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La Perle de l'empereur

La Perle de l'empereur

Titel: La Perle de l'empereur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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attendait : Amu, qui avait l’habitude de dormir sur le tapis du salon à la porte d’Aldo, était étendu de tout son long dans l’ouverture de cette porte, si magistralement assommé que l’on eut du mal à le ranimer. Ce qui s’était passé était évident : il avait voulu défendre l’accès à la chambre de son maître où tout était retourné. Celui qui avait fait cela pouvait être satisfait : la « Régente » avait disparu…
    Ce que le brave garçon put dire, une fois revenu à la conscience, n’éclaira guère la situation : alors qu’il préparait la couverture du lit, il avait entendu du bruit dans le salon et naturellement était allé voir, et c’est en y pénétrant qu’il avait reçu sur la nuque un choc violent. Autrement dit, il n’avait rien vu. Quant à l’examen des lieux, il n’apprit pas grand-chose aux deux hommes : l’agresseur n’avait pas eu la courtoisie d’abandonner sur place un bouton, un bout de turban, une boîte d’allumettes ou un mégot de cigare, comme cela se fait dans les bons romans policiers. En outre il n’avait emporté que la perle.
    — Si tu veux mon avis, on n’a pas besoin d’indices, soupira Adalbert en se laissant choir dans un fauteuil pour se verser un verre de whisky. Le vol est signé : le cher Alwar a envoyé un ou plusieurs de ses sbires pour récupérer la perle, un point c’est tout !
    — Une chose m’étonne : depuis que nous sommes ici, nous avons à notre service une nuée de domestiques, tous spécialisés à l’extrême. Veux-tu me dire, en ce cas, pourquoi Amu se trouvait seul pour faire face au voleur ?
    — Pour deux raisons : d’abord l’homme portait sans doute la livrée du palais et il a dû profiter du moment où tout le monde admirait le feu d’artifice. Les hindous en sont friands et c’est en outre l’une des manifestations de la vie mondaine à laquelle les serviteurs peuvent prendre part à égalité avec leurs maîtres : il suffit pour cela d’avoir des yeux.
    — D’accord, mais ils pourraient être revenus ? Les fusées sont éteintes depuis un moment déjà.
    — Il est tard et leurs journées sont longues. De plus, tu oublies qu’Amu jouait volontiers les chiens de garde. En tout cas, le coup n’est pas si mal agencé : tu as déclaré hautement avoir repris la « Régente » et si, ce soir, tu vas dire à Jagad Jit Singh qu’on te l’a volée, il pourrait penser, si Alwar revenait à la charge, que tu as choisi un moyen tout simple d’éviter son arbitrage : tu n’as plus la perle, donc il n’est plus possible de la rendre à cette sombre brute.
    — Je me vois mal courant me plaindre à cette heure auprès de notre hôte. C’est dans la matinée que commence le grand défilé vers la ville et le Durbar du Vieux Palais. Jagad Jit Singh n’a pas beaucoup de temps pour se reposer, en admettant qu’il rejoigne son lit. Je l’imagine plutôt se recueillant avant cette solennité à laquelle nous allons avoir le privilège d’assister. Seuls Européens avec Croisset ! Je ne jouerai pas les trouble-fêtes !
    — En d’autres termes : tu laisses tomber ?
    Aldo fouilla dans sa robe, réussit à trouver son étui à cigarettes, en alluma une, tira quelques bouffées méditatives et finalement sourit :
    — Oui.
    — Mais ça te coûte une fortune ?
    — Je ne dis pas non, mais je suis tellement content d’être débarrassé de cette foutue perle sans espoir de retour ! Si elle cause à Alwar seulement la moitié des emmerdements que je lui dois, je serai le plus heureux des hommes ! Malheureusement je n’en saurai rien !
    — Mais on peut toujours imaginer ? fit Adalbert, sa bonne humeur retrouvée et s’extrayant de son fauteuil. En attendant, allons donner un coup de main à Amu pour remettre ta chambre en ordre !
    Le lendemain la petite ville de Kapurthala était plus rose que jamais. Dans l’attente du cortège d’éléphants qui amènerait bientôt le maharadjah, son héritier et les princes jusqu’à la cour d’honneur du Vieux Palais où l’attendaient vassaux et notables, les femmes de la cité, dans leurs voiles de fête déclinant toutes les nuances du rose et du rouge, se rassemblaient sur les terrasses.
    Sur une autre, dans l’enceinte même du palais et placée en face du trône d’or, un vélum bleu et or abriterait les invités des ardeurs du soleil. C’est là que, réintégrés dans leurs austères jaquettes de cérémonie,

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