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La ville qui n'aimait pas son roi

La ville qui n'aimait pas son roi

Titel: La ville qui n'aimait pas son roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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minutes par François d’O et ses amis. Le marquis
     d’O annonça alors à Navarre qu’ils ne le reconnaîtraient comme roi de France que s’il abjurait la religion réformée.
    — Plutôt mourir de mille morts que d’avoir un roi huguenot! conclut-il insolemment.
    Biron, manifestement outré par ce discours, prit alors la main d’Henri de Bourbon.
    — Vous êtes le roi des braves, sire, dit-il, et vous ne serez abandonné que par les poltrons!
    Conciliant, Navarre répéta qu’il était prêt à se faire instruire dans la religion catholique… dans quelques mois.
    Le marquis d’O se retira et la journée s’écoula en conciliabules et en conseils 5 . Le nouveau roi rencontra Épernon et plusieurs des capitaines de l’armée royale sans obtenir d’accord quant à leur ralliement.
     La situation était grave. Henri de Bourbon n’avait guère avec lui plus de deux mille huguenots et les catholiques se mêlaient
     peu avec eux. La noblesse provinciale n’aimait pas plus les calvinistes et préférait suivre les ducs de Montpensier et d’Épernon.
     La plupart n’admettaient pas qu’un hérétique pût porter la couronne.
    Les princes, les ducs, les maréchaux, les seigneurs pourvus des grands commandements, et les derniers conseillers de Henri III,
     comme Rambouillet et le surintendant desfinances François d’O s’assemblèrent dans la nuit du 2 août. Le sort de la France dépendait de la résolution qu’ils allaient
     prendre. La moitié d’entre eux demanda fermement que le roi de Navarre soit proclamé héritier légitime de la couronne, puisqu’il
     avait été désigné comme tel par Henri III lui-même sur son lit de mort. L’obstacle était celui de sa religion, aussi le marquis
     d’O et ses amis proposèrent-ils qu’on lui offre la couronne, à la condition d’une conversion immédiate.
    Henri répondit qu’il ne pouvait l’accepter sans déshonneur et se plaignit qu’on lui mît le couteau sous la gorge. Il invoqua
     les droits de sa conscience, offrit aux catholiques toutes les garanties qu’ils voudraient, mais refusa de se convertir s’il
     n’était éclairé par un concile national. Il ajouta que quelle que soit la décision des anciens fidèles d’Henri III, son règne
     avait commencé ce mercredi 2 août 1589.
    Pendant ce temps se préparaient les obsèques du roi et, pour calmer la colère de l’armée et des loyalistes, le cadavre de
     Clément fut tiré à quatre chevaux, découpé en quartiers, puis brûlé devant l’église de Saint-Cloud.
    Le soir de ce jeudi, le baron de Rosny avait invité à souper Olivier et Nicolas pour parler de la situation de l’armée. Si
     aucune solution n’était trouvée, la rupture entre catholiques et protestants serait définitive et le nouveau roi de France
     ne serait pas plus puissant que l’ancien roi de Navarre.
    Trois autres hommes étaient à ce souper : Venetianelli, Richelieu et M. de Cubsac.
    Il Magnifichino avait quitté Paris le matin grâce à un laissez-passer obtenu par Pulcinella auprès du chevalier d’Aumale. Brièvement présenté
     par Nicolas Poulain au nouveau roi, il lui avait fait un rapide compte rendu de l’état d’esprit des Parisiens. Avec cette
     affabilité qui lui faisait gagner des cœurs, Henri IV lui avait confirmé sa charge de Franc-archer dont il demanderait l’enregistrement
     au parlement de Tours.
    Malgré sa foi catholique, le Grand prévôt avait rejoint le roi de Navarre sans réel état d’âme. Pour Richelieu la loi salique
     primait sur la religion et Henri de Bourbon était à la fois l’héritier légitime et celui que Henri III avait désigné. Au demeurant,
     sa haine envers la Ligue ne pouvait lui permettre d’autres choix.
    Quant à Cubsac, qui n’avait pas quitté Nicolas Poulain depuis la mort d’Henri III, il était surtout venu chez Rosny pour manger
     tant les soupers du baron étaient réputés fameux.
    — Tout repose désormais sur le marquis d’O, expliquait gravement Rosny après que les domestiques se furent retirés. Que le surintendant accepte de rester près du roi, et une grande partie de la noblesse catholique le suivra. Qu’il parte, et la moitié de l’armée s’en ira. Je lui ai encore parlé cet après-midi, et je lui ai proposé de venir ce soir. Il ne m’a dit ni oui ni non. J’espérais sa venue à cette heure, mais je crains qu’il n’ait déjà pris la décision de quitter la cour.
    — Notre ami Michel de Montaigne

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