Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
L'âme de la France

L'âme de la France

Titel: L'âme de la France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
Vom Netzwerk:
les faubourgs.
    « Il faut bien se servir des jacobins pour combattre les dangers les plus pressants, dit Napoléon. Mais soyez tranquilles : je suis là pour les arrêter. »

    Le cynisme de l'homme d'action dévoile, dans cette déclaration, l'une des caractéristiques essentielles de l'histoire politique française telle que la Révolution en a redessiné les contours.
    La France est une nation « politique ».
    Depuis la préparation des élections aux états généraux et par le biais des cahiers de doléances, le peuple est descendu dans l'arène non pas seulement pour protester ou défendre telle ou telle revendication particulière, mais pour intervenir et même s'emparer des problèmes politiques généraux de la nation.
    Il y a donc désormais une « opinion populaire », celle qui a provoqué les journées révolutionnaires.
    Les « sections » de sans-culottes et les clubs l'orientent.
    Elle a pesé sur le sort de la Révolution. Elle est responsable de ses « dérapages » – les massacres de Septembre, la Terreur, l'ébauche de dictature jacobine –, qui, selon certains historiens, sont venus rompre le raisonnable ordonnancement de la monarchie constitutionnelle.
    Napoléon Bonaparte a tenté de gouverner au centre de l'échiquier – « ni bonnets rouges ni talons rouges, je suis national » –, mais les « extrémistes » continuent de peser.
    Ces néojacobins peuvent servir de contrepoids aux royalistes.
    Pour les rallier, il lui faut emprunter leur langage, faire mine de « recommencer la Révolution ».
    Et alors que Louis XVIII vient à peine de s'enfuir de Paris pour gagner Gand avec la Cour, Napoléon nomme le régicide Carnot, ancien membre du Comité de salut public, ministre de l'Intérieur.
    Manière de rallier à soi les jacobins, de montrer aux royalistes qu'on n'est prêt à aucun compromis avec eux, mais façon aussi de persuader les notables qu'on ne cédera pas aux « anarchistes ».

    Cette posture ultime renforce l'image « révolutionnaire » et « républicaine » de l'Empereur.
    Ce jeu de bascule – s'appuyer sur le quart état, les sentiments révolutionnaires d'une partie du peuple, pour combattre les royalistes tout en rassurant les notables, puis, une fois le pouvoir consolidé, se dégager du soutien jacobin – devient une figure classique de la vie politique française.
    Napoléon Bonaparte en fut l'un des premiers et grands metteurs en œuvre.

    Mais, au printemps de 1815, alors que toute l'Europe monarchiste se rassemble pour en finir avec cet « empereur jacobin », la manœuvre ne peut réussir.
    Certes, un frémissement patriotique parcourt le pays. On s'enrôle pour aller combattre aux frontières. On entonne Le Chant du départ et La Marseillaise . Et Napoléon ne manquera pas d'hommes pour affronter la septième coalition.
    Certes, les fédérés des faubourgs parisiens réclament des armes. Mais Napoléon ne leur en donne pas.
    Il veut l'appui des notables, de ce Benjamin Constant qui a rédigé l'« Acte additionnel aux Constitutions de l'Empire » et qui est précisément un adversaire résolu de la Révolution et de... l'Empire !
    Quant aux royalistes, ils se soulèvent en Vendée. Et les électeurs – ce sont des notables – élisent pour la Chambre des représentants des « libéraux » qui aspirent à l'ordre et à la paix.
    Or Napoléon ne peut leur apporter que la guerre – puisque les coalisés ont refusé d'entendre ses appels à la paix –, et les notables savent d'expérience que la guerre est un engrenage d'où peut surgir une nouvelle fois le désordre, la terreur, et, au mieux, un renforcement des pouvoirs de ce Napoléon dont l'Europe ne veut plus.
    Ainsi, avant même que ne s'engage la bataille de Waterloo, Napoléon a-t-il perdu la guerre politique.
    La défaite militaire ne peut que se traduire par une abdication.
    Sans doute, après l'annonce de la défaite de Waterloo – un 18 juin –, la foule continue-t-elle à défiler dans Paris, réclamant des armes et criant « Vive l'Empereur ! ». Et Carnot de proposer l'instauration d'une dictature de salut public confiée à Napoléon Bonaparte.
    Mais la Chambre des représentants et la Chambre des pairs ne laissent à Napoléon que le choix entre la déchéance – qu'elles voteraient – et l'abdication.
    Il faudrait faire contre elles un « 18 Brumaire » du peuple. Mais Napoléon – l'ancien lieutenant qui, en 1789, avait réprimé

Weitere Kostenlose Bücher