, on allait le tuer, et Lefine aussi, alors qu’avait-il à perdre ?
    — Au contraire, je sais tout. Vous allez assassiner Napoléon.
    La consternation s’abattit sur le groupe. Quel étrange paradoxe que de voir des gens pointer des armes sur vous tout en ayant l’air inquiets ! Louis de Leaume devint sombre. Non, vraiment, il n’avait pas imaginé les choses ainsi. Il subissait la déconvenue du joueur d’échecs qui annonce en souriant : « Échec et mat » et voit son adversaire lui répondre : « Permettez... », et voilà que ce dernier déplace une pièce qui relance la partie ! Cette erreur de calcul ternissait sa joie, telle une goutte de graisse qui venait tâcher le flamboyant costume de son triomphe. Varencourt s’inquiétait du trouble de leur chef.
    — Il brode, il parle, il prêche le faux, le vrai... C’est par chance qu’il est tombé juste !
    Margont affichait un calme déroutant. Ce n’était qu’un paravent, mais il y employait toute son âme. Lefine, repérant cela, l’imita, et sa sérénité composait un magnifique écho à celle de son ami. Tous deux agissaient comme si tout se déroulait exactement comme ils l’avaient prévu.
    — Charles de Varencourt m’a tout raconté, annonça Margont.
    — C’est faux ! s’énerva Varencourt.
    — Je ne vous crois pas... dit le vicomte de Leaume.
    C’était justement parce qu’il commençait à se poser la question qu’il le niait...
    — Vous voulez encore des preuves ? demanda Margont. Charles m’a expliqué que vous vouliez tuer l’Empereur avec une aiguille imprégnée d’un poison rare aux propriétés étonnantes. Celui-ci passe par le sang et une seule goutte suffit à terrasser un homme. Son nom est curare et il est utilisé par les tribus indiennes d’Amazonie. Il paralyse les muscles et la victime meurt par suff...
    — Mais je n’ai rien dit ! assura Charles de Varencourt, qui se demandait qui avait bien pu faire ces révélations à Margont.
    Ce dernier jubilait. Ses adversaires se jetaient des regards déroutés, ne sachant comment faire face à ce renversement de situation. Margont s’adressa à Varencourt :
    — Allons, rassurez-vous, Charles, vous pouvez cesser de jouer la comédie. La police a encerclé les lieux. Nous avons gagné ! Vous allez pouvoir réaliser votre rêve : passer le reste de votre vie à perdre au jeu les vingt mille francs que Joseph vous a promis.
    Varencourt perdit son sang-froid. Il fut sur le point de tirer sur Margont, mais Louis de Leaume lui saisit le bras et l’obligea à abaisser son arme.
    — Maintenant ! hurla Margont tout en bondissant sur Honoré de Nolant, qui avait tourné la tête vers Leaume et Varencourt.
    Lefîne, aguerri aux corps-à-corps, s’élança avec la vivacité d’un chat sur Jean-Baptiste de Châtel, qui tira, mais un instant trop tard : Lefine avait déjà repoussé l’arme et la balle s’en alla meurtrir une commode. Louis de Leaume aurait pu se débarrasser de Margont, qui lui tournait le dos et rouait de coups de poing Honoré de Nolant. Mais, convaincu de la culpabilité de Charles de Varencourt, il mit d’abord hors de combat celui-ci en lui assenant un coup de crosse à la mâchoire. Le temps de ramasser l’arme de Varencourt, qui s’était effondré en gémissant, et de se retourner : Margont et Lefine passaient déjà la porte. Durant leur empoignade, Margont avait contraint Honoré de Nolant à lâcher son arme, mais n’était pas parvenu à s’en emparer. Ce dernier la récupéra et, de concert avec le vicomte et Châtel, qui sortait un pistolet de petit calibre de sa poche, il se lança à la poursuite des deux fugitifs. Margont dévalait l’escalier à toute allure, par bonds. En bas, l’homme qui les avait guidés pointait son pistolet sur lui. Étant désarmé, Margont se transforma lui-même en projectile en s’élançant sur son adversaire depuis la hauteur des cinq dernières marches qui le séparaient du rez-de-chaussée. Il le percuta à pleine vitesse, le projetant contre la porte. Le dos de ce dernier vint heurter violemment la poignée et il s’effondra en hurlant. Lefine se jeta sur l’arme tombée à terre. Il fit volte-face et la braqua vers le sommet des marches, tandis que Margont ôtait les verrous de la porte. L’autre homme demeuré en bas avait

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